Prière pour faire de sa journée un chant de louange. (09/09/2006)
Le psaume 47 est un chant en l'honneur de Sion, la « cité du grand roi » (Ps 47, 3), alors siège du temple du Seigneur et lieu de sa présence au milieu de l'humanité. La foi chrétienne l'applique désormais à « la Jérusalem d'en-haut », qui est « notre mère » (Ga 4, 26). La tonalité liturgique de cette hymne, l'évocation d'une joyeuse procession (cf. versets 13-14), la vision pacifique de Jérusalem qui reflète le salut divin, font du psaume 47 une prière qui peut ouvrir la journée pour en faire un chant de louange, même si quelques nuages s'accumulent à l'horizon.
Trois acclamations
Pour saisir le sens du psaume, trois acclamations peuvent nous venir en aide, qui sont placées au début, au milieu et à la fin, comme pour nous donner la clef spirituelle de sa composition et nous introduire en son climat intérieur. Voici ces trois invocations : « Il est grand le Seigneur, hautement loué, dans la ville de notre Dieu » (v. 2) ; « Dieu, nous revivons ton amour au milieu de ton temple » (v. 10) ; « Ce Dieu est notre Dieu pour toujours et à jamais, notre guide pour les siècles » (v. 15).
Le triomphe pour Jérusalem
Ces trois acclamations, qui exaltent le Seigneur mais aussi « la cité de notre Dieu » (v. 2), encadrent deux grandes parties du psaume. La première est une joyeuse célébration de la ville sainte, la Sion victorieuse des assauts des ennemis, sereine sous le manteau de la protection divine (cf. v. 3-8). Nous avons comme une litanie de définitions de cette ville : elle est une montagne admirable qui se dresse comme un phare de lumière, une source de joie pour tous les peuples de la terre, l'unique véritable « Olympe » où le ciel et la terre se rencontrent. Elle est - pour employer une expression du prophète Ezéchiel - la ville-Emmanuel, parce que « Dieu est là », présent en elle (cf. Ez 48, 35). Mais autour de Jérusalem se massent les troupes qui vont l'assiéger, comme un symbole du mal qui attente à la splendeur de la cité de Dieu. Le combat a une issue escomptée et presque immédiate.
En effet, en attaquant la cité sainte, les puissants de la terre ont provoqué aussi son Roi, le Seigneur. Le Psalmiste montre combien se dissipe l'orgueil d'une armée puissante, par l'image suggestive des douleurs de l'enfantement : « Et voilà qu'un tremblement les saisit, douleurs de femme qui accouche » (v. 7). L'arrogance se transforme en fragilité et en faiblesse, la puissance en chute et en défaite.
La même idée est exprimée par une autre image : l'armée en marche est comparée à une invincible armada navale sur laquelle s'abat un typhon engendré par un terrible vent d'est (cf. v. 8). Demeure, donc, une certitude indéracinable pour qui se tient à l'ombre de la protection divine : le dernier mot n'est pas confié au mal mais au bien : Dieu triomphe des puissances hostiles, même quand elles semblent grandioses et invincibles.
De génération en génération
Le fidèle, alors, célèbre justement dans le temple son action de grâce au Dieu libérateur. Son hymne est une hymne à l'amour miséricordieux du Seigneur, exprimé par le terme hébreu hésed, typique de la théologie de l'Alliance. Nous sommes ainsi dans la seconde partie du psaume (cf. v. 10-14). Après le grand chant de louange au Dieu fidèle, juste et sauveur (cf. v. 10-12), se déroule une sorte de procession autour du temple et de la cité sainte (cf. v. 13-14). On compte ses tours, signes de la sûre protection de Dieu, on observe ses fortifications, expression de la stabilité donnée à Sion par son Fondateur. Les murs de Jérusalem parlent et ses pierres rappellent les faits qui doivent être transmis « aux générations futures » (v. 14) par le récit qu'en feront les pères à leurs fils (cf. Ps 77, 3-7). Sion est le lieu d'une chaîne ininterrompue d'actions salvatrices du Seigneur, qui sont annoncées dans la catéchèse et célébrées dans la liturgie, pour que demeure chez les croyants l'espérance en l'intervention libératrice de Dieu.
L'antienne qui conclut le psaume est très belle, une des plus hautes définitions du Seigneur en tant que pasteur de son peuple : « Celui qui nous guide » (v. 15). Le Dieu de Sion est le Dieu de l'Exode, de la liberté, de la proximité avec le peuple esclave en Égypte et en pèlerinage dans le désert. Maintenant qu'Israël est établi dans la terre promise, il sait que le Seigneur ne l'abandonne pas : Jérusalem est le signe de sa proximité, et le temple est le lieu de sa présence.
Vers la Jérusalem céleste
En relisant ces expressions, le chrétien s'élève à la contemplation du Christ, le temple nouveau et vivant de Dieu (cf. Jn 2, 21), et il se tourne vers la Jérusalem céleste, qui n'a plus besoin de temple et de lumière extérieure, car « son temple, c'est le Seigneur, le Dieu tout-puissant, et l'Agneau... La gloire de Dieu l'illumine, et sa source de lumière, c'est l'Agneau » (Ap 21, 22-23). Saint Augustin nous invite à une telle relecture « spirituelle », convaincu que dans les Livres de la Bible, « plus rien ne se rapportera exclusivement à la Jérusalem terrestre, si tout ce qui est prédit et accompli à son sujet se rapporte aussi par quelque aspect allégorique à la Jérusalem céleste » ( La Cité de Dieu, XVII, 3, 2). Saint Paulin de Nole lui fait écho lorsque, commentant précisément notre psaume, il exhorte à prier afin que « nous puissions être trouvés comme des pierres vivantes dans les murs de la Jérusalem céleste et libre » ( Lettre 28, 2, à Sévère). Et, contemplant la solidité et la compacité de cette ville, ce même Père de l'Église continue : « En effet, celui qui habite cette ville se révèle comme l'Un en trois Personnes... Le Christ en a constitué non seulement le fondement, mais aussi la tour et la porte... Si donc la maison de notre âme se fonde sur lui et si sur lui s'élève une construction digne d'un si grand fondement, alors la porte d'entrée en sa cité sera pour nous précisément celui qui nous guidera au long des siècles et qui nous établira dans le lieu de son pâturage ».
Audience générale du 17 octobre 2001
la documentation catholique, numéro 2258 du 18/11/2001. Rubrique Actes du Pape Jean-Paul II, paru en page 973
14:56 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |