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Vivre en cohérence avec sa Foi. (03/10/2006)

L’évangéliste avait précisé que « Jésus durcit sa face pour faire route vers Jérusalem » (Lc 9, 51). La remontrance que Notre-Seigneur vient d’adresser aux disciples qui voulaient détruire par le feu le village Samaritain ayant refusé l’hospitalité à leur Maître, prouve que le « durcissement » dont il est question ne concerne pas la relation de Jésus aux hommes, pour le salut desquels il s’apprête précisément à entrer dans sa Passion. Les dialogues avec trois disciples potentiels, rassemblés par Saint Luc en une seule péricope, vont nous permettre de mieux comprendre en quel sens le compagnon de Jésus est appelé à « durcir sa face ».
« Je te suivrai partout où tu iras » : cet homme a perçu ce qui constitue l’essence de l’attitude du disciple : suivre le Maître avec une disponibilité inconditionnelle. Cependant, ce Rabbi n’est pas comme les autres : banni de sa patrie, repoussé par les Samaritains, soupçonné par ses coreligionnaires, il « passe au milieu de ses détracteurs et va son chemin » (cf. Lc 4, 30), qui le conduira bientôt au Golgotha. Devenir disciple d’un tel Maître mérite réflexion : on ne s’engage pas à la légère à la suite d’un Rabbi qui s’est mis tous les responsables religieux à dos. Même les renards ou les oiseaux, qui comptent parmi les animaux les plus prudents, se réservent un lieu de repli où ils pourront se mettre à l’abri. Tel n’est pas le cas de Jésus « qui n’a pas d’endroit où reposer la tête » - entendons : qui ne dispose à proprement parler d’aucun lieu de refuge, si ce n’est le Cœur du Père qu’il rejoint dans la prière. Tout comme son Maître, le disciple n’appartient plus à ce monde (cf. Jn 17, 14), car sa patrie n’est pas sur terre mais au ciel. Aussi demeure-t-il en errance tant qu’il n’a pas rejoint sa demeure d’éternité. Avons-nous accepté cette pauvreté radicale ? Sommes-nous disposés à adopter ce statut de pèlerin permanent, consentant par avance à tous les risques d’exclusion au nom de l’Evangile que comporte cet état ?
L’inconnu dont l’intervention occupe la première partie de notre péricope, avait pris l’initiative de la demande. C’est bien ainsi que les choses se passaient dans la tradition juive, mais la pratique de Jésus est tout autre ; contrairement aux Rabbis de l’époque, c’est lui qui choisit ceux qu’il appelle à le suivre : « Il appela ceux qu’il voulait » (Mc 3, 14).
Le second personnage - que cette fois Jésus prend l’initiative d’appeler à sa suite - demande un délai pour enterrer son père. En Israël, l’obligation de rendre les honneurs d’une sépulture à ses parents, prime sur toutes les autres obligations légales ; la requête semble donc tout à fait justifiée. Pourtant, l’appel ne souffre aucun délai : « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, va annoncer le règne de Dieu ». La rupture entre le monde ancien où règne la mort, et le Royaume de la vie que Jésus vient inaugurer de la part de Dieu, est totale. Le disciple doit faire un choix radical, manifestant ainsi qu’il est lui-même né à la vie nouvelle, par la foi en celui qui par sa mort nous délivre de la mort, et par sa résurrection, nous ouvre à la vie divine. S’il est vrai que « celui qui croit en Jésus, même s’il meurt, vivra ; et que tout homme qui vit et qui croit en lui ne mourra jamais » (Jn 11, 26), il est clair que l’unique urgence est « d’annoncer le règne de Dieu » à ceux qui sont confrontés au drame de la mort physique, comme à ceux qui sont dans les filets de la mort spirituelle, c'est-à-dire dans le péché.
Il est difficile de savoir si le troisième personnage prend l’initiative de présenter sa candidature - comme le premier - ou s’il répond à un appel de Jésus que l’évangéliste n’a pas mentionné. Quoi qu’il en soit, il reconnait Jésus comme « Seigneur » et se déclare prêt à le suivre, sous-entendu inconditionnellement. Il demande simplement, comme Elisée à Elie, de pouvoir « faire ses adieux aux gens de sa maison » (cf. 1 R 19, 20s). La réponse de Jésus dépasse l’exigence d’Elie, qui avait attendu le retour d’Elisée. La mission du Fils de l’homme ne souffre d’aucun préalable ; elle n’est conditionnée par rien : autant dire qu’elle est une priorité absolue, qui l’emporte même sur les règles élémentaires de convivialité humaine. Une telle radicalité dans le détachement, ne se justifie que par l’urgence d’annoncer le Royaume qui vient ; bien plus : qui est déjà là dans la personne de Jésus. Lorsque l’espérance nous ouvre les yeux sur le monde nouveau qui surgit là où est semé l’Evangile, comment ne pas garder nos regards fixés sur l’avenir que Dieu ouvre devant nous ? « Vous êtes ressuscités avec le Christ. Recherchez donc les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Tendez vers les réalités d’en haut, et non pas vers celles de la terre. En effet, vous êtes morts avec le Christ, et votre vie reste cachée avec lui en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui en pleine gloire » (Col 3, 1-4).

« Seigneur, à la lecture de ta Parole, je me rends compte combien je suis tiède, et comme je suis loin de répondre aux exigences que tu poses à tes disciples ! Ouvre mes yeux sur la radicale nouveauté introduite dans le monde par ta venue, et fais moi réévaluer mon existence quotidienne à la lumière de ta présence, afin que je puisse vivre en cohérence avec la foi que je professe. »


Père Joseph-Marie

19:23 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, action-sociale-chretienne |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |