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04/09/2006

Une Parole d'autorité qui Autorise.

Jésus est à Capharnaüm, ville cosmopolite de la Galilée des nations. Il enseigne probablement dans la synagogue, lieu de rassemblement des juifs pieux. Ici comme à Nazareth, son interprétation de la Thora surprend « parce que sa parole est pleine d’autorité ». Le terme « exousia » que nous traduisons par « autorité », implique que celui qui l’exerce est mandaté par Dieu. La conscience de sa mission unique donne à Jésus une totale assurance et une parfaite liberté. Il n’a que faire de répéter les commentaires des rabbis réputés : il parle en tant que Fils, en tant que Verbe incarné, qui récapitule et accomplit en sa Personne toutes les paroles authentiques que l’Esprit a inspirées aux prophètes pour préparer sa venue.
Même si l’enseignement de Jésus se situe en continuité avec les écrits et la tradition de la première Alliance qu’il porte à leur achèvement, la nouveauté et l’originalité de sa prédication sont telles, qu’elles ne pouvaient pas manquer de susciter des réactions. Non seulement parmi les responsables religieux qui s’inquiètent de l’orthodoxie de ce rabbi hors norme, mais aussi dans le camp du Prince de ce monde. Jusqu’à la venue de Jésus, le démon ne se sentait pas directement menacé par les discours prophétiques ; par contre le ton change avec ce rabbi de Nazareth. Aussi l’interpelle-t-il vivement par la voix d’un homme « possédé par un esprit démoniaque ». Fidèle à sa stratégie préférée, le Prince de ce monde demeure ambigu aussi bien dans la partie interrogative que dans la partie affirmative de son intervention, cherchant avant tout à jeter le trouble dans le cœur de l’assistance.
« Que nous veux-tu ? Où veux-tu nous entraîner avec tes beaux discours ? Cherches-tu à nous égarer hors du chemin que nous ont tracé nos pères dans la foi ? » Voilà de quoi semer le doute dans l’assemblée qui avait été « frappée » par l’enseignement de Notre-Seigneur.
« Je sais fort bien qui tu es : le Saint, le Saint de Dieu » : l’insistance sur le savoir semble insinuer que Jésus cacherait sa véritable identité. Quant à l’expression « le Saint de Dieu », elle a dû faire l’effet d’une bombe, jetant un grand trouble parmi les témoins. Le démon ne lésine pas sur les moyens pour discréditer Jésus aux yeux des juifs pieux et le faire soupçonner de blasphème, voire de folie. Cherche-t-il par la même occasion à faire tomber dans l’orgueil ce rabbi dont la parole pleine d’autorité le dérange ? Ce n’est pas impossible, car même si les titres qu’il décline sont véridiques, le démon ignorait la véritable identité de Jésus.
Peut-être aussi l’expression utilisée par l’ennemi est-elle une formule de défi lancée dans le contexte d’un combat singulier, tel qu’il se déroulait dans le cadre des exorcismes de l’époque. Chacun des antagonistes cherchait à prononcer le nom et à dénoncer les pouvoirs occultes de l’adversaire, afin de prendre autorité sur lui. Jésus ne rentre pas dans ce genre de stratégie ; il n’a pas besoin de dévoiler l’identité du démon qui l’agresse, pour le maîtriser. Il se contente de « l’interpeller vivement », lui impose le silence, et le somme de quitter le possédé, par la seule « exousia » de sa parole. Le résultat ne se fait pas attendre : le démon est obligé de lâcher sa victime et disparaît sans un mot.
L’effroi fait suite à la stupeur parmi les témoins, qui se posent la question de l’origine de « cette parole » qui « commande avec autorité et puissance aux esprits mauvais » ? Cette interrogation traverse l’Evangile de part en part, et rejoint tous ceux qui se risquent à s’exposer au « Dabar » de Dieu, à sa « Parole-événement ». Aujourd’hui comme hier, l’enseignement de Jésus nous bouscule dans nos « habitudes religieuses » et oblige nos démons intérieurs à trahir leur présence. « Que nous veux-tu, Jésus ? Ne vois-tu pas que la culture occidentale a rejeté ton Evangile ? Sans doute es-tu le Saint de Dieu ; mais nous ne sommes que de pauvres hommes comme tous les autres, et nous devons adhérer aux orientations de notre temps sous peine d’être exclus de notre groupe social. Ne viens pas nous demander l’impossible ! »
Ne reconnaissant pas celui qui vient nous visiter, nous demeurons prisonniers de nos peurs, de nos impuissances et des filets du Malin, alors que le Tout-Puissant vient personnellement à nous en son Fils unique, pour nous offrir la délivrance et nous recréer à son image. Si nous pouvions croire vraiment en la présence réelle et agissante de Notre-Seigneur dans sa Parole et ses sacrements, nul doute que notre vie serait radicalement transformée. Nous serions animés non plus par l’esprit du monde, mais par « celui qui vient de Dieu ; ainsi nous prendrions conscience des dons que Dieu nous a faits » (1ère lect.), et nous pourrions le servir dans la paix, la joie et la liberté des fils - que nous sommes.

« Prends patience avec nous Seigneur, Père très saint, Dieu de "tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour" (Ps 144). Renouvelle-nous dans l’Esprit Saint, car "personne ne connaît ce qu’il y a en Dieu sinon l’Esprit de Dieu" (1ère lect.). Lui seul peut nous donner d’accueillir pleinement la Seigneurie de Jésus, lui seul peut nous faire "connaître la pensée du Christ" (Ibid.) et nous donner la force d’y conformer notre vie. Nous pourrons alors te rendre grâce et te bénir, annonçant aux hommes "la gloire et l’éclat de ton règne" (Ps 144), que la Résurrection de ton Fils a inauguré en ce monde ».


Père Joseph-Marie

19:23 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

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