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07/11/2006

NOTRE PERCEPTION DE DIEU.

Il existe chez les individus que nous sommes, cinq perceptions fondamentales sur notre approche de Dieu.
Nous pourrions penser que ces représentations n'ont aucunes importances dans ce qui détermine notre personnalité. Rien de plus inexact. Que nous soyons athées militant ou chrétien ( ne ) convaincus tous ces paradigmes influencent nos comportements quotidiens.
Quelle est donc votre perception spirituelle de la Vie ?
Bruno LEROY.

 1 ) Dieu : une dangereuse illusion

Pour vous, Dieu est avant tout une projection de l'homme, de ses désirs, de ses peurs, de ses besoins les plus archaïques. Les religions ne vous inspirent guère confiance car l'histoire passée et récente témoigne de toutes les violences qui ont été commises en son nom. Elles ont, à vos yeux, surtout été une source d'asservissement et de domination en inculquant aux hommes la peur, la culpabilité, les dogmes... Pour devenir adulte et prendre leur vie en main, les hommes doivent s'affranchir de ce carcan étouffant. Ses biens (santé, développement personnel, économique et social), l'homme doit les attendre de lui-même et non plus d'une prétendue force supérieure. L'homme doit conquérir sa liberté par son intelligence, indépendamment de tous les pouvoirs, notamment spirituels, qui cherchent à l'encadrer et à l'infantiliser en lui expliquant qu'il ne peut rien faire de lui-même. Vous vous retrouvez bien dans la phrase du philosophe Jean-Paul Sartre qui affirme : " Ou bien Dieu existe et l'homme n'est rien ; ou bien l'homme existe...". Les croyants ? Ils sont au mieux de gentils naïfs qui sont persuadés que Dieu est bon alors qu'il suffit de contempler le monde pour se convaincre du contraire (catastrophes, famines, violences, misère, etc.). Car si Dieu existe, il est alors le grand absent ! Les croyants sont au pire des fanatiques, persuadés de tenir une vérité qu'ils veulent imposer à tous. Pour vous, le monde n'est gouverné que par le hasard et la nécessité. La grandeur de l'homme consiste à lutter et conquérir sa place par ses propres forces.

Pour aller plus loin :


On peut affirmer ensemble que, d'une certaine façon, Dieu est absent de ce monde. Comme le dit le prophète Isaïe (45, 15) : " En vérité tu es un dieu qui se cache, Dieu d'Israël, sauveur. " Dieu n'est pas cette divinité qui pense et programme dans son bureau céleste ce qui doit guider nos vies concrètes. Le monde et les événements qui s'y déroulent sont autonomes : ils résultent du seul jeu des forces en présence : les forces physiques obéissent à leurs lois propres, les forces libres à leurs projets. Le monde est un champ de combat et d'aventure pour l'homme. Poussé par son appétit de vivre et d'être heureux, il doit apprendre à découvrir, à connaître et à maîtriser les forces, intérieures et extérieures, qui le conditionnent. Le Dieu créateur a créé pour faire exister, laisser exister et livrer à l'existence. Et il n'intervient pas pour empêcher des événements, ni pour réparer les conséquences nuisibles de ceux-ci. La seule exception est l'intervention de Dieu en Jésus Christ, qui est la présence de Dieu dans le monde, l'Emmanuel (" Dieu avec nous "). En Jésus Christ, l'homme trouve un allié, une puissance de vie en sa faveur qui l'aide, de l'intérieur, à donner sens à son existence. Si Dieu est " proche " (Marc 1, 15), sa présence ne s'impose pas : elle doit toujours être recherchée, accueillie, fréquentée. En cela, ce Dieu ne peut pas être une création humaine : l'homme n'inventerait pas un Dieu " absent " du monde !


2) Dieu, ce juge implacable dont il faut apaiser la colère

Vous êtes marqué par l'image d'un Dieu au jugement implacable. Cette figure suscite, au fond de vous, la peur de mal faire et la culpabilité de ne pas être à la hauteur des attentes de Dieu. Vous essayez de respecter la loi de Dieu et d'agir en conformité avec les valeurs et la morale évangélique : faire le bien autour de soi, être attentionné, mener une vie digne et droite, autant que possible. Vous vous investissez dans une pratique religieuse régulière et variée (messe, pèlerinage, jeûne, aumône, etc.). Mais le plus difficile à accepter, pour vous, c'est d'avoir le sentiment de ne jamais progresser vraiment, de retomber souvent dans les mêmes ornières. Avec le temps, vous avez l'angoissante impression que tout ce que vous pourrez faire de bien et de bon ne sera jamais suffisant pour vous racheter aux yeux de Dieu et vous assurer ainsi votre salut A la messe, vous vous reconnaissez particulièrement dans la première partie de cette phrase : " Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je serai sauvé ". Cette conscience aigüe de la puissance du péché, de la crainte de la condamnation, vous mine et vous angoisse. Même quand le bonheur vient, vous craignez qu'il ne dure pas car, pensez-vous, toutes les bonnes choses ont une fin et tout se paye... Même si vous y croyez profondément, vous avez du mal à percevoir, dans votre vie, la réalité et les effets de cette Bonne Nouvelle dont vous entendez si souvent parler à l'église mais qui vous semble aujourd'hui encore si lointaine.

Pour aller plus loin :


S'il fallait décrire le système religieux dans lequel vous vous trouvez, on pourrait le décrire comme une tentative d'arracher à Dieu une réaction favorable grâce à une observation de la loi et la pratique des bonnes œuvres. La limite ? On se rend vite compte que le respect le plus strict du code de la route divin ne suffit ni à compenser le péché, dans lequel on finit souvent par retomber, ni à obtenir une attitude favorable du juge : quoi que nous fassions, nous restons toujours des débiteurs insolvables... Il peut être bon de remonter à la source : d'où vous vient cette image de Dieu ? Qui vous a présenté Dieu ainsi ? Avez-vous déjà entendu d'autres manières de parler de Dieu ? Comment faites-vous coïncider cette image avec celle du Dieu que nous révèle Jésus Christ dans les Évangiles : celui qui accueille tout le monde sans exception ? Avec le Christ, on sort enfin du régime de la peur et de la sanction pour entrer dans celui du don gratuit. Saint Paul rappelle : " Il n'y a donc plus maintenant de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus. La loi de l'Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus t'a affranchi de la loi du péché et de la mort. " Autrement dit, vous n'avez plus d'effort ou de sacrifices à fournir pour " gagner " votre salut : le fait d'être un débiteur insolvable n'est pas un obstacle pour Dieu. Il n'y a pas d'addition à payer ou de ticket de péage ! Le salut est offert gratuitement, sans contre partie d'aucune sorte ! On est loin de la mentalité comptable humaine. L'amour de Dieu ne varie pas en fonction de nos mérites ou de nos péchés. Il nous aime tel que nous sommes (et c'est ce que nous avons tant de mal à croire !). La question qui vous est aujourd'hui posée est la suivante : acceptez-vous d'être sauvé par Dieu malgré vos manquements, vos péchés, vos faiblesses ? Acceptez-vous d'être accepté, aimé de Dieu dès maintenant tel que vous êtes, sans n'avoir rien d'autre à répondre que oui ?


3) Dieu, ce roi tout-puissant dont il faut s’attirer les faveurs

Vous voyez en Dieu une puissance supérieure dont il faut observer la Loi et les commandements pour bénéficier, par un juste retour des choses, de sa bienveillance et de sa prodigalité. Vous êtes attaché au respect des rites religieux, qui doivent témoigner du mystère, de la beauté et de la majesté de Dieu qu'on a parfois un peu trop présenté comme un simple " copain "... Vous aimez recourir aux formes traditionnelles de prière, qui ont traversé les siècles : chapelet, pèlerinage, neuvaine. D'ailleurs, vous n'hésitez jamais à faire appel aux saints du Ciel pour leur confier vos soucis quotidiens (travail, santé, etc.). Vous insistez également sur les préceptes moraux, qui forment comme une sorte de code de la route et une colonne vertébrale pour le croyant. Ces valeurs, regrettez-vous, sont malheureusement de moins en moins respectées de nos jours, C'est en effet une chance offerte aux hommes que de recevoir ces vérités clairement définies qui permettent de s'orienter dans la vie, sans craindre de s'égarer. Vous avez également à cœur de transmettre aux plus jeunes ce trésor que vous avez reçu de vos aînés. A une époque qui semble avoir perdu le sens de la responsabilité, vous vous devez de rappeler également qu'on ne peut enfreindre les règlements de Dieu sans encourir sa légitime colère. Un automobiliste qui ne respecte pas le code de la route ne peut pas se plaindre de provoquer un accident !

Pour aller plus loin :


Face à un Dieu si grand qui se révèle dans toute sa force et sa puissance, comment subsister sans craindre d'être écrasé ? Pour approcher Dieu et entrer en relation avec lui, le peuple des croyants a tout d'abord reçu le don de la Loi. Dans son long apprentissage, retracé dans la Bible, le peuple de Dieu a ensuite de mieux en mieux compris qui était Dieu. Par sa venue, Jésus Christ a révélé que Dieu n'est pas une puissance contre l'homme mais en faveur de l'homme : c'est une puissance amie. Les relations entre Dieu et l'homme ne doivent pas être modelées sur le rapport fort contre faible, qui caractérise les rapports humains. Plus besoin, donc, de chercher des moyens de se faire valoir devant lui. L'heure des bilans et des comptes est définitivement close par Jésus Christ qui, par sa mort et sa résurrection, est venu apporter le pardon et la rémission des péchés. Il n'y a plus à s'angoisser - et à s'épuiser - pour savoir si nos œuvres et nos mérites pèsent suffisamment lourd dans la balance divine. Sous ce nouveau régime de gratuité, le désir de mettre la puissance divine au service de nos intérêts par le biais du rite accompli efficacement devient sans objet. La question vitale n'est plus " Suis-je en règle ? " mais " Est-ce que j'accepte d'être aujourd'hui aimé et sauvé par Dieu, malgré mes péchés ? " Un " oui " suffit. A travers cet accueil du salut offert gratuitement, l'homme prolonge vers les autres ce qu'il reçoit de Dieu. Il ouvre aux autres le même espace de vie que Dieu lui a ouvert. Le libéré devient libérateur.


4) Ce Dieu providence qui gouverne le monde

Vous êtes sensible à l'image d'un Dieu providence, c'est-à-dire d'une puissance supérieure qui gouverne le monde et veille sur le destin personnel de chacun. Pour vous, Dieu intervient dans le cours de l'histoire pour l'orienter dans la direction que sa sagesse inépuisable a prévu de toute éternité. Son instrument d'action privilégié, ce sont les événements : une rencontre, une coïncidence, un contretemps, un accident, une circonstance imprévue... Tout est voulu et prévu par Dieu car il est au-dessus du temps. L'Homme, quant à lui, connaît peu son passé, ignore son avenir et perçoit à peine le présent. Il n'a pas la force ni les moyens suffisants pour mener ses projets à bien... Pour trouver la voie du salut, il doit accepter de devenir l'instrument de Dieu, en discernant dans les événements le plan que Dieu a prévu pour lui. Chaque événement est une sorte d'indice qui lui permet d'accéder à l'étape suivante du plan divin. S'il refuse de se soumettre à la volonté de Dieu sur lui, il devient l'artisan de son propre malheur... Le Mal, qui reste un mystère, a été permis par Dieu pour une raison que nous ignorons et que Dieu seul connaît. Parfois, les épreuves que nous traversons sont permises en vue d'une croissance et d'un bien que nous découvrons souvent plus tard. Nous sommes et restons toujours dans la main de Dieu. Ce n'est qu'après notre mort que nous pourrons contempler l'endroit de la tapisserie et en comprendre le motif.

Pour aller plus loin :


Dieu est bien une providence mais une providence d'inspiration pour l'homme, au sens où il invite celui-ci à faire face à l'événement, à ne pas le subir, à lui donner sens. C'est dans la Parole de Dieu et dans les sacrements, entre autres, que l'Homme reçoit et puise la force et le discernement pour agir de manière libre et autonome. La grâce de Dieu, offerte à tous les hommes sans exception, les motive et les rend désireux et capables d'agir sur les événements de leur vie, même les plus tragiques. Le croyant agit sur la situation pour la transformer de telle manière que les personnes qui y sont impliquées puissent s'épanouir dans leur existence. Dieu n'est donc pas dans l'événement lui-même, il est proche de l'homme confronté à l'événement. Quand il crée les réalités du monde, il les fait et les laisse exister selon leurs lois propres. Le lieu de son intervention se situe dans le cœur de l'Homme. Il est " Emmanuel " (c'est-à-dire " Dieu avec nous "). Il n'a pas de plan préétabli pour chacun sinon celui de faire exister l'homme toujours davantage, de le libérer de tout ce qui l'entrave, pour l'unir à lui et aux autres hommes. Dieu ne voit donc pas en nous ses " instruments " mais au contraire ses " amis " à qui il ne cache rien (Cf. Jean 15, 15). C'est par nos mains, notre bouche, nos yeux, notre manière d'être que Dieu prend corps dans le monde et le transforme. Dieu attire chacun au cœur de sa liberté ; il est proche mais ne s'impose pas. Dieu est un " Dieu qui se cache " (Isaïe 45, 15) dont la présence doit être recherchée, accueillie et fréquentée.


5) Dieu, le Tout-Autre qui libère et fait vivre

Vous avez découvert l'image d'un Dieu à la fois Tout-Autre et tout proche. Cette découverte ne s'est pas faite en un jour. Elle est le résultat d'un long cheminement au cours duquel vous avez peut être démasqué d'autres images de Dieu : l'image du juge intraitable qui ne veut pas le bonheur de l'homme, celle d'une providence omnisciente qui télécommande les événements au mépris de la liberté humaine, ce puissant dont il faut s'attirer les faveurs pour rester en vie... Désormais, vous l'avez compris, le but n'est pas d'abord de produire des œuvres, aussi bonnes soient-elles, mais d'accueillir la révélation d'un Dieu proche pour se laisser revivifier. Le passé, avec son poids de blessures et de péchés, n'est plus une entrave à l'avenir car vous vous savez désormais aimé et sauvé malgré tout. Cette certitude ne vous empêche pas de garder les pieds sur terre : la foi connaît l'assurance mais non la sécurité. Elle n'est jamais une assurance contre les accidents de la vie ! Cela ne vous inquiète pas outre mesure : quoi qu'il advienne, quelle que soit votre vulnérabilité, Dieu est avec vous, il est pour vous force et tendresse. Conscient de ce que vous avez reçu gratuitement, vous êtes habité par le désir d'ouvrir aux autres l'espace de vie que Dieu vous a ouvert. Vous avez à cœur de prolonger cette tendresse vers votre prochain, c'est-à-dire celui dont vous vous approchez.

Pour aller plus loin :


Vous savez d'expérience qu'on ne devient pas croyant une fois pour toutes. Nous n'avons jamais fini de nous convertir en déboulonnant les images fausses de Dieu. Ce n'est pas la même chose de " croire à Dieu " que de " croire en Dieu ". Dans le premier cas, il s'agit d'une croyance intellectuelle à un concept, une idée plus ou moins précise, qui n'engage à rien sur le plan personnel. Dans le second cas, on est dans le domaine de la relation, d'une confiance accordée à quelqu'un qui ouvre sur l'amour et l'espérance. Comme le résumait le titre d'un livre du dominicain Bernard Bro, qui jouait sur les mots : " La foi ce n'est pas ce que vous pensez ". Cette relation de confiance est un appui à rechercher sans cesse surtout lorsque nous sommes confrontés à des événements douloureux : Dieu n'est jamais du côté de ce qui nous accable. Il est une puissance de vie qui nous pousse à ne pas subir l'événement mais à lui donner du sens en le transformant de telle sorte que les personnes impliquées puissent épanouir leur existence malgré tout. L'Emmanuel (" Dieu avec nous ") nous assure, en toutes circonstances, de son Esprit qui produit " amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, humilité et maîtrise de soi " (Galates 5, 22). Providence d'inspiration, il nous invite à accueillir, à sentir, à goûter la vie de Dieu dans le silence de la prière, nous rendant ainsi désireux et capable d'agir. Tout croyant est appelé à donner corps à ce Dieu qui se donne. C'est par nos mains et notre visage que Dieu s'incarne dans le monde afin de devenir providence les uns pour les autres.


19:36 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans SOCIOLOGIE. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, action-sociale-chretienne, spiritualite |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

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