Une œuvre littéraire est un trait d'union, presque une communion. (03/12/2011)
Par la sublimation, l'artiste réalise ce que ses pulsions inconscientes et sexuelles ( au sens large ) lui dictent, mais ce seulement après " une désexualisation ", afin que l'oeuvre soit au service de tous.
Alors que le patient qui souffre, au sens névrotique, persiste inconsciemment dans la réalisation de ses plaisirs invisibles, l'artiste passe de la rêverie à la réalité. L'artiste authentique désire que l'autre accepte ses fantasmes exprimés dans son œuvre, qu'on admire celle-ci et non lui-même. Le " faux " artiste veut qu'on l'accepte en tant que personne et il s'adapte à son public. Cet aspect relationnel est à mettre en liaison avec le rêve : en effet, si l'œuvre d'art, bien qu'étant aussi l'expression d'un fantasme, est de nature altruiste car elle tend à procurer du plaisir aux autres, a contrario, le rêve, fantasme imagé également, est une formation égoïste et narcissique.
Beaucoup de gens se disent peu ou pas doués, affirment qu'ils sont incapables de réaliser ou même d'apprendre quoi que ce soit dans le domaine artistique, en un mot qu'ils n'ont pas de talent. Or, la psychanalyse a montré qu'il ne s'agit nullement d'une absence de compétence, mais plutôt d'une sorte d'inhibition d'origine psychique. Les analyses de certains patients qui se jugeaient peu doués pour une discipline donnée ont montré que celle-ci était liée inconsciemment à des composantes d'une sexualité infantile réprimée, et que, en fin de compte, la pratique leur en était inconsciemment désagréable.
Si un sujet s'intéresse particulièrement à une forme d'art, ce peut être parce que le ou les objets qu'elle utilise résonnent dans son inconscient comme un écho à des tendances infantiles refoulées. Il y a transformation de la satisfaction infantile de la manipulation en élément esthétique pour le plaisir des autres ( sublimation ). Le résultat du geste artistique contient également une foule d'éléments symboliques. Ainsi, les œuvres picturales sont riches en indices du langage inconscient. Même dans les scènes figuratives, qui pourtant reproduisent la réalité, on peut trouver des significations symboliques. Mais il ne faut pas que ce soit arbitraire, et la connaissance de l'artiste, par ce qu'il dit de lui ou de son œuvre, permettra une plus grande objectivité.
Contrairement à ce que l'on pense parfois, la psychanalyse ne " détériore " pas les artistes, car leur art n'est pas toujours un moyen de défense pathogène comme dans les états névrotiques. Il n'y a pas de contradiction dans le fait qu'un artiste ait besoin d'une analyse, même si, en créant, certains d'entre eux retrouvent un chemin vers la réalité.
Il faut envisager le troisième " personnage ", qui se situe entre l'écrivain et son œuvre : le lecteur, à qui finalement est destiné l'ouvrage. Ce dernier va induire chez celui qui le découvre une série de pensées et d'affects qui seront comme une sorte de résonance des fantasmes de l'auteur. Il est impossible que se créent de façon toute nouvelle et à partir de rien des sentiments profonds ( négatifs ou positifs ) chez le lecteur ( ou le spectateur ) ; il y a toujours un substrat initial composé du passé de celui qui lit l'ouvrage, la pièce ou toutes formes d'oeuvres.
Ainsi, une œuvre littéraire ou dramatique est un trait d'union, presque une communion, entre celui qui exprime par écrit une fraction de son inconscient et celui qui va chercher dans l'ouvrage ce que, peut-être, il attendait.
Bruno LEROY.
17:23 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |