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25/10/2009

LUTTER CONTRE LES EXCLUSIONS.


BRUNO LEROY.
LUTTER CONTRE LES EXCLUSIONS.
Nous faisons face ici à un problème majeur : on ne peut changer la réalité ou lutter contre l’exclusion à partir de n’importe où ni à partir de n’importe quelle disposition intérieure. Quand on fait un retour sur des échecs importants, on se rend compte souvent qu’en réalité, ce ne sont pas les théories ou les connaissances qui ont fait défaut, mais bien le lieu à partir duquel on a voulu agir. À ce propos, il serait bon de se rappeler le mot si pertinent de Friederich Engels, mot qui, avec le temps, est devenu maxime populaire. Il dit ainsi : "l’on ne pense pas la même chose selon que l’on vit dans une cabane ou dans un palais".

La simplicité d’une telle affirmation constitue, nous n’en doutons pas, une des expressions les plus lumineuses de la pensée contemporaine. Ce qu’affirme Engels avec sa "boutade" c’est que, bien que la vérité soit absolue, l’accès que nous pouvons en avoir ne l’est pas. C’est-à-dire que, bien qu’un certain accès réel à la vérité nous soit possible, il sera toujours conditionné par la réalité elle-même et aura toujours, pour autant, un caractère relatif. Jamais il ne sera neutre et inconditionnel. Tout cela est d’une importance capitale pour notre propos. En effet, même en supposant les meilleures intentions, la meilleure bonne volonté et les meilleures capacités intellectuelles, il y a des lieux d’où tout simplement on ne peut ni voir ni sentir la réalité de façon à ce qu’elle nous ouvre à l’amour et à la solidarité.

Alors, il ne nous reste qu’une solution : changer de lieu social. Le lieu social, c’est le point à partir duquel on perçoit, on comprend la réalité et on essaie d’agir sur elle. Il nous faut donc passer du lieu social des élites au lieu social des exclu(e)s. C’est à partir du monde des pauvres que nous devons lire la réalité de la violence si nous voulons nous engager pour sa transformation. La vision qu’ont les pauvres et les opprimé(e)s de la violence économique doit être le point de départ et le premier critère pour lire et comprendre aussi bien le monde globalisé que la violence qu’il provoque.

C’est aussi simple que cela, mais c’est tout aussi grave d’en arriver aux conclusions et d’en peser les conséquences. Où est-ce que je me situe ? Où sont mes pieds et ma praxis en matière de solidarité ? Car la question est de savoir si je suis au bon endroit pour accomplir ma tâche. Un tel processus ne peut être mis en marche que par ceux et celles qui sentent dans leur chair la brûlure de l’injustice et de l’exclusion sociales. La tâche d’éduquer implique d’abord le lieu social pour lequel on a opté ; puis le lieu à partir duquel et pour lequel on fait des interprétations théoriques et des projets pratiques ; finalement, le lieu d’où part la pratique et à laquelle on subordonne ses propres pratiques.

À la racine du choix de ce lieu social, il y a l’indignation éthique que nous ressentons devant la réalité de l’exclusion ; le sentiment que la réalité de l’injustice dont sont victimes la grande majorité des êtres humains est si grave qu’elle exige une attention incontournable ; la perception que la vie même perdrait son sens si elle tournait le dos à cette réalité. Il ne sera jamais possible de travailler à être plus humains à partir du point de vue des centres de pouvoir et de savoir, ni même en se situant à partir d’une prétendue neutralité. Cette pratique est appelée d’avance à être condamnée et à tomber d’elle-même lorsqu’elle aura à soutenir la preuve des faits, comme cela est arrivé au jésuite de Camus dans La Peste.

Personne ne peut prétendre voir ou sentir les problèmes humains, la douleur et la souffrance des autres à partir d’une position "neutre", absolue, immuable dont l’optique garantirait une totale impartialité et objectivité. Il est donc extrêmement urgent de provoquer une rupture épistémologique. La clé pour comprendre ceci est dans la réponse que chacun(e) de nous donnera à la question : "d’où" est-ce que j’agis ? C’est-à-dire quel est le lieu que je choisis pour voir le monde ou la réalité, pour interpréter l’histoire et pour situer mes actes transformateurs ?

Mieux que n’importe quel autre moyen particulier, la manière d’exprimer sa sensibilité et son intérêt à rendre la société plus humaine réside, en effet, dans une pratique active de la solidarité, notamment avec les démuni(e)s qui font l’objet de discriminations et de marginalisations intolérables. Tout ce qui signifie une violation de l’intégrité de la personne humaine, comme la torture morale ou physique, tout ce qui est une offense à la dignité de la personne, comme les conditions de vie inhumaines, l’esclavage, la prostitution, le commerce des femmes et d’enfants, ou encore pour ceux et celles qui bénéficient d’un emploi les conditions de travail dégradantes qui réduisent les travailleurs au rang de purs instruments de production, sans égard pour leur dignité, tout cela constitue des pratiques infâmes qui nous engagent toutes et tous à nous impliquer dans les solidarités sociales.
Bruno LEROY.
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10:49 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans PRESSE. | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, spiritualite, action-sociale-chretienne |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

Commentaires

"Où est-ce que je me situe ?" Est-ce si important ? Sans nier la nécessité d'avoir un minimum de repères, "se situer" n'est-il pas un peu chercher "là où reposer la tête" ? ce qui n'est surtout pas adopter une position "neutre", tout au contraire. "Car la question est de savoir si je suis au bon endroit pour accomplir ma tâche." Permettez que je la chamboule un peu : et si elle n'était pas plutôt d'être à l'endroit (c'est-à-dire la tête au ciel et les pieds sur terre) pour accomplir ma BONNE tâche ?

Alors, "changer de lieu social", pourquoi pas ? Mais à condition de ne pas s'y asseoir : faute de quoi, on se surprend à pratiquer l'exclusion du précédent lieu social ! N'est-ce pas plus que de mesure le péché mignon (et parfois moins mignon) de maints pourfendeurs de "l'exclusion" ? (Par exemple, à force de s'asseoir en d'autres lieux sociaux virtuels, cela faisait un sacré bout de temps que l'auteur de ces lignes n'était pas venu commenter chez Bruno !...)

Au fond, cette "pratique active de la solidarité" n'est-elle pas dans l'art de jeter des passerelles entre les lieux sociaux ? Dans ce cas, à la question : "Où est-ce que je me situe ?", et si nous répondions -en place de tel lieu social au détriment de tel autre- : je suis sur un PONT... ou sur la barque du passeur ? Mais il faut d'abord apprendre à ramer par tous temps !

Quoiqu'il en soit : LUTTER CONTRE LES EXCLUSIONS, nous pouvons continuer. Nous ne sommes pas près de clamer : "c'est la lutte fina-a-a-a-le !..."

Bonne entrée en Carême... et bravo pour l'apparition du lecteur audio là-haut : cela met une autre forme de vie sur nos blogs qui, sinon, croulent sous les textes. Il m'arrive de m'y mettre aussi !...

Écrit par : Michel de Tiarelov | 25/02/2009

Je me disais bien aussi ! Ce post est la reprise d'un précédent... qui signait ma toute première intervention chez vous : cela s'arrose !

http://brunoleroyeducateur-ecrivain.hautetfort.com/archive/2007/11/14/combattre-l-exclusion.html

Écrit par : (PS) Michel de Tiarelov | 25/02/2009

Oui, Cher Michel, comme l'indique la catégorie dans laquelle cet article est positionné " PRESSE ".
C'est une publication ( et la présentation le montre quand même ...) qui a été reprise par la presse internationale.
Je vous souhaite un mirifique Carême empli du silence constructeur de l'Amour, celui dans lequel Dieu nous parle dans de doux murmures !!

Bien Fraternellement !!
Bruno.

Écrit par : BRUNO LEROY. | 25/02/2009

Les commentaires sont fermés.