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01/02/2009

UNE ÉCONOMIE DE LA PAUVRETÉ ?

L’Évangile a toujours été pour le monde une provocation. Déjà auparavant, pour le peuple d’Israël, la prédication des prophètes allait à l’encontre des idées reçues. L’importance, dans le message chrétien , de la béatitude de la pauvreté ne peut faire aucun doute. C’est par elle que l’évangéliste Matthieu inaugure le grand discours de Jésus sur la montagne, que l’on appelle à juste titre la charte du Royaume de Dieu.

Il ne faudrait pas trop vite rejeter la pratique évangélique de François comme anachronique, sous prétexte qu’elle ne correspondrait pas aux idéaux et aux activités de notre société contemporaine. Nous l’appelons société de consommation parce qu’une bonne part de ses activités consiste à produire et à faire consommer. Chacun veut disposer d’argent qui le rend libre de choisir, dans une économie d’abondance les biens nécessaires ou superflus offerts au plus grand nombre.

Ce système économique peut revendiquer des résultats indéniables. Les famines imparables ont disparu. La grande masse a atteint une sécurité d’approvisionnement en biens indispensables. A l’échelon national des sociétés occidentales, l’extrême misère est devenue l’exception, tandis que la sécurité matérielle est garantie par des institution de secours et de prévoyance qui atteignent presque tous les individus. Néanmoins les disparités de condition entre les personnes engendrent toujours des sentiments de frustration et entretiennent les luttes de classes. La parole de Jésus est encore d’actualité : « des pauvres, il y en aura toujours parmi vous....».

Face à ce monde avide de richesses, de confort, de sécurité, la béatitude de la pauvreté semble peu appréciée et l’invitation franciscaine paraît totalement hors de propos. Pourtant nombreux sont dans notre monde super-organisé ceux qui aspirent à un renouveau de simplicité, de désencombrement, de transparence. Beaucoup se rendent compte de l’asphyxie spirituelle à laquelle conduit la surabondance de biens matériels.

Là où les relations humaines sont contrecarrées par l’envie et bloquées par la lutte des classes, on peut devenir plus perméable au message d’Assise qui a montré combien la simplicité, la charité fraternelle, la pauvreté avaient partie liée. Se dépouiller, partager afin de rencontrer des frères, annoncer la paix et se présenter les mains nues, sans revendication sans peur aussi et confiant en l’homme, telles ont été les attitudes de François qui font rêver tous ceux qui aujourd’hui aspirent à une vie humaine plus chaleureuse.

 

Mais il est une autre aspiration vers la pauvreté franciscaine, qui est le fait de ceux qui dépassent l’horizon national des sociétés occidentales pour découvrir l’extrême dénuement matériel qui règne encore sur certains pays du Tiers-monde où la faim , la maladie, l’insécurité totale devant les fléaux naturels maintiennent des conditions de vie sous-humaines, donc indignes des fils de Dieu. Des voix s’élèvent parmi les chrétiens pour proposer l’inspiration franciscaine comme un moyen d’équilibrer les chances de tous les hommes. Les nations riches sont invitées à modérer leur développement et leur course au progrès matériel, à investir de façon désintéressée chez les peuples les plus défavorisés.

Comme cette politique internationale entraînerait indéniablement un ralentissement de la croissance des nantis, on ne peut la proposer que comme un choix délibéré, généreux et fraternel, c’est à dire gouverné par l’amour des autres. D’autres motifs peuvent d’ailleurs s’ajouter pour le retour à une vie plus simple. Cette perspective qui semblait pure utopie lorsque l’occident ne se souciait que de consommer et s’imaginait que l’énergie à bon marché devait être toujours plus abondante, vient de se révéler non plus utopique mais prophétique, car indépendamment des visées humanitaires et fraternelle', la course à la croissance, la consommation déréglée le gaspillage se sont révélés destructeurs de l’environnement. La nature est malade de l’homme riche. On se souvient alors du petit pauvre d’Assise qui avançait avec tant de respect de la création dont il savait préserver la beauté et qu’il préférait admirer plutôt que posséder et consommer.

Enfin l’exploitation des richesses naturelles s’est faite jusqu’ici sans se soucier des hommes, de leurs traditions, de leur culture, de leur vie spirituelle. Elle a le plus souvent engendrer des affrontements entre nations riches et nations pauvres, tout comme le développement industriel régi par l’idéologie libérale avait engendré la lutte des classes. On se souvient aussi de François qui préférait renoncer à un bien légitime plutôt que de s’affronter à celui qui le convoitait injustement: « Si nous avions des biens, disait-il, il nous faudrait des armes pour les défendre ». En écho à l’Évangile :« si quelqu’un te demande ton manteau, abandonne-lui aussi ta tunique ».

Que pourrait-on proposer sous ce thème d’économie de la pauvreté ? Sinon un nouvel ordre économique mondial qui aurait pour objectifs principaux une répartition plus juste et plus généreuse des richesses matérielles permettant peu à peu la disparition, chez les plus démunis, d’une pauvreté imposée par le désordre économique, et aliénante pour les personnes. Cela nécessiterait chez les nantis le renoncement,au moins temporaire à une croissance continue, une sorte de moratoire à l’enrichissement des riches jusqu’à ce que toute la famille humaine puisse vraiment bénéficier des biens destinés à tous. Le respect des autres, le souci du partage, la recherche des valeurs spirituelles, la volonté de promouvoir la paix en supprimant les causes économiques de rivalités et d’affrontements.... S’agit-il d’une pure utopie ? Mais l’utopie n’est-elle pas indispensable pour faire désirer la conversion des individus et des sociétés et inspirer leur vrai progrès moral ?

17:39 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans CHRONIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation, spiritualite, action-sociale-chretienne |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

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