7427 7827

L'ABBÉ PIERRE OU LA MORT D'UN PROPHÈTE. (22/01/2007)

medium_abbepierre.jpg

Toute sa vie fut une succession de combats contre la misère et surtout, contre ce qu'il appelait la maladie de l'indifférence. Il demeurera d'actualité tant que cette terrible pathologie sociale ne sera pas endiguée spontanément ou consciemment.

Il n'aura cessé jusqu'à son dernier souffle et depuis l'appel de l'hiver 1954 de provoquer de nouvelles insurrections de la bonté.

L'Abbé Pierre était un homme habité par Dieu. A force d'adoration et d'intenses prières, il en devint son prophète.

Un prophète n'est pas une personne qui prédit l'avenir, une sorte de voyant concupiscent ; c'est un Témoin du Christ qui nous met en garde contre les injustices que génèrent nos sociétés.

Il ne parlait jamais en son nom. Il se battait pour que les opprimés recouvrent leur Dignité. Il parlait toujours pour les autres et ne vivait que pour eux. L'État le décora à plusieurs reprises mais, de ces médailles il n'en avait cure. Il était intègre au point de ne pas imaginer une seule seconde qu'un chrétien menant un combat évangélique puisse le faire en espérant des décorations.

L'Abbé Pierre avait une intelligence rare et curieuse. Son esprit s'intéressait à toutes les dimensions sociétales de notre Monde.

Son coeur prophétique n'acceptait jamais les évidences toutes faites. Il était présent dans les révoltes de chacun. Dans les miennes, notamment. Sans chercher à m'identifier au personnage qu'il était, ce qui serait présomptueux ; il donnait une raison à mes cris contre les Injustices. Et bien d'autres travailleurs Sociaux ou d'individus s'occupant des plus meurtris trouvaient dans ses écrits des sources fraîches et ardentes pour continuer les combats.

Il était la voix des Hommes sans voix. Nos consciences s'imprégnaient de ses sursauts d'indignations.

C'est en rencontrant, Georges, un vagabond qui voulait se suicider que son aventure commença. Il lui répondit : " Puisque tu n'as plus rien à perdre, aide-moi avant d'en finir ". Georges aida durant plusieurs mois l'Abbé et retrouva goût à la vie progressivement.

Sa théologie était celle qu'il notait dans ses petits carnets, le soir. Elle transpirait d'une réflexion de terrain et sur les institutions qui broient l'Humain. Ses interventions télévisuelles ou radiophoniques étaient toujours des chemins d'Espérance que nous empruntions sans même parfois le savoir.

Il me souvient d'un texte où il évoquait l'impossibilité d'un Amour sans juste colère. Je vous la partage afin de rendre hommage à cet Homme de Dieu qui a rejoint l'éternelle Lumière :

" Ce qui nous manque ce sont des hommes capables de ne plus pouvoir supporter de s'endormir tranquilles chaque soir, dans une maison ordinaire ou luxueuse, à côté de leurs petits enfants qui ne manquent de rien ; ce dont le monde manque, ce dont il risque de périr, c'est d'avoir des hommes qui ne sont pas méchants et qui sont capables de s'endormir sans angoisse, heureux, croyant avoir une sécurité, pendant que les deux-tiers de l'humanité sont dans le désespoir. Ce dont le monde est menacé de périr, c'est de ne pas avoir le sens du délit du gaspillage qui devient le délit de provocation lorsqu'il atteint un certain degré et lorsque la rapidité des communications, la connaissance du contraste devient immédiatement possible pour ceux qui sont le plus dans la douleur.

Quel amour serait amour s'il était sans colère quand l'aimé est maltraité, bafoué, détruit ? Une mère qui serait sans colère, voyant battre son petit enfant, serait-elle aimante ?

Si nous sommes sans colère quand nous voyons les autres bafoués, exploités, humiliés, il est clair que nous ne les aimons pas. La colère est révélatrice de ce qu'est notre véritable amour.

Tant que nous ne serons pas capables de briser cette espèce d'hésitation veule que l'on nous a inculquée trop souvent, afin qu'il soit plus facile de nous faire tenir tranquilles, tant que nous ne serons pas capables de devenir des révoltés devant l'injustice, et la nôtre d'abord, non par la haine, mais par la passion et par l'amour, nous ne serons pas des civilisés ! ".

Un prophète du Christ s'est éteint ce matin pour mieux le rejoindre. Quels sont les personnes et les Jeunes notamment qui reprendront le flambeau. La prière est certes essentielle dans nos existences chrétiennes mais, s'en contenter sans agir c'est déjà capituler.

Nous devons nous sentir responsables du devenir des autres et de notre planète. L'Abbé Pierre attend que nous nous levions sans relâche pour suivre ses pas qui ne sont autres que ceux de Dieu.

Avec nos charismes différents, nous savons bien que le Christ a besoin de nos mains, de nos pieds, de nos yeux, de notre voix pour rendre le monde plus respirable. Ensuite, nous pouvons le prier pour Lui exprimer du tréfonds de notre être tout notre Amour.

Sinon, cette absence de préoccupations des injustices sociales est la preuve que nous n'aimons pas nos contemporains qui se trouvent dans le même navire que nous et encore moins Dieu qui aura cessé d'écouter nos hypocrisies.

A l'aurore des élections présidentielles, notre souci prioritaire sera de mettre aux fonctions suprêmes l'individu dont la vision sera celle de rendre les pauvres, acteurs de leur destin.

A nous de vivre au quotidien les combats déjà entamés par l'Abbé Pierre afin que notre monde saigne moins.

L'Abbé avait demandé que l'on inscrive sur sa tombe cet épitaphe : " Il a essayé d'aimer ".

A notre tour, essayons d'aimer sans mesure et de remettre au goût du jour les colères de l'Amour contre l'intolérable, comme Henry Grouès, avait su le faire sans baisser les bras sur cette terre.

Nous devons continuer l'histoire de l'Église par-delà les positions partisanes stériles qui empêchent de rencontrer Dieu dans la splendeur de Sa Divinité. Demandons à l'Esprit-Saint d'orienter notre présent et notre avenir vers de justes combats. Il Le fera car, en Lui gémissent tous les cris de notre Humanité. Vivons dans la contemplation où l'action puisera sa Force pour un monde où les larmes perlantes des injustices ne sera plus que mauvais souvenir.

C'est l'Utopie de l'Évangile qui nous met en marche vers une topie possible où l'Amour sera Loi du coeur.

Puissions-nous être inspirés par ceux qui nous ont précédés dans cette osmose personnelle avec Dieu Amour.

Le reste, Il nous le soufflera comme une brise légère, comme un appel vers davantage de justice selon Ses desseins.

N'oublions jamais que nous ne serons rien tant que nous ne laissons pas exister les autres.

Nos armes seront celles de l'Amour invincible et non de la Haine qui exclut. Nous irons les mains nues dire nos vérités habitées à tous les Hommes qui souffrent de cette terrifiante maladie de l'indifférence.

A...Dieu Cher Abbé Pierre, prenez vos Grandes Vacances tranquillement, d'autres viendront poursuivre les combats à mener pour que notre Humanité avance vers davantage de spiritualité incarnée. Et qui sait, des prophètes fleuriront au milieu des détritus. Dieu envoie toujours des provocateurs lorsque nos sociétés sont à l'agonie.

L'Espérance est une sève insurrectionnelle donnée par Dieu pour ne point accepter le désordre établi.

Nourrissons nos vies de la sève de Jésus-Christ et nous serons proches des prophètes qui imbibent nos âmes pour nous envoyer vers des sentiers jamais explorés. Accueillons la confiance, comme l'Abbé Pierre le faisait et nous serons Témoins du message évangélique vécu au quotidien. Témoins gênants certes, pour certaines institutions sclérosées. Mais, nous aurons la grâce de vivre une spiritualité mature qui se moque des conventions. Nous vivrons main dans la main avec le Christ pour résister aux puissances de la médiocrité.

Jeunes, levez-vous, l'Abbé Pierre est mort... mais sa Lumière vous appelle à un destin moins égoïste, tourné toujours vers les autres et les plus paumés de préférence.

Jeunes, levez-vous et reprenez le combat pour que nos sociétés retrouvent un visage humain, celui que désirait voir l'Abbé.

Décryptez les signes que Dieu nous envoie en le tirant de ce monde pour laisser place à vos réflexions selon ses écrits et à vos actions selon vos prières et contemplations. En vous, j'espère...!

Pour vous, je souhaite que vous deveniez également des rebelles de Dieu Amour. La fonction prophétique a disparue de nos sociétés surabondantes redonnons lui ses lettres de noblesse.

Bruno LEROY.

13:53 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, action-sociale-chretienne, spiritualite, social, poesie |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |