21/02/2009
"La crise nous lance un message d'alerte"
Pour Bertrand Vergely, philosophe, la crise nous fait quitter un état de mensonge pour revenir à la réalité
Le mot crise trouve sa racine dans la notion de séparation, de discernement. Dès lors que nous pensons le monde, que nous voulons agir sur lui, nous recherchons cette séparation créatrice qui nous libère de la confusion. Considérée ainsi, la crise est un concept positif, dynamique. Je dirais qu'aujourd'hui nous ne sommes plus dans la confusion mais dans un retour au réel que l'on appelle improprement crise. L'euphorie boursière, la spéculation, la hausse vertigineuse de l'immobilier... La bulle financière gonflait et gonflait encore, sans aucune relation avec le réel. Il semble que, depuis quelques mois, on quitte cet état de mensonge pour revenir à la réalité. Si bien que nous sommes davantage en sortie de crise qu'en état de crise !
Bien évidemment, cette sortie se fait au prix d'une grande souffrance qui affecte des personnes qui n'ont rien demandé. Les salariés du secteur automobile, par exemple, payent aujourd'hui la politique de fabrication outrancière de modèles inadaptés comme les 4 × 4 qui nuisent aussi bien à l'environnement qu'à la fluidité de la circulation urbaine. Le constat est lourd mais les remèdes existent et sont à portée de main si nous savons, de manière collective, retrouver des valeurs simples, partagées par beaucoup mais si faciles à mettre de côté. Il s'agit tout simplement, comme le message chrétien nous y invite, à chercher cet état d'équilibre qui respecte toutes les dimensions de l'homme : son rapport à la nature, l'épanouissement de sa personne et son appétit de transcendance.Cette révolution des consciences n'est pas une affaire individuelle mais bien une aventure globale, à mener dans un même élan. La crise nous lance un message d'alerte, nous enjoint à recouvrer ensemble la raison avant la catastrophe. Je crois que tout le monde est persuadé qu'un système financier où un gamin de 30 ans, employé dans une grande banque, peut perdre six milliards sans que personne autour de lui ne contrôle quoi que ce soit, est impossible à maintenir comme tel. Hegel appelait "l'homme immédiat" cette folie du tout, tout de suite, sans passer par la réflexion et l'échange avec l'autre. Elle met en lumière, par contraste, les vertus de l'Église, comprise comme une construction commune qui promeut l'homme au milieu de ses frères. C'est à plusieurs qu'on invente, qu'on crée, qu'on rêve...
Je ne demande certes pas que l'on supprime la Bourse ou qu'on ferme les marchés, mais que l'on ait le courage de discerner les priorités et, surtout, que l'on ne spécule plus sur la pauvreté des ménages surendettés. Le message tient en deux propositions. D'une part, sortir de la peur et de la paralysie qu'elle engendre ; d'autre part, avoir confiance dans le réel et ne pas s'abîmer dans le virtuel. C'est finalement très simple et permettra, je crois, de nous reconstruire et de préparer l'avenir des générations futures. Cessons de nous comporter comme des gosses de riches qui ont cassé leur jouet ! Revenons à la nature, à l'homme, à Dieu (j'ose le dire même si ce n'est pas toujours très bien vu...) qui comble notre besoin d'ineffable. »
13:32 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans PHILOSOPHIE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, spiritualite, action-sociale-chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
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