30/09/2007
ET SI C'ÉTAIT CELA L'ESPÉRANCE ?
Mgr Jean-Louis Tauran.
Tout dans cette basilique nous parle de persévérance et de témoignage :
l'Apôtre Pierre, bien sûr ;
le culte de Pétronille, lié au souvenir de la capella Regum francorum, qui motive notre rassemblement ;
la permanence de cet édifice à travers les siècles, où tant de pèlerins sont venus se ressourcer ;
notre présence, ce matin, en tant que chrétiens de France désireux de conserver, c'est-à-dire de transmettre, notre héritage chrétien en dépit des tentatives de ceux qui s'efforcent de le banaliser ;
et surtout le sacrifice de Jésus dont cette eucharistie est le mémorial.
Tout cela parce que, depuis plus de deux mille ans, les disciples de Jésus ont eu le courage de « rendre compte de l'espérance » qui les habitait (1 P 3, 15).
Ils l'ont fait dans la monotonie du quotidien « aux travaux ennuyeux et faciles mais qui demandent beaucoup d'amour » (François de Sales) ou dans des circonstances exceptionnelles, dans ce grand combat entre la croix et le monde, évoqué par l'Évangile de Jean : » vous n'appartenez pas au monde… voilà pourquoi le monde a de la haine contre vous » (Jn 15, 19).
Nous le savons, dans la primitive Église, on employait les termes « martyr » et « témoin » comme équivalents. C'est qu'il n'a jamais été commode d'être chrétien ; et il en sera toujours ainsi. Il ne peut pas exister un « christianisme à la mode » ! La croix est plantée au cœur de notre foi. Elle suppose toujours une rupture :
renoncer aux idoles du moment ;
rompre avec le pessimisme ambiant ;
pratiquer un discernement pour contribuer au bien et corriger le mal ;
avoir le courage de résister aux accommodements faciles.
En un mot, renoncer au péché. Quand je parlais de rupture, je pensais « conversion » !
Nous sommes là, ce matin, en quelque sorte au nom des catholiques appelés à vivre leur foi dans la France d'aujourd'hui.
Avec eux, ensemble, fidèles et pasteurs, il s'agit toujours, comme le recommandait Pierre à la première communauté de Rome, de « ne pas nous laisser troubler. C'est le Seigneur, le Christ que nous devons reconnaître dans nos cœurs comme le seul saint » (1 P 14). C'est cela que devraient pouvoir percevoir ceux qui nous entourent. Et nous savons que ces chrétiens contagieux existent en France : de toutes les générations et de tous les milieux !
Catholicisme, la fin d'un monde. C'est le titre d'un récent ouvrage. C'est une affirmation. J'y mettrai prudemment un point d'interrogation. À Valence, en 1799, un de nos compatriotes, commissaire du peuple, semant de l'herbe sur la tombe fraîche du pape Pie VI, eut l'imprudence de déclarer : » Ci-gît le ci-devant pape ; c'est la fin de la superstition. » Et il y eut un autre pape et il y en aura toujours, comme d'autres chrétiens, jusqu'à la fin du monde. Pourquoi ? Parce que la race des témoins ne meurt pas plus que l'Église du Christ.
Ce que le monde attend, et la France en particulier, ce sont des chrétiens qui aient le courage de la différence. Malheur à nous si nous pensons et vivons comme tout le monde ! Nous ne sommes plus disciples. Nous ne sommes plus « sel de la terre », comme surent l'être les chrétiens de Rome qui, dans le cirque tout proche de nous, n'ont pas hésité à verser leur sang, à cause de l'Évangile.
Demandons donc la grâce d'avoir le courage, là où nous vivons, de témoigner, par nos paroles et par nos actes, qu'il n'est pas vrai que :
la personne humaine se réduit à ce qu'elle montre et produit ;
les critères d'ordre technique et financier sont synonymes de bonheur ;
la fabrication et le commerce des armes sont le chemin de la paix ;
la vengeance est une bonne manière d'obtenir réparation des torts subis ;
la violence peut être un moyen de faire valoir ses droits ;
l'instabilité de l'amour, livré au gré des passions, est une manière humaine d'aimer ;
qu'en politique et dans les débats publics on peut toujours s'en sortir en discréditant un adversaire.
Ils sont donc nombreux les domaines où le Christ nous commande : » Vous serez mes témoins » (Ac 1, 8).
Nous savons d'expérience que ce n'est pas facile. C'est pourquoi nous avons besoin de prier les uns pour les autres, d'implorer l'intercession des saints pour obtenir la grâce de la cohérence chrétienne. Nous y sommes encouragés aussi par l'incomparable témoignage du pape Jean-Paul II qui nous précède sur la voie escarpée du troisième millénaire. Nous avons surtout la source jamais tarie de l'eucharistie qui nous équipe pour tous les combats et nous rappelle que la croix du Christ, emblème des témoins-martyrs de tous les temps, demeure le signe du refus des ténèbres mais aussi de la victoire de la lumière. De ce combat entre les ténèbres et la lumière, chacune de nos vies est l'enjeu quotidien. Nous n'aurons jamais fini de dire notre « oui » baptismal au Christ et au monde. Disons-le « avec douceur et respect » (1 P 3, 16), persuadés que le monde actuel, la France d'aujourd'hui ont besoin de l'Évangile. Oui, car aujourd'hui comme hier, il reste dans le cœur de chaque homme un espace que Dieu seul peut combler.
Et si c'était cela l'espérance ?
21:25 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans SPIRITUALITÉ | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, spiritualite, action-sociale-chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
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