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17/05/2006

Spiritualité de la mission.


Père Alberto RADAELLI,
Religieux Camillien
Traduction : Père Bernard Grasser


Néstor Jaén, dans son livre « Vers une spiritualité de la libération » définit l’expérience comme un « contact vital avec une réalité qui nous touche, qui laisse en nous des traces et qui nous transforme ». Ce qui caractérise alors une expérience, c’est le fait que c’est quelque chose qui nous touche profondément et qui nous transforme.
«  Quand l’expérience atteint profondément quelqu’un, alors son esprit et son cœur sont transformés, et il commence à regarder les choses différemment : une représentation nouvelle de Dieu, une lecture nouvelle de la Bible, une dimension nouvelle de la prière, un engagement différent dans la pastorale, et un éclairage nouveau dans le vécu des joies et des souffrances. L’expérience profonde donne lieu à une nouvelle spiritualité ». La Famille Camillienne en réalisant avec l’Eglise l’exode du « centre » vers la « périphérie » se plonge dans une réalité qui la touche profondément. Elle perçoit non seulement la situation dramatique des pauvres et des malades, mais un tel impact atteint son esprit, son cœur, ses propres sentiments, lui change le regard. C’est dans ce contexte que naît une nouvelle spiritualité, une spiritualité issue de la pratique, qui est le fruit d’une action pastorale déterminée et en relation étroite avec la vie.
Une spiritualité, en résumé, qui naît d’une vie apostolique, basée sur le malade.
Alors, on peut comprendre que la spiritualité ne signifie pas uniquement vie intérieure, qu’elle ne se réduit pas seulement aux moments de prière et de liturgie. Dans l’Ecriture, la spiritualité comprend toute la vie (intérieure et corporelle, personnelle et communautaire, religieuse et politique) animée par l’Esprit et, concrètement pas l’Esprit de Jésus. Elle ne se limite pas à un instant, elle est radicale, totale, entière.

Il est évident que si on définit la spiritualité de la Famille Camillienne comme une forme particulière pour suivre Jésus-Christ, par les engagements du baptême (Cf. St, 1) la rencontre avec Lui en est la condition requise et fondamentale. Suivre le Christ récapitule tout le cheminement de l’homme et sa recherche incessante du Christ. La première rencontre avec Jésus au commencement de la prédication de la Bonne Nouvelle débouche sur un appel à le suivre. (Mc 1, 16-20). Avant de l’appeler, Jésus voit la personne autrement qu’avec un simple regard : il la regarde au fond du cœur et c’est là qu’il fait résonner son invitation. C’est un regard qui appelle. La vocation est un don qui naît de la rencontre personnelle avec Jésus-Christ et ce don nous devons l’offrir aux pauvres et aux personnes les plus fragiles.
L’appel à entrer dans la Famille Camillienne réclame une décision basée sur la confiance et l’abandon car il projette vers le futur : « être avec Jésus », être envoyés pour évangéliser (Mc 3, 13-14).
Mais une telle rencontre ne s’approfondit pas sans un abandon et un don de soi envers les pauvres, parce que ce n’est qu’ainsi que l’on perçoit le nouveau « trésor » que la suite du Christ implique.

La « rencontre » suppose des personnes qui vont s’ouvrir à une relation en profondeur. Un tel amour embrasse toute la personne, son esprit et son corps, homme ou femme, dans son « moi » personnel et unique. Jésus, qui en se donnant éternellement au Père, se « donne » à Lui-même dans le mystère de la Rédemption, a appelé l’homme, afin que celui-ci, à son tour, se livre entièrement à un service particulier, à l’œuvre de la Rédemption, à travers son appartenance à un mouvement de vie, reconnu et approuvé par l’Eglise.
Jésus invite son interlocuteur à accepter un programme centré sur la valeur de la personne humaine : sur l’être de la personne, à travers toute la transcendance qui le caractérise. L’essence de la vocation camillienne est la rencontre avec le malade, appauvri dans sa santé. Le riche n’est pas celui qui possède mais celui qui donne, celui qui est capable de donner.
La rencontre avec Jésus est toujours le centre de la vie et de la mission. L’Evangile est vie, et le laïc camillien porte dans son cœur le « sens de la charité qui est la vie même de Dieu » (Jean-Paul II).
Il y a une « condition profonde pour suivre le Christ » c’est d’avoir compris sa prédilection pour les malades.
Accompagner les plus vulnérables exige un double processus, donner et recevoir. Le membre laïc de la Famille Camillienne donne aux malades le témoignage d’un Dieu qui les aime. Peut-être ne pourra t-il donner que ce témoignage…, et combien de fois ne donne t-on pas ce témoignage parce que l’on veut donner des « choses » aux malades… Ce qui est fondamental c’est de leur dire que Dieu les aime tellement que nous-mêmes, il nous a entraînés pour venir jusqu’à eux, parce que leur vie, aussi pauvre et vulnérable soit-elle est, pour Dieu digne et précieuse.
Ce don de soi naît de la gratuité. Le malade nous donne beaucoup, il nous apprend à donner une signification à la souffrance. La simplicité avec laquelle il vit l’Evangile nous fait pressentir que sa force pour résister à tant de douleur provient de Jésus. Quand Dieu est présent, les choses, même petites et rares, sont abondantes et suffisantes pour être toujours partagées. Quand Dieu est absent, les choses, même abondantes, sont rares et alors l’appétit de celui qui dépouille continuellement les autres pour lui-même n’est jamais satisfait.
L’Eglise est une communauté de personnes qui suivent Jésus. Marcher à sa suite revêt une empreinte fortement communautaire. C’est dans la communauté ecclésiale que l’on reçoit l’appel à suivre Jésus. Celui-ci, présent au milieu des croyants, répète ce geste de con-voquer et communique à ceux qui le suivent un charisme spécial pour le service de la communauté. La communion au Christ et la vocation à former la communauté ecclésiale créent des liens fraternels entre ceux qui le suivent. La communion de cœurs et le partage de ce service apparaissent comme l’idéal du camillien.

La Famille Camillienne jaillit de la « fascination » - amour enthousiaste et admiratif – que la vie de Jésus exerça sur saint Camille de Lellis pour accomplit les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles envers les malades. Sans l’enthousiasme mystérieux et admiratif que crée la rencontre avec Jésus traversant une vie, sans cette expérience séductrice, les gestes de Camille n’auraient aucune explication. La Charité s’est transformée pour lui en une attirance irrésistible, profonde et radicale, et il en fit une forme de vie. Cette charité est un don et une responsabilité.
La charité est la base, l’âme et la caractéristique de l’apostolat camillien. La pratique de Jésus révèle que le critère de l’action en faveur de l’homme en est la nécessité concrète, elle place l’homme au centre des ses préoccupations et de ses intérêts. Camille fait ouvrir les yeux sur la souffrance humaine.
Quand un groupe se met en face de la réalité de la souffrance, il s’aperçoit qu’il est débordé et dépassé par les besoins, la violence blesse ; le sang éclabousse et la misère étourdit. La faim, la drogue, le Sida, les catastrophes, les malades en phase terminale… arrivent à chaque instant, nous entourent et nous enserrent, parfois nous écrasent. Comment trouver une solution ? Que faire et jusqu’où ? Parmi les missions confiées à la Famille Camillienne, il y a celle d’éveiller et de canaliser les réservoirs d’amour de l’humanité, mais c’est elle qui trouvera la voie qu’elle aura choisie pour la pratique de la charité. Choix qui devra être évangélique et authentique.

Il y a des questions qui attendent une réponse :
La charité est-elle l’expérience sur laquelle est fondée notre désir de suivre le Christ comme cela a été pour saint Camille ?
Comment incarner le figure du Bon Samaritain dans notre charité pastorale ?
Comment rendre actuel et mettre en pratique l’amour à travers notre histoire, regardée avec les yeux de Dieu ?
Les nouveaux défis que l’amour interpelle et les nouveaux chemins qui s’ouvrent, nous permettront de donner un futur à l’amour chrétien d’une manière créative. Nous avons de nouveaux champs de présence. Nous avons besoin de créativité et de générosité. La « charité est ingénieuse » disait Paul VI. L’Esprit est suffisamment artiste pour ne pas se répéter. Elle suscite des réponses nouvelles pour de nouveaux défis.



Père Alberto Redaelli

09:16 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

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