… Nous savons que la parabole du semeur parle des manières d’écouter la Parole de Dieu.
Jésus en fournit la clé à ses disciples : les semences sont la Parole (Marc 4, 1-20) Les trois terrains infertiles figurent les mauvais auditeurs : ceux à qui le diable ôte la parole du cœur, ceux qui manquent de profondeur et ceux chez qui la parole est étouffée par les soucis du monde et la quête des richesses ; la terre fertile se sont les auditeurs qui accueillent bien la Parole et lui font porter du fruit.
Sans doute cela est-il vrai puisque c’est dans l’Evangile. Mais cela paraît bien mécanique et moralisateur pour une parole de Jésus. Maintenant qu’elle est expliquée, à quoi rime encore l’interpellation qui la termine : Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende !
Peut-être, sous cette pertinente leçon d’écoute, peut-on discerner un sens profond, qui la fonde. Car un élément important a été négligé dans cette minutieuse explication : le personnage du semeur et son étrange geste. Pourtant, en racontant la parabole, Jésus insiste : le semeur est sorti pour semer et alors qu’il semait…
C’est un étrange semeur, bien dans le style de ces insolentes paraboles où Jésus parle de Dieu à travers l’image de personnages incongrus, privés de sens commun : un berger qui abandonne cent brebis pour une qui s’est perdue, un père qui fait la fête à son fils débauché, un maître qui paie le même salaire à ceux qui n’ont presque rien fait, qu’à ceux qui ont porté le poids du jour, un autre encore qui s’enchante des magouilles de son intendant délicat…
Le semeur de la parabole est bien de la même famille un peu folle, paradoxale. Dieu n’a pas le sens commun.
Il est un semeur à la volée, éparpillant les grains partout, sans discernement, sur les chemins, dans les rocailles et les broussailles comme sur la terre fertile. Toute terre lui est bonne, la semence dût-elle être picorée, étouffée, desséchée. Mais aux trois obstacles répond, dans un crescendo à trois temps, une surabondante moisson, trente, soixante, cent pour un. A semeur fou, large moisson.
Tel est le Dieu de Jésus qui ensemence le monde des humains follement, largement, qui partout fait souffler l’Esprit qu’il donne aux hommes en Jésus Christ. Il n’y a pas de terrain qui lui échappe, aucun n’est indigne de lui.
Nous ne sommes pas juges des semailles de Dieu dans le monde, et ce n’est qu’à la moisson qu’apparaîtront les terrains fertiles. Nous sommes, nous, entre semailles et moissons, dans le temps des germinations et des aventures de la semence. Nous sommes dans le temps des hommes.
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