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L'infantilisme de l'Homme moderne. (26/01/2016)

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« En toute condition, soyez dans l’action de grâces. C’est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ Jésus » (1 Th 4, 18).

 

Cette exhortation de saint Paul aux Thessaloniciens reprend l’invitation si fréquente à la louange que nous trouvons dans les Psaumes : « Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse en ma bouche » (Ps 34, 2). L’action de grâces n’est pas une forme de prière à pratiquer seulement de temps en temps ; elle doit devenir une attitude de cœur, une disposition de vie, une manière de nous positionner dans l’existence.

 

Je suis très frappé par le fait que, dans l’évolution de notre culture, l’homme occidental a de plus en plus tendance à se positionner dans une attitude de victime. On passe son temps à se plaindre, à exiger, à revendiquer. Comme il n’y a plus de foi et de confiance en Dieu, toute difficulté et toute souffrance est vécue comme une anomalie, voire comme une injustice. On rêve d’une vie de gratifications permanentes, sans souffrances et sans combats. On n’accepte aucune douleur, et chaque fois que l’on est touché par une épreuve, on cherche quelqu’un à accuser, à qui faire porter la responsabilité et à qui faire payer sa souffrance. On l’a bien vu en France. À la moindre inondation ou canicule, c’est une levée d’accusations et de réclamations contre le gouvernement qui n’a pas fait ce qu’il aurait dû faire pour prévenir le fléau. Comme si l’État avait le devoir et la possibilité de garantir à tous les citoyens une existence sans problèmes et devait assurer le bonheur de tous ! Quel infantilisme !

 

Ce type d’attitude est évidemment très destructeur pour la vie sociale. Au lieu de mettre à la base des relations humaines une disposition d’acceptation et de confiance, on instille partout le poison de la méfiance et de la revendication. Pour rester dans le domaine médical, il est bien sûr légitime de protéger les patients et de demander justice à des médecins qui, de manière consciente et grave, ont été négligents, mais exiger d’eux l’infaillibilité relève de l’infantilisme. Ils finiront par ne plus vouloir exercer la médecine, et personne n’y gagnera, surtout pas les malades !

 

La louange et la gratitude sont un grand remède à ce positionnement victimaire et destructeur que je viens de décrire. Elles nous amènent à nous situer face à la vie dans une attitude tout autre : au lieu de réclamer, de nous plaindre, de revendiquer, elles nous conduisent à accueillir avec confiance la vie telle qu’elle se présente, même avec son poids de douleur et de difficultés. Elles nous évitent de nous enfermer dans une attitude accusatrice envers ceux qui nous déçoivent ou nous font souffrir, à chercher en permanence des boucs émissaires sur qui décharger nos ressentiments et nos amertumes. Elle nous fait comprendre qu’il ne s’agit pas d’abord de « changer la vie », selon le slogan illusoire d’un certain parti politique il y a quelques années, mais de changer notre attitude face à la vie. Passer de la peur, de la méfiance, de l’accusation… à l’acceptation et à la confiance. Accueillir avec foi la vie comme un don, même si elle se présente différente de nos attentes. Si nous pratiquons cette confiance, nous ferons bien vite l’expérience qu’en fin de compte, la vie réelle est bien plus belle et riche que la vie dont nous rêvons dans nos attentes irréalistes !

 

Il y a là un principe spirituel fondamental, dont nous trouvons l’expression dans l’évangile. Jésus prononce cette parole mystérieuse : « À celui qui a on donnera, à celui qui n’a pas on enlèvera même ce qu’il a ! » (Lc 19, 26). Le Christ énonce ainsi une des lois les plus importantes qui gouverne l’existence humaine : à celui qui se met dans une attitude de revendication, de mécontentement, se plaint que la vie ne soit pas ce qu’elle devrait être, la vie se révèlera comme décevante. Par contre, celui qui est heureux de ce qu’il a reçu, qui remercie Dieu pour ce qu’est son chemin recevra encore davantage et sera comblé ; celui qui se plaint de ne pas avoir reçu suffisamment et qui s’enferme dans la revendication sera de plus en plus déçu.

 

Si la gratitude devient la disposition la plus fondamentale de notre cœur, nous guérirons de bien des amertumes et des déceptions, et nous serons en fin de compte comblés.

 

Bruno LEROY.

 

10:45 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |