7427 7827

Mon père se meurt et son bonheur intérieur alimente mon cœur. (24/08/2015)

Bruno-et-pépé.jpg

Un soir, vers vingt et une heures trente, le téléphone retentit. Je rentrai d’une réunion en milieu associatif et donc quelques peu fatigué…Devais-je laisser cet appel tardif dont le numéro m’était quasiment inconnu ? Non, je décroche. Ce doit être une personne qui se trompe…

-         Allô ?

-         Bonsoir, je suis le Médecin de votre père. Celui-ci ayant bien voulu me donner votre numéro. Je me permets de vous appeler.

-         Oui, y-a-t-il une raison sérieuse à votre appel car, je présume qu’au regard de l’heure vous n’êtes pas porteur de bonnes nouvelles… ?

-         En effet, j’ai reçu un courrier d’un spécialiste ORL ayant effectué des examens sur l’infection buccale de votre papa. Il est inquiet car il soupçonne un cancer au niveau interne des oreilles et de la bouche. Vous devriez insister pour que votre père fasse un scanner.

-         Bien-sûr, comptez sur moi. Je sais qu’il craint ce genre d’examen qu’il ne connaît pas bien. Mais, je le rassurerai. Mais, vous que pensez vous du diagnostic avancé ?

-         Votre père a perdu plus de dix kilos en un Mois. La situation me parait sérieuse, voire extrêmement grave. Mais, le scanner nous dira tout !

Je reposais le combiné du téléphone et n’en croyais pas mes oreilles. Mon appartement semblait danser au rythme de mon cœur. De plus, le médecin m’avait demandé de prévenir mes frères car, il sentait que la faiblesse physique de mon père était la preuve flagrante d’un adénome de longue date.

Trois jours après, j’étais à l’hôpital avec mon père pour qu’il fasse son scanner. Je ne lui avais parlé que d’une importante infection qu’il faudrait endiguer. Et le scanner ne fait pas souffrir, Papa !

En trois jours de temps, sa bouche était déjà déformée et sur le côté comme une personne étant victime d’un accident vasculaire cérébral.

Après l’examen, nous attendions fébrilement les résultats. Mon père ne disait rien comme muré dans un silence contemplatif.

Puis, le Médecin analysant les résultats me fit signe de venir juste pour une petite explication dit-il à mon père. Ce ne sera pas long. Je remets le Dossier à votre Fils et celui-ci vous informera de son contenu. Mon père acquiesça…

Le Médecin me fit comprendre immédiatement que la vie de mon père serait courte désormais et douloureuse même avec la morphine. Monsieur Leroy, votre Papa est atteint d’un cancer des sinus, puis de la bouche et d’une volumineuse tumeur au cerveau. Ses jours sont comptés.

Plus le Docteur m’évoquait le traitement à suivre moins j’entendais sa voix. J’étais enveloppé d’un nuage perdu dans son bureau et qui venait me rassurer en embrumant mon cerveau pour le protéger de la rude réalité.

Mon père attendait dans la salle et je mentis en lui disant qu’il s’agissait d’une très importante infection. Il me répondit que cela le soulageait de savoir que cette pathologie n’est  pas incurable.

Et je me disais en moi-même, il ne lui reste que quelques semaines, n’ajoutons pas une ombre au tableau.

Papa a toujours eu une peur viscérale des examens médicaux et surtout, des traitements douloureux. Il se mit en colère lorsqu’on lui proposa de faire des rayons et une opération digestive. Il refusa tout avec une énergie qui stupéfia le corps médical. L’oncologue lui fit admettre qu’une série de rayons détruirait son infection faciale. En effet, les tumeurs poussaient tellement sur son visage qu’il ne voyait que d’un œil et sa joue gonflait outrageusement. Il fit dix séries de rayons, son état général ne permettant pas d’en faire davantage.

Il se sentit épuisé durant un mois. Puis, vinrent les effets bénéfiques où il put remanger presque ordinairement et surtout l’absence de toutes souffrances lui fit penser à une guérison en cours.

 

Il reprit ses activités les plus courantes et même se remit à conduire. Ses attitudes nous mettaient à la fois dans un questionnement éthique concernant la conduite et l’angoisse d’un éventuel accident. Cependant, aucune loi n’interdit à un individu souffrant de prendre son véhicule…

 

Le soir, je dirais chaque soir, tous les soirs avant de m’endormir. J’avais rendez-vous avec Dieu afin qu’Il lui envoie son Esprit pour alléger toutes douleurs, toutes peurs, et lui procurer une nuit réparatrice.

Cette prière était comme une longue discussion avec le Christ. Je lui disais de veiller sur lui ainsi que son Ange Gardien. Je ne pouvais rien faire à mon niveau pour apaiser ses appréhensions existentielles et ses craintes de la mort.

Chaque soir, cette prière me donnait une Paix intérieure indicible. Une joie profonde surnageait au dessus de ce lac de désespoir et amoindrissait les rides qui se formaient sur la surface de mon cœur. Le lac était paisible profondément et je m’endormais.

 

Le lendemain, mon père me téléphonait en me disant  qu’il avait passé une merveilleuse nuit. Je prenais de nouveau cette parcelle de bonheur pour alimenter mon âme.

 

Je vous disais que mon père n’avait que quelques semaines à vivre. Actuellement, il est hospitalisé en soins palliatifs. Il est dénutri est déshydraté. La semaine dernière, il sombra dans le coma. A ce jour, il en est sorti et veut rentrer chez lui pour mourir.

 

Lorsque je le vis dans le coma. Mon instinct me murmura que cela était sur la voie du départ. Et comme chaque soir, je priais, priais à n’en plus savoir que dire…

Et mes Amis de Facebook prient aussi à mes côtés. Ils sont plus de six mille !

Alors, quelle puissance dans le cœur et quelle chance de les savoir m’accompagnant.

 

Papa ne devait vivre que deux ou trois semaines. Cela fait déjà trois ans que les médecins scandent leurs chants mortuaires. Et pourtant, celui qui s’occupe de lui actuellement m’a dit que la disparition de son infection pulmonaire qui risquait de le tuer est de l’ordre du miracle.

 

Mon père est un Homme que la vie passionne. Il sait le mal qui le ronge et pourtant, il m’a dit cette phrase magnifique : Je fais entièrement confiance aux puissances de la nature Humaine.

 

Alors, chaque jour annonce peut-être une envolée vers la Lumière. Mais, je fais confiance, comme mon père aux puissances salvatrices de la nature et de la prière.

 

Une joie absolue m’habite même dans les moments les effrayants. Que voulez-vous, je suis amoureux de la Vie et j’ai pleinement confiance en Dieu.

 

Je dis humblement, Papa, voici 3 ans que tu te bats pour vivre, survivre. Je te laisse le choix de ton combat. Je sais que tu t’éteins lentement, sûrement. Et pourtant, mon âme baigne dans une allégresse sans fin et constatant ton amour de la Vie.

Oui, mon père se meurt et son bonheur intérieur alimente mon cœur.

 

Bruno LEROY.

 

Ps : Ce texte fut écrit d'un seul jet. Si vous trouvez des fautes d'orthographe, je vous serais reconnaissant de me le signaler. Merci !

13:12 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (5) |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |