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LE SABBAT EST-IL FAIT POUR L'HOMME ? (21/01/2008)

« Le sabbat a été fait pour l’homme », pour qu’il puisse s’arracher au moins un jour par semaine, à la fascination du « faire », de l’efficacité, pour retrouver la joie simple de la relation gratuite aux autres, sous le regard du Dieu d’amour. Paradoxalement, c’est en se reposant que l’homme rejoint le comportement de Dieu : « Le septième jour, en effet, Dieu avait achevé l’œuvre qu’il avait faite. Il se reposa, le septième jour de toute l’œuvre qu’il avait faite. Et Dieu bénit le septième jour : il en fit un jour sacré parce que, ce jour-là, il s’était reposé de toute l’œuvre de la création qu’il avait faite » (Gn 2, 2-3). Un jour « sacré » c'est-à-dire un jour consacré à Dieu et au service de la charité ; un jour de réconciliation, de restauration de la communion dans l’amour. Et par le fait même : un jour de partage des biens de la terre, dans la joie et la paix.
La commensalité est par excellence le lieu de la célébration de l’amitié ; c’est pourquoi le repas familial a une place toute particulière au cœur du sabbat. La prière sur les offrandes prononcée par le prêtre au cours de l’Eucharistie, s’inspire de la bénédiction prononcée sur les aliments par le père de la famille juive : « Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers, toi qui nous donne ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes ». Nous rendons grâce à Dieu pour les dons qu’il nous fait à travers la fécondité de la nature et de nos efforts, et ainsi nous réorientons toute notre activité productrice de la semaine vers sa finalité véritable : le service de Dieu et sa louange.
Le sabbat atteint son but lorsqu’il débouche sur la communion de l’homme avec Dieu, qui l’a créé uniquement afin qu’il puisse entrer dans son repos, dans sa paix, sa joie et sa lumière. On comprend la mise au point de Jésus : « le sabbat est fait pour l’homme », pour que l’homme puisse atteindre sa finalité en Dieu. L’énoncé inverse - « l’homme est fait pour le sabbat » - trahit une religiosité formelle qui étouffe l’âme du précepte. Les « pains de l’offrande » n’étaient pas mangés par Dieu, mais par les prêtres qui les avaient offerts. Ce geste symbolique qui consistait à déposer des pains devant Dieu dans le Temple, était particulièrement significatif : l’homme reçoit du Seigneur ce dont il a besoin pour vivre ; les prêtres offrent à Dieu ces pains en signe de reconnaissance, après quoi ce sont eux qui les mangent, en tant que représentants du peuple - destinataire du don de Dieu.
Jésus cependant va plus loin encore lorsqu’il ajoute : « Le Fils de l’Homme est maître du sabbat ». L’Eucharistie révèle pleinement le sens de cette affirmation. Le prêtre offre le pain de l’offrande qui est pris sur les largesses de Dieu ; mais celui-ci ne nous le rend qu’après l’avoir transformé dans le Corps de son Fils : « Tu es bénis, Seigneur, Dieu de l’univers, toi qui nous donne ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes ; nous te le présentons : il deviendra pour nous le Pain de la Vie ». Ce n’est plus simplement du pain que nous partageons dans l’action de grâce, au cours du repas convivial eucharistique dominical. Par notre communion à l’autel, nous devenons le Corps du Christ mort et ressuscité pour nous. Ce repas n’est plus simplement la préfiguration de la commensalité divine comme l’était le sabbat de la première Alliance. Il est actualisation du mystère pascal qui nous introduit réellement au « Festin de noces de l’Agneau », célébrées le premier jour de la semaine qui n’aura pas de fin.
Arrivé à ce point, nous devrions poursuivre notre méditation en relisant l’événement du jeudi saint. Au cours du seder - le repas du grand sabbat pascal - que Jésus célèbre avec ses disciples, nous découvrons que ce n’est pas l’homme qui offre à Dieu l’agneau de la Pâque, mais Dieu qui dans la personne de son Fils, nous offre « l’Agneau qui enlève le péché du monde » (Jn 1, 29) : « Prenez et mangez en tous : ceci est mon Corps, livré pour vous » (cf. 1 Co 11, 24). C’est ultimement dans la célébration de ce sabbat au cours duquel Jésus anticipe sa Passion, que Notre-Seigneur se révèle « Maître du sabbat », celui qui en révèle le sens et qui l’accomplit pour nous. C’est en effet par son sacrifice que nous sommes réconciliés avec Dieu et que nous pouvons entrer dans son repos.

« Seigneur Jésus, chaque fois que nous communions à ton Corps et à ton Sang, tu nous fais entrer dans le mystère de l’accomplissement du sabbat. Lorsque nous te mangeons, nous sommes incorporés en toi, notre Terre promise ; et tout en demeurant dans ce monde et dans ce temps qui passent, nous entrons déjà dans le repos éternel qui est notre patrie. Que cette perspective nourrisse notre espérance et nous donne de discerner les événements de notre vie présente à la lumière de cette Réalité à venir que nous pouvons déjà anticiper dans ce Banquet où toi, le Maître, tu te faits serviteur pour nous nourrir de ta vie. »


Père Joseph-Marie.

17:51 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, spiritualite, action-sociale-chretienne |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |