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Quelle Bonne Nouvelle ! (09/09/2006)

« C’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu », clame le prophète dans la première lecture. Et pas seulement ! « Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient ». L’annonce est radicale. Notre Dieu se présente à nous comme un Dieu vengeur. Il faut reconnaître que ce n’est pas forcément pour nous déplaire. Le Seigneur semble avoir enfin entendu nos cris et vu notre détresse, il a vu l’infamie et les injustices dont nous souffrons. L’ordre des choses va être rétabli, « il vient lui-même et va nous sauver ». Quelle bonne nouvelle.

Mais, dans la vengeance comme dans les autres choses de la vie, le Seigneur notre Dieu a des pensées plus élevées que les nôtres. Il est très important de le comprendre et de l’accueillir comme tel. En effet, nous avons souvent le reflexe de prêter à Dieu notre propre vertu ou l’image de notre qualités morales. Mais Dieu est bien plus grand que ça. Il ne se contente pas des demi-mesures qui font notre fierté : « se venger n’est pas beau ». Non, Dieu est réellement un Dieu vengeur et il a décidé de rendre justice lui-même. Mais ses pensées sont bien au-delà des nôtres. S’il s’agissait seulement de punir les coupables, ce serait encore faire le jeu du mal qui cherche l’avilissement et la destruction de l’homme. Quand il se venge, Dieu détruit le mal.

Ainsi, s’il nous est agréable d’entendre le psaume promettre un tribunal : « Le Seigneur fait justice aux opprimés », il ne faut pas interrompre l’élan de la prophétie d’Isaïe... Voici sa vengeance : « alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds ». Alors nous verrons le monde tel qu’il est, tel que Dieu l’aime. Alors nous verrons les chemins sur lesquels le Seigneur nous conduit selon leur vraie valeur de sainteté et de gloire, quand bien même aujourd’hui ils revêtent encore l’apparence de la médiocrité et portent souvent le poids de la souffrance. Le psaume décrit bien cette merveille : « Le Seigneur ouvre les yeux des aveugles, le Seigneur redresse les accablés, le Seigneur aime les justes ». Même ceux qui ont été humiliés dans leur corps par la maladie ou le handicap, même ceux qui ont souffert dans leur psychisme, même ceux qui n’auront jamais connu le bonheur, seront libérés et partageront la récompense des justes : l’amour du Seigneur. La victoire de notre Dieu est totale.

Les yeux fixés sur cette victoire, nous abordons la deuxième lecture, où saint Jacques implore les chrétiens dans le même registre : « ne mêlez pas des considérations de personnes avec la foi en Jésus-Christ, notre Seigneur de gloire ». Le Seigneur nous a élevés à la hauteur de ses pensées, conformons donc nos actes à ses projets, vivons de sa victoire ! Arrêtons de « juger selon des valeurs fausses » et vivons déjà dans l’unité et la charité de ceux qui partagent les fruits de la résurrection.

Voilà qui nous prépare à accueillir l’évangile de ce jour. Une nouvelle fois, en effet, le Seigneur franchit les frontières que les hommes ont établies. Alors que ses proches amènent à Jésus un infirme, et lui demandent de lui imposer les mains, Jésus n’en fait rien. Il l’emmène à l’écart de la foule pour un tête-à-tête loin des regards indiscrets. Évidemment, la présence des témoins n’est pas nécessaire à la réalisation d’un miracle, mais divers signes montrent qu’il y a plus dans cet isolement temporaire. Cette guérison a un caractère particulier.

En effet, il n’est pas non plus nécessaire que Jésus touche les organes malades pour guérir ; sa parole suffit. Or il les touche, il prend de sa salive et il soupire fortement, comme on le ferait devant un travail difficile, comme on le fait quand on souffre soi-même. Certes, par ces gestes Jésus apparaît comme médecin, en ce sens qu’il travaille comme tous les médecins de l’époque. Mais il est un médecin particulier : il lève les yeux au Ciel, montrant que sa médecine n’est pas humaine. Et il parle en araméen ; l’emploi spontané de sa langue maternelle dit combien Jésus est impliqué personnellement dans cette guérison. Il s’investit tout entier dans un acte qui le mobilise, dans une relation où il se dit en profondeur, sans barrières. L’opération implique sa relation à Dieu et l’engage envers les hommes dans ce qu’il a de plus intime.

Alors, la langue de l’homme fut « déliée », libérée. Entendant bien, il peut maintenant parler « droitement ».

Sans doute pouvons-nous lire dans cette guérison le cœur de ce que Jésus vient nous apporter : l’appel à la vie, le « ouvre-toi » qui donne d’entendre le Seigneur et d’entrer en relation avec lui comme il convient, dans l’amour. Jésus s’implique tout entier car le salut qu’il apporte consiste en cela : nous réconcilier avec le Père et avec nous-mêmes, rétablir les relations rompues et redonner la capacité de les vivre.

Mais les amis du malade n’ont pas perçu cela. Certes, ils ont vu la grandeur de Jésus et se mettent à prêcher. Ce faisant, ils font une belle déclaration de foi, tissée avec les mots du prophète Isaïe. Ils sont pourtant passés à côté de l’essentiel. Ils prétendent que « les sourds entendent et les muets parlent » comme si Jésus avait traité distinctement deux catégories de malades. Il a fait bien plus : il a guérit la surdité qui empêche de parler correctement. Assurément, ces hommes qui ont amené leur ami à Jésus auraient dû s’avancer à leur tour, pour demander à Jésus de prononcer sur eux aussi le « ephphata » qui restaure dans l’intimité de Dieu et dans la relation fraternelle.

Prenons cette mécompréhension à notre compte, et ne la sous-estimons pas : les disciples en effet sont étrangement absents de cet épisode. Il est donc possible de vivre avec Jésus et de rester étranger à la profondeur de son amour. Aussi avançons-nous bien vite vers le Seigneur.

Seigneur Jésus, prononce sur nous le « ephphata ». Touche nos cœurs fermés et malades, commande-leur de vivre de ta vie. Exerce sur nous ta vengeance en détruisant toute compromission avec la surdité de nos cœurs qui nous fait mal parler avec toi et avec nos frères. Ne permets pas que nos journées s’écoulent dans l’indifférence et la méconnaissance des signes de ta présence. Ouvre-nous, Seigneur, aux merveilles de ton amour, et nous serons sauvés.

Frère Dominique

14:50 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |