Les enfants maltraités ont besoin de savoir qu'ils ne sont pas coupables. (17/10/2011)
Il y a des parents qui ont l'apparence de la normalité et se cachent derrière. Ce sont par exemple d'anciens enfants maltraités. Par nature, dans la plupart des cas, ils montrent peu d'affects, une rigidité affective avec des traits de comportement obsessionnel. Ces parents ont une forte emprise sur l'enfant et une mauvaise image d'eux-mêmes, liée à un passé de frustration et de carences profondes. Ils montrent une grande intolérance à la frustration et vivent souvent repliés sur eux-mêmes, isolés et sans amis.
C'est à la naissance de l'enfant que ressurgit ce passé: ils peuvent s'identifier à de bonnes images parentales. Si la grossesse est désirée, l'enfant est investi d'un pouvoir de réparation, il doit combler le vide, le manque d'amour des parents. Dans ce contexte, le moindre problème vécu par l'enfant est vécu comme une persécution: il le fait exprès ! En fait, ils se sentent mauvais et projettent cela sur l'enfant: c'est lui qui est mauvais. L'enfant devient ainsi l'image vivante et permanente de leur échec et les mauvais traitements servent à faire disparaître cette image.
Derrière cette apparence de normalité, il y a aussi les paranoïaques pour lesquels l'enfant devient l'objet de leur "toute-puissance" destructrice, et les pervers qui trouvent leur jouissance dans la souffrance de l'autre.
Il y a encore "les cas sociaux" , familles chaotiques à problèmes multiples. Souvent isolés de leur famille jeunes, ils ne peuvent se projeter dans l'avenir. Les grossesses ne sont pas désirées et l'enfant doit ici aussi combler un vide. On rêve que lorsqu'il sera là, tout ira mieux ; quand il arrive, c'est une bouche de plus à nourrir.
L'enfant peut être marqué dès le départ: enfant adultérin ou handicapé, hyper-investi par la mère. Le père ne le supporte pas. S'il a une petite malformation, cela peut paraître énorme à certains parents. Ces enfants vivent ce petit handicap comme la preuve de leur incapacité à faire quoi que ce soit de bon ! Ce peut être un enfant issu d'une première union, un enfant de remplacement arrivant après un deuil ou un enfant ressemblant à quelqu'un que l'on tait.
Nous sommes tous responsables de la maltraitance de ces enfants. Les bribes psychopathologiques que je viens d'évoquer et qui sont les plus représentatives doivent être traitées à la racine puisque nous en connaissons désormais les causes. Pourquoi tant de silence face à ces situations de violences sur enfants ? Il faut ajouter les violences par "omission" ; carences qui peuvent être responsables de dénutrition, voire de morts d'enfants ; carences affectives qui peuvent avoir des répercussions dramatiques ( hospitalisme ) ; mauvais traitements psychologiques tels que sadisme verbal, humiliation, dévalorisation, exigences éducatives inadaptées à l'âge de l'enfant, rejet, mise à l'écart...
Lorsque nous sommes témoins de tels manques destructeurs, nous devons nous sentir concernés et mettre en accusation les personnes pratiquant de tels sévices. Il ne s'agit nullement de juger les humains qui projettent leurs propres souffrances mais, de venir en aide à toute une famille qui ne sait pas ou plus où sont ses repères. Notre conscience sociale exige que la majorité ne se taise plus par souci de tranquillité.
Les enfants du présent sont la société du futur proche. Il nous suffit de parler de ces actes moralement réprobateurs pour que des psychologues ou des éducateurs soient nommés par un juge afin de mettre en place une rupture de ces schémas aliénants et qui risquent de se répercuter dans l'avenir. Les enfants maltraités ont besoin de savoir qu'ils ne sont pas coupables des gestes de leurs proches car, souvent ils s'imaginent que les violences commises ne sont que des sanctions de leurs comportements atypiques. Seule, une rupture définitive du silence leur fera comprendre qu'ils existent aux yeux de la société et que leur vie n'est pas un désert mortifère. Il en va de notre volonté de changer le devenir de l'humanité.
Bruno LEROY.
14:12 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
Commentaires
Bonjour Bruno
J'ai lu ta publication. J'adhère et surtout aux dimensions psychopathologiques que tu évoques, du côtés des parents qui ne sont plus aptes à apporter à leur enfant ce qui lui est nécessaire pour se développer favorablement de manière psycho-affective. Sur mon lieu de travail (accueil de jeunes avec hébergement), j'accompagne certains enfants qui sont concernés par cette difficulté.
Il n'est pas toujours évident de se positionner, en tant que professionnel, pour savoir où se trouve la limite avec le maintien du lien de l'enfant par rapport à sa famille d'origine. Souvent, au sens de Joseph Rouzel, il faut bricoler, tatônner, se fier à son intuition, tout en métacommunicant avec ses collègues lors des réunions d'équipe.
Toujours est-il que nous essayons d'inscrire l'enfant dans sa constructibilité psychocorporelle avec un regard et des paroles validantes, faisant sentir au jeune qu'il a toute sa dignité et qu'il a le droit de s'exprimer, d'exprimer ses émotions en tant que sujet, que personne. Qu'il n'est en aucun cas responsable de son placement, placement qu'il a le droit de vivre comme injuste et difficile, mais que nous faisons notre possible pour lui rendre son séjour agréable et épanouissant, en institution.
Écrit par : Olivier S. | 18/10/2011