TOUT VOUS SAUREZ TOUT SUR LE CPE. (06/04/2006)
En France, le contrat première embauche (CPE) est un type de contrat de travail à durée indéterminée, à destination des moins de 26 ans. Le CPE a été institué par un amendement à l'article 8 de la "loi pour l'égalité des chances". Contrairement à ce que son nom indique, un salarié peut très bien être sous le régime de ce contrat, sans qu'il s'agisse pour autant de son premier emploi. À l'instar du CNE (contrat nouvelle embauche), ce contrat est assorti d'une période de consolidation de deux ans. Durant cette période, l'employeur peut notamment rompre le contrat de travail sans avoir à énoncer son motif de licenciement, ce qui rompt avec une disposition inscrite dans le Code du travail en 1973.
Le premier ministre français Dominique de Villepin, qui a annoncé sa création le 16 janvier 2006, affirme vouloir grâce à ce nouveau contrat réduire le chômage des jeunes, dont le taux en 2006 (23%) était supérieur au taux moyen de la population (environ 9%). Ce texte a d'un autre côté suscité une vive opposition parmi les syndicats de salariés, les partis politiques de gauche et un nombre important d'étudiants et lycéens, estimant entre autres que le contrat facilitera les licenciements abusifs et la précarité. Des divisions sont également apparues parmi les organisations de droite et le patronat.
Promulgué par le président Jacques Chirac fin mars 2006, celui-ci a toutefois demandé aux entreprises de ne pas l'appliquer, tandis qu'il chargeait l'UMP et son dirigeant Nicolas Sarkozy de rédiger un nouveau projet de loi, qui porterait notamment la période dite de consolidation à un an au lieu de deux.
Fonctionnement du contrat première embauche
Le CPE est réservé aux salariés de moins de 26 ans et concerne uniquement les entreprises du secteur privé de plus de vingt salariés, à la différence du contrat nouvelle embauche (CNE) qui ne s'adresse qu'aux petites et moyennes entreprises (PME) et industries (PMI) de moins de vingt salariés. Le CPE permet à l'employeur de se dispenser de motif de licenciement, disposition également prévue par le CNE. De plus, tout comme pour tout contrat à durée indéterminée (CDI) proposé aux salariés de moins de 26 ans au chômage depuis plus de six mois, le CPE s'accompagne d'exonération de cotisations patronales pendant une durée de trois ans.
Les stages, CDD et périodes en alternance effectués par le salarié dans la société au cours des deux années précédant la signature du CPE sont décomptés des deux années de « consolidation » du CPE, qui peut être contracté après un CDD, malgré son nom. Enfin, le contrat doit être porté par écrit (il sera sinon considéré comme un CDI).
Rupture du contrat
Pendant la période d'essai
Comme tout contrat de travail, une période d'essai est possible dans le cadre d'un CPE (à distinguer de la "période de consolidation" qui permet une rupture de contrat sans en exprimer les motifs pendant deux ans).
Toutefois, une telle période d'essai dans le cadre d'un CPE présente peu d'intérêt. En effet, la période de consolidation de deux ans présente les mêmes modalités que la période d'essai, sauf bien sûr en ce qui concerne sa plus grande durée et la question du préavis. A noter que la jurisprudence de la Cour de cassation considère, dans le cadre d'un CDI standard, que les périodes d'essais de plus de quelques jours (pour les ouvriers), de deux mois (pour les techniciens), d'un mois (pour les employés), de trois mois (pour les cadres) ou de six mois (pour les cadres supérieurs) sont "abusives" et contraires aux conventions internationales [1].
Selon le principe de l'ordre public social, en cas d'interférence entre la période d'essai et la période de consolidation, ce sont les textes les plus favorables au salarié qui s'appliquent. Une période d'essai présente deux caractéristiques : pas d'obligation de donner de motifs de licenciement pendant cette période, et pas de préavis. Or, la période de consolidation prévue dans un CPE prévoit l'existence de 15 jours de préavis à partir d'un mois passé dans l'entreprise, et prévoit également l'absence d'obligation de donner les motifs du licenciement pendant une période de deux ans. Pendant le premier mois, la période de consolidation présente donc exactement les mêmes modalités qu'une période d'essai d'un mois: pas de préavis, pas de motifs, il est donc d'une part inutile pour l'employeur de prévoir une période d'essai de cette durée. D'autre part, au-délà d'un mois, la période de consolidation prévoit des modalités qui "annulent" celle de la période d'essai, car elles sont plus protectrices du salarié : à partir d'un mois, l'employeur est tenu de fournir un préavis de 15 jours, malgré l'existence de la période d'essai qui prévoit en théorie l'absence de préavis.
Cependant, une période d'essai en CDI varie selon la profession exercée, et n'excède généralement pas 6 mois : au-delà de 6 mois en CDI, l'employeur est, quelle que soit la profession du salarié, tenu de fournir des motifs de licenciement, tandis qu'après 6 mois en CPE, l'employeur pourra toujours licencier sans donner de motif. Cela signifie que comparé à une période d'essai en CDI, le CPE est plus protecteur du salarié, mais par rapport à un emploi en CDI où la période d'essai viendrait de se terminer, le CPE présente des inconvénients pour le salarié (possibilité pour l'employeur de licencier sans motif, période de préavis réduite à 15 jours au lieu d'un mois si la période d'essai était inférieure à 6 mois).
Pendant la "période de consolidation"
Durée de la période de consolidation
La période de consolidation dure deux ans, à laquelle est soustrait le temps passé dans l'entreprise dans le cadre de stages ou de contrats antérieurs.
La rupture du contrat peut être fixée par un préavis :
- aucun préavis si le contrat est conclu depuis moins d'un mois ;
- à quinze jours dans le cas d'un contrat conclu depuis moins de six mois et depuis plus d'un mois à la date de la rupture ;
- à un mois dans le cadre d'un contrat conclu depuis plus de six mois (Loi art.8 II alinéa 6).
Indemnités à verser
De plus, lorsque l'employeur est à l'origine de la rupture et si la rupture intervient après trois mois passés dans l'entreprise, le salarié bénéficie d'une indemnité de rupture de 8% (du montant total de sa rémunération brute due depuis la conclusion du contrat) sauf faute grave de sa part. Par ailleurs, l'employeur verse aux Assedics un montant égal à 2% de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat. Pour un CDI, ces indemnités ne sont dues qu'aux salariés ayant plus de deux ans d'ancienneté.
Si l'employeur rompt le contrat après quatre mois passés dans l'entreprise, le titulaire d'un CPE touchera de l'État une allocation forfaitaire de 490€ par mois, pendant deux mois.
Motifs de licenciements
En cas de rupture à l'initiative de l'employeur pendant les deux premières années, ce dernier n'est pas obligé de fournir son motif de licenciement. Néanmoins, une décision du Conseil d'Etat concernant le CNE précise que cela ne dispense pas l'employeur de détenir un motif légitime, à expliquer si le salarié conteste son licenciement devant les conseil de prud'hommes. Le salarié licencié à un an pour contester un tel licenciement. Contrairement à un CDI (après période d'essai), c'est le salarié et non pas l'employeur qui devra prouver qu'il a été licencié pour un motif abusif. La charge de la preuve est donc renversée (ce n'est plus l'employeur qui doit justifier son licenciement mais le salarié licencié qui doit prouver un licenciement arbitraire).
Concrètement, lors d'une contestation de licenciement pour un CDI classique (hors période d'essai), le salarié doit accomplir la procédure prud'hommale classique, il doit déposer des chefs de demande, mais sans avoir à apporter de preuves : c'est l'employeur qui doit apporter la preuve au cours de l'audience que le licenciement s'est bien fait pour la cause réelle et sérieuse indiquée dans la lettre de licenciement. Avec le CPE, si le licenciement intervient pendant les deux ans de période de consolidation, le salarié doit préalablement apporter la preuve que le licenciement a été fait pour un motif illégal dissimulé (puisque l'employeur n'a pas à indiquer les motifs du licenciement dans la lettre) pour que la démarche puisse aboutir; l'employeur pourra ensuite se défendre en apportant éventuellement les preuves que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse.
La période d'essai d'un CDI est déjà soumise à ces règles, ce qui a fait dire aux détracteurs du texte que "le CPE a une période d'essai de deux ans" et à le comparer aux contrats de travail existants avant 1973 (où l'employeur n'était pas tenu d'exprimer ses motifs).
En cas de licenciement pour motif disciplinaire (pour faute grave), l'employeur a l'obligation de mettre en œuvre la procédure de licenciement d'un CDI.
Après la "période de consolidation"
Lorsque la "période de consolidation" s'achève, les mêmes conditions de rupture de contrat qu'un CDI classique s'appliquent. Un licenciement s'accompagne alors :
- d'une procédure de licenciement identique à celle d'un CDI (préavis de deux mois, entretien préalable, ...) ;
- d'une indemnité égale à 1/10ème de salaire de référence par année d'ancienneté pour le salarié présent depuis plus de deux ans dans l'entreprise. Pour le salarié présent depuis plus de dix ans, il convient d'ajouter à cette indemnité 1/15ème du salaire de référence pour chaque année au delà des 10 ans. Les indemnités sont dans tous les cas doublées en cas de licenciement économique.
Si le salarié souhaite contester les motifs de son licenciement aux Conseil des Prud'hommes, la démarche est identique à celle pour un CDI (hors période d'essai). C'est maintenant à l'ancien employeur de prouver le caractère réel et serieux des motifs de licenciement qu'il a invoqués dans la lettre de licenciement (on dit qu'il y a inversion de charge de preuve). En cas de doute les juges trancheront en faveur du salarié.
Réembauche en CPE
Si l'employeur rompt le contrat dans les deux premières années, le salarié ne peut se voir proposer un nouveau CPE pour le même poste (entre la même entreprise et le même salarié) qu'après un délai de trois mois. Le temps de travail du premier CPE effectué au cours des deux dernières années est déduit de la période de « consolidation » du nouveau contrat (entre la même entreprise et le même salarié). Par exemple, si un CPE est rompu au bout de dix-huit mois, et qu'un nouveau est signé après trois mois (entre la même entreprise et le même salarié), les dix-huit mois du premier contrat sont déduits de la période de « consolidation » du nouveau CPE.
- Texte original :
En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau CPE entre le même employeur et le même salarié avant que ne soit écoulé un délai de trois mois à compter du jour de la rupture du précédent contrat.
Ce paragraphe, mis en relation avec celui énoncé en début d'article 8 de la loi pour l'égalité des chances, concernant la déduction de la période de consolidation du temps passé dans l'entreprise au maximum deux ans avant la signature du contrat nouvelle embauche fait que le temps passé lors du premier CPE est déduit de la période de consolidation du second CPE.
Il n'y a en revanche aucun délai entre la signature d'un nouveau CPE entre un employé ayant déja bénéficié d'un CPE et une nouvelle entreprise. Le salarié engagé dans la nouvelle entreprise avec un CPE ne peut se prévaloir d'une période de consolidation effectuée dans une autre entreprise dans le cadre d'un CPE.
Droit individuel à la formation (DIF)
Le salarié recruté en CPE acquiert un DIF de vingt heures par an dès le deuxième mois passé dans l'entreprise. L'ouverture des droits se fera pro rata temporis. Par exemple, au bout de six mois, l'employé en CPE aura droit à 10 heures de DIF. En CDI, le DIF n'est ouvert qu'au bout de la première année et en CDD, le DIF est calculé pro rata temporis.
Accès au logement
Les salariés en CPE seront éligibles au Locapass (comme toutes les personnes de moins de 30 ans exceptés les fonctionnaires titularisés) qui consiste principalement en l'avance de la caution et une caution solidaire de l'État sur le versement des loyers pendant dix-huit mois. Néanmoins, il est soumis aux mêmes conditions que le CNE au regard des critères d'attribution de crédits ou de logements par les organismes concernés. Cependant une banque accordera un crédit maximum de 2000€ qui est constitué du crédit de la caution plus un crédit à la consommation, comme par exemple pour l'achat d'une voiture.
Dominique de Villepin et Baudouin Prot (BNP Paribas), président de la fédération des banques, assurent qu'il permettra l'accès au crédit. Cependant, aucun engagement écrit n'a été contracté, et les banques et organismes de crédits n'ont pas besoin de motiver leurs refus (comme pour tout crédit), d'où les craintes des opposants au CPE de voir l'accès au crédit pour les titulaires d'un tel contrat plus difficile.
La loi
Vote de la loi
L'amendement portant le CPE fut inséré dans le projet de loi pour l'égalité des chances et fut adopté par l'Assemblée nationale dans la nuit du 8 au 9 février 2006. Il restait alors à examiner 27 articles et quelques 370 amendements[2] du projet de loi dont la majorité était déposée par les partis d'opposition. Par opportunité politique, Dominique de Villepin engagea la responsabilité du gouvernement sur le reste du texte, conformément à l'art. 49 al. 3 de la Constitution, ce qui a été dénoncé comme un "passage en force" par l'opposition.
Contrôle de constitutionnalité
La loi votée a fait l'objet d'une saisine du Conseil constitutionnel par le parti socialiste et le parti radical de gauche. Celle-ci s'appuie sur quatre moyens essentiels :
- le projet, introduit par amendement, n'aurait pas respecté les prescriptions de l'article 39 de la Constitution qui exigent que le Conseil d'État soit consulté avant le dépôt de tout projet de loi ;
- en toute hypothèse le projet excéderait, par son importance, les "limites inhérentes au droit d'amendement" ;
- la loi méconnaîtrait le principe d'égalité en introduisant une discrimination fondée sur l'âge des personnes susceptibles d'être employées sous le régime du CPE ;
- la loi méconnaîtrait les principes fondamentaux du droit des contrats en ne précisant pas les motifs du licenciement.
Le 30 mars, le Conseil constitutionnel a déclaré la "loi pour l'égalité des chances", dont l'article 8 porte création du Contrat première embauche, conforme à la constitution, à l'exception de l'article 21 et 22 [3].
Allocution télévisée du Président Jacques Chirac
Le 31 mars, lors d'une allocution télévisée[4] de 9 minutes, suivie par 20,6 millions de personnes et effectuée en direct du Palais de l'Élysée, le président de la République Jacques Chirac déclare qu'il va promulguer la loi sur l'égalité des chances, dont les dispositions relatives au CPE. Toutefois, il souhaite que le Gouvernement propose rapidement au Parlement une seconde loi modificative ramenant le délai de la période de consolidation de deux ans à un an, ainsi que le droit pour le salarié de connaître les raisons de son licenciement. Le président demande donc que la loi votée et promulguée ne soit pas appliquée puisqu'il "demande au Gouvernement de prendre toutes les dispositions nécessaires pour qu'en pratique, aucun contrat ne puisse être signé sans intégrer pleinement l'ensemble de ces modifications". Ainsi, le ministère de la Cohésion sociale a indiqué qu'il recommanderait par voie écrite aux entreprises de ne pas signer de CPE et qu'il n'y aurait pas de publication d'un arrêté précisant le contrat-type. Il reste toutefois possible d'en écrire un sur papier blanc, mais des recommandations ont été envoyées aux responsables de branches pour que le patronnat n'aille pas dans ce sens. [5].
Discussions entre les organisations syndicales et les parlementaires
Suite à l'allocution télévisée du président Chirac, les organisations syndicales ont commencé des discussions avec les parlementaires sous l'égide du président du parti de la majorité (UMP). Celui-ci est en outre le numéro deux du gouvernement (Nicolas Sarkozy]
Réactions
Cette adoption a été suivie d'un conflit majeur, voire historique, entre les syndicats et le gouvernement, ainsi que de nombreuses manifestations d'étudiants et lycéens, ensuite soutenus par des salariés, des partis politiques, et la plupart des syndicats (voir mouvement anti-CPE).
Le MEDEF a émis des critiques lorsque le CPE était encore à l'état de projet de loi, en soulignant sa préférence pour un contrat de travail unique plus pratique pour les employeurs.
Précédents
En 1994, sous le gouvernement d'Édouard Balladur, un projet de loi, le CIP (Contrat d'insertion professionnelle, ou SMIC Jeune) avait suscité de vives critiques de la part du mouvement étudiant et de la jeunesse, entraînant son retrait final.
En août 2005, le contrat nouvelle embauche (CNE) a été adopté par ordonnance par le gouvernement Villepin. Ce contrat est similaire mais ne s'applique qu'aux PME de moins de vingt salariés. Il est entré en application malgré les critiques de l'opposition qui n'appréciait pas le fait que la mesure ait été passée pendant les grandes vacances, et donc limitait les possibilités de mobilisation. Il a fait l'objet d'un recours devant le Conseil d'État, qui l'a validé. Les manifestations du 4 octobre 2005 avaient, entre autres, comme revendication le retrait du CNE.
Appel des organisations de jeunes
Dans un appel commun, des organisations de jeunes (syndicales de salariés, d'étudiants, politiques, culturelles[6]) ont créé un collectif contre le CPE et ont appelé à la déclinaison locale de ce collectif, ce qui s'est fait dans la plupart des grandes villes françaises. Ces étudiants définissent le CPE comme étant un emploi « précaire ». Derrière le slogan, une forme d'incompréhension totale semble s'être instaurée entre partisans du CPE (pour lesquels il s'agit d'une solution parmi d'autres contre le chômage des jeunes) et les manifestants. Des lycéens ont formé un peu partout en France des collectifs pour demander le retrait du CPE et pour organiser les actions.
Positions politiques
L'ensemble des partis de gauche ont rapidement annoncé qu'ils souhaitaient le retrait immédiat et inconditionnel du CPE et en ont profité pour réclamer à nouveau le retrait du CNE. La perspective de fragiliser un gouvernement au sein duquel se trouvent les deux principaux candidats de la droite, d'une part, et le rassemblement de la gauche autour d'un combat commun, d'autre part, ne sont pas étrangers à l'unanimité de l'opposition contre le CPE. Cependant, certaines voix se sont élevées contre une opposition totale comme Bernard Kouchner qui, sur RTL, a estimé qu'il fallait "donner ses chances de réussite" au CPE.
L'UMP, présidée par Nicolas Sarkozy, soutient logiquement son gouvernement, mais de nombreuses voix s'élèvent pour demander une suspension du CPE permettant au plus vite l'ouverture d'un dialogue avec les organisations de jeunes et les syndicats. Les proches de Dominique de Villepin reprochent au parti de ne pas soutenir suffisamment le Premier Ministre. Des dissensions internes refont surface, avec en trame de fond l'élection présidentielle de 2007. Plusieurs députés UMP, et notamment Hervé de Charette, demandent la suspension du projet CPE face à la réaction qu'il suscite[7]
D'autres partis comme le MPF ou le Front national ont une position mitigée : d'un côté, ils s'opposent à toute forme de blocus (notamment des universités), d'un autre, ils se positionnent pour une évolution du CPE, tout en restant vagues sur les possibilités.[8]
Historique des manifestations
Article détaillé : Chronologie des évènements autour du CPE
Le mouvement de contestation à commencé par des mobilisations d'étudiants dans les grandes villes françaises. Le mardi 7 février 2006, 520 000 personnes (selon la police et 700 000 selon la CGT) manifestent leur opposition au contrat dit de "première embauche". Certaines universités, comme les Universités de Rennes II et Paris III, voient leurs étudiants se mettre en grève.
Un mois plus tard, le mardi 7 mars 2006 des manifestations sont à nouveau organisées et rassemblent, à travers la France près de 400 000 personnes selon la police (plus de 1 000 000 selon la CGT).
Grèves étudiantes
Le mouvement commence à ce moment à prendre de l'ampleur. Les étudiants organisent des Assemblées Générales (AG) dans les amphithéâtres des universités. Dans plusieurs, ils votent la grève, souvent avec piquets de grève. Les conditions des votes, notamment à main levée, sont très critiquées par les opposants aux "blocages".
Le 10 mars 2006, plusieurs dizaines d'universités (quatre-vingts quatre universités au total selon les mouvements étudiants et environ une vingtaine selon le ministère de l'intérieur) étaient perturbées ou bloquées par des étudiants suite à des votes en Assemblées générales dans les amphithéâtres. Dans le courant du week-end, seules certaines d'entre elles sont restées occupées par une poignée d'étudiants (Toulouse-II-Le Mirail, Rennes-II, Montpellier-II et III,Nice-Sophia-Antipolis UFR de Nice et Valbonne et campus de Nice Ville II). Dans la nuit du 10 au 11, le site de la Sorbonne a été évacué par les forces de l'ordre avant la fin de la troisième nuit de son occupation par des étudiants réclamant l'abrogation de la loi. La Sorbonne, la place de la Sorbonne, et des rues adjacentes sont interdites d'accès par les CRS depuis le 11 mars.
Les DOM (notamment la Guadeloupe) se sont également mobilisées contre le CPE.[9].
À la suite des grèves au sein des universités, plusieurs présidents d'université se rangent du côté des manifestants en demandant la suspension ou le retrait du contrat. Ils souhaitent que le dialogue reprenne afin de lever les blocus qui empêchent la tenue des cours.[10] Des personnels universitaires se mettent également en grève.
Contre-manifestations dénonçant le blocage d'établissements publics
Après un premier rassemblement de 100 (police) à 500 (organisateurs) personnes sur la place de l’Hôtel de Ville à Paris dimanche 19 mars 2006, à l'initiative de l'association libérale Liberté Chérie, SOS Education, et des collectifs étudiants Halte au blocage (proche de l'UMP et pro-CPE), SOS facs bloquées, Stop blocages (anti CPE), entre 230 et 1500 personnes ont manifesté le mardi 21 mars place du Panthéon afin d'exprimer leur désapprobation des blocages (qualifiés de "prises d'otage") des établissements publics d'enseignements, arguant qu'ils contreviennent à l’article L.811-1 du Code de l’Éducation. Le dimanche 26 mars, ils étaient 1000 selon la police, 3000 selon les organisateurs, sur la place de l’Hôtel de Ville. Les principales associations ont indiqué dans un communiqué commun que la manifestation serait désormais reconduite chaque dimanche (6000 le 2 avril entre Châtelet et Bastille, selon les organisateurs, 2000 selon la police). La présence de l'UNI, syndicat de droite, ainsi que de nombreux tracts et slogans pro-CPE ont suscité la polémique au sein même de ces manifestations, qui se revendiquent apolitiques et apartisanes.
Poursuite des manifestations
Le mardi 14 mars avec 41 000 manifestants (source police) et le jeudi 16 mars avec 447 500 personnes (selon la police, 500 à 800 000 selon les organisateurs), les manifestations composées principalement d'étudiants et de lycéens se sont poursuivies. Des actions coup de poing ont également été organisées, comme le blocage des trains (Nantes), de rocades ou de voies rapides (Rennes, Nice).
Le vendredi 17 mars, le gouvernement tente de "renouer le dialogue" et souhaite améliorer le CPE par la discussion. Il reçoit les syndicats mais ceux-ci refusent toute négociation tant que le contrat ne sera pas retiré.
Le samedi 18 mars a eut lieu une journée nationale de manifestations avec 530 000 manifestants selon la police (1,5 millions de manifestants selon la CGT) ont défilé dans 160 villes de France. Des heurts avec la police sont notés en fin de cortège. Un syndicaliste de SUD PTT, Cyril Ferez, a été hospitalisé dans un état de coma suite à la manifestation.
Une grève interprofessionnelle à travers la France a eu lieu le mardi 28 mars. Elle a rassemblé 1 055 000 manifestants selon la police (et 2 700 000 à 3 000 000 selon les syndicats).
Des préavis de grève ont été déposés par les syndicats pour la journée du 4 avril appelant à des manifestations interprofessionnelles à travers la France. Bien que le nombre de grévistes ait semblé moins important que lors de la journée précédente, le nombre de manifestants semble avoir été similaire à la journée du 28 mars. 32 villes de france ont connu des débrayages dans les transports publics, 40% des écoles du primaire et 25% du secondaire étaient perturbées. Durant cette journée, il y a eu plus d'un million de manifestants dans les rues selon la police et 3,1 millions selon les syndicats.
Analyse de la situation
Parallèle avec le CNE (Contrat nouvelle embauche)
Selon une étude économétrique publiée par Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo, membres du Conseil d'analyse économique de l'université de Paris I-Sorbonne, le Contrat nouvelle embauche pourrait entraîner la création 70.000 emplois supplémentaires à l'horizon de dix ans tout en augmentant l'instabilité du travail et "une légère détérioration des conditions de vie des demandeurs d'emplois, équivalente à une diminution de 0,47% du revenu."
Parallèle avec d'autres pays
En Suisse
Alors que la protection contre les licenciements est plus faible en Suisse qu'en France, la situation sur le marché de l'emploi à la sortie de la formation y est relativement bonne (d'après Office fédéral de la statistique). Les entreprises ne se servent que peu des possibilités de licenciement offertes. Lorsque quelqu'un est engagé, il est considéré comme un investissement par l'entreprise, qui, si elle le licencie, perdra un "capital" d'expérience proportionné à l'ancienneté du salarié. La capitalisation de l'ancienneté augmente de surcroît avec le niveau d'étude de l'employé. Si une entreprise requiert de la main d'oeuvre à court terme, elle se tournera naturellement vers les sociétés de travail temporaire et les intérimaires. Pour des besoins à moyen ou long terme, la concentration de l'expérience sur une personne unique motivera la création d'un poste à durée indéterminée, et à son maintient dans la mesure du possible. Il est à noter que si la loi permet de licencier plus facilement en Suisse qu'en France par exemple, elle n'en définit pas moins un arsenal de pénalités (délais d'annonce, mois de salaire supplémentaire, indemnisation ou prise en charge de la recherche d'un autre emploi) qui viennent s'ajouter au coût de recherche d'un remplaçant ou d'un autre employé (petites annonces, entretiens, documents administratifs, etc.) Elle empêchent donc la mise en place d'une politique de création-suppression d'emploi directement calquée sur la demande (janvier : beaucoup de commandes --> engagement de deux personnes, août, baisse de la demande --> licenciement de deux personnes).
En Allemagne
La grande coalition CDU et SPD a décidé après négociation de déposer un projet de loi portant de six mois à deux ans la période d'essai pour les contrats à durée indéterminée. Cette période d'essai permet à l'employeur de se dispenser de motif de licenciement. [11] En contrepartie, les modalités de recours aux CDD seraient rendus plus contraignants. Toutefois, le ministre social-démocrate (SPD) du Travail, Franz Müntefering, a très récemment annoncé sa décision de « stopper » la mise en oeuvre de ce projet, auquel les syndicats allemands s'opposent.[12]
Aux États-Unis
L'employeur n'a pas besoin de justifier le licenciement de son salarié, qui peut le contester devant les tribunaux.
En Suède
En Suède, l'employeur n'est tenu de se justifier pour un licenciement que si l'employé le demande.[13]
L'information et l'intox
Les réactions qui ont suivi ce projet de loi ont été très variées et le gouvernement comme les partisans du retrait du contrat ont cherché à informer des conséquences de ce projet de loi, mais aussi à mobiliser le plus grand nombre, quitte à perdre une part d'objectivité. Les moyens utilisés sont divers et ne cherchent pas toujours à informer sur toutes les conséquences, mais plutôt à souligner un point précis afin de convaincre plus facilement.
"Le succès du CNE" ?
Afin de soutenir le CPE, Dominique de Villepin a déclaré à maintes reprises que "le CNE est un succès" puisque 350 000 contrats avaient été signés huit mois après la mise en application du CNE. L'appréciation de l'intérêt de ce contrat nécessite cependant de faire la différence entre ces 350 000 contrats signés et les contrats qui auraient été signés sous une autre forme (CDD ou CDI) afin de connaître le nombre "net" et non "brut" de création d'emplois en CNE. De surcroît, il convient d'attendre la fin de la période d'essai de deux ans (en septembre 2007) pour déterminer combien de CNE auront été rompus avant leur transformation en CDI.
Publicité sur internet
On peut également remarquer l'achat du mot "cpe" dans le programme Google AdWords, afin que Google affiche, quand on tape "cpe", des pages de promotion du CPE sur le site du Premier ministre, de l'UNI et de l'UMP. Des journaux tels que Libération ou Le Nouvel Observateur ont également participé à ces achats. Des sites utilisant les autres sens de cet acronyme qui recouraient à cette méthode ont pour beaucoup dû renoncer pendant un temps à cette pratique, le coût étant devenu trop élevé. Elle est utilisée en parlant d'un risque plus ou moins important de se retrouver dans une situation difficile mais également lorsqu'une personne est déjà dans une situation difficile. Les réduire à une seule et même situation est tentant mais exagéré. Cela cache une partie du volet "social" du CPE (notamment en terme de formation, d'allocations, et de locapass).
Le gouvernement a également lancé des campagnes d'informations publicitaires sur internet au sujet du CPE (notamment sur le site du journal Le Monde). (Elles affirmaient, en citant des organismes bancaires partenaires, que le CPE pourrait tout de même permettre l'accès au crédit.)
( source : Wikipédia )
11:50 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |