07/10/2009
ESSAIE ET TU VERRAS.
- Essaie de dire bonjour et de sourire à chaque jeune que tu rencontreras. Tu ouvriras ainsi la porte au dialogue et à l’amitié. Sème la joie et les jeunes se rassembleront autour de toi.
- Essaie de te méfier des idées toutes faites sur les jeunes. Tu découvriras ainsi leurs côtés positifs. Surtout ne dis jamais contre les jeunes des paroles que tu n’oserais écrire ou signer.
- Essaie de donner à chaque jeune la chance de s’exprimer. Tu comprendras davantage ce qui l’habite et ce à quoi il aspire.
- Essaie de t’intéresser aux jeunes que tu côtoies, fais-leur confiance, encourage-les et confie-leur des responsabilités. Tu grandiras à leurs yeux et tu deviendras pour eux un ami.
- Essaie de prendre le temps de regarder l’être avant l’avoir, le jeune avant le projet, l’étudiant avant la matière. Tu pourras ainsi faire grandir la vie.
- Essaie d’être vrai auprès des jeunes. Tu pourras ainsi créer des liens plus durables. Sois « correct » avec eux. Admets tes erreurs avec simplicité et souligne leurs bons côtés.
- Essaie de comprendre les jeunes avant de les juger. Tu verras, ils sont plus merveilleux que tu ne l’aurais pensé. Ils t’apprendront qu’au fond de leur cœur habite un immense besoin d’amour et d’absolu.
Essaie de ne pas faire la sourde oreille aux propos des jeunes. Prends le temps de les écouter et utilise leur langage pour te mettre sur la même longeur d’onde.
Essaie de rejoindre les jeunes dans leurs lieux de rencontres, de marcher avec eux. Petit à petit, ils se révéleront à toi et tu deviendras un confident. Toutefois, demeure toi-même.
Essaie de retenir le prénom des jeunes que tu rencontres. Tu démontreras ainsi que les jeunes sont importants à tes yeux et que tu les aimes.
Essaie et tu verras leur comportement changera. Ce ne sont que de simples conseils d'un éducateur de rue qui, pourtant ont fait leurs preuves depuis longtemps.
Bruno LEROY.
11:32 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans CHRONIQUE DE BRUNO LEROY. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chritianisme, spiritualite, foi, spiritualite de la liberation, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
30/09/2009
LA VIE DANS L'ALLIANCE EST ESPÉRANCE.
La vie dans l'alliance est une manière de marcher et de se frayer un chemin dans l'existence. Il est le chemin qui conduit à faire la vérité, à perdre sa vie et à la recevoir en retour comme lui-même a perdu la sienne et l'a reçue en retour luxueusement de son Père. La vie dans l'alliance imprime donc à l'existence un mouvement qui la porte constamment vers l'avant, de commencement en commencement, sans fixation ni nostalgie. Elle est donc passage, traversée, exode : travail de la vie à travers la mort, car il n'est pas de traversée sans abandon.
Aussi bien la vie dans l'alliance permet-elle d'affronter la mort sans dépit car, il y a identité entre l'amour et le mystère pascal. Étant donné la charité, la mort n'est plus vécue comme ce qui entraîne à la désespérance, mais comme l'occasion de donner sa vie comme on l'a reçue, gratuitement, ou, en d'autres termes, de se rendre dans un geste d'abandon. L'espérance chrétienne est la capacité de vivre dans le temps, de vieillir et même de mourir sans nostalgie. Car le Dieu auquel on accorde sa Foi grâce au témoignage de ceux qui nous ont précédés est aussi le Dieu qui vient, que l'on cherche et que l'on attend ; Dieu vient aussi de l'avenir La Foi en Dieu qui aime et que l'on aime, est ainsi inséparable de l'espérance.
Cette espérance est sans mesure. Car le monde qui vient, même si Jésus nous le laisse entrevoir dans ses paraboles du Royaume, excède toutes nos représentations. Le don de Dieu à venir dépasse tout ce que nous pouvons imaginer à partir de notre expérience présente. Aussi l'espérance est-elle l'acte même d'espérer sans autre assurance que la relation à Dieu qui donne la Vie et auquel on se rend sans réserve.
Foi, espérance, charité sont les attitudes fondamentales qui articulent la vie des chrétiens, leurs relations à Dieu et aux autres hommes. Elles sont la marque de la nouvelle alliance au nom du Dieu de Jésus-Christ, instaurée le jour de la Pâque. Chacun et chacune s'y trouve convié gratuitement. La crucifixion du Christ est également cette puissante libération de l'esclavage de la peur de la mort que peuvent éprouver les hommes. Car la résurrection est la seule conclusion face au monde clos de notre finitude, elle ouvre la porte vers une vie nouvelle, une Alliance nouvelle, celle d'un amour vécu en actes au quotidien dans une Joie parfaite. La Joie des ressuscités en Christ et qui propagent à travers le monde cette conviction que même la mort n'a jamais le dernier mot, lorsque nous sommes des hommes d'espérance et de confiance en cette Pâque qui est la preuve que l'amour consiste à donner sa vie pour ceux qu'on aime car, l'amour bannit toutes craintes et nous rend audacieux par-delà la pure raison. Cette pseudo-raison qui masque subtilement la peur qui n'est que lâcheté de ne jamais risquer sa vie au nom d'un absolu.
Bruno LEROY.
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03/05/2009
LE COMBAT SPIRITUEL.
La paix du coeur n'arrive qu'au terme d'un grand combat. Souvent le premier ennemi est soi-même ou plutôt la "guerre" est à l'intérieur de nous. L'objectif de ce "combat" est de retrouver la paix intérieure, mais notre coeur divisé n'est pas immédiatement incliné vers cette vraie paix.
Intervenant : P.Nicolas Buttet, Eucharistein.
21:20 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans LES BLOGS AMIS. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, catholique, spiritualite, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
02/05/2009
La nouveauté dans le Christ.
Un sens de nouveauté parcourt l’Évangile tout entier, depuis l’Annonce faite à la Vierge Marie jusqu’à la Résurrection du Seigneur. Le Nouveau Testament parle de différentes façons d’un nouveau commencement pour l’humanité. Le mot même d’« évangile » signifie justement cela : la « bonne nouvelle ». Dès le début de son ministère public, le Christ annonce ouvertement l’accomplissement des temps et la venue du Royaume de Dieu : Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous et croyez à l’Évangile [1]. Or, cela ne signifie pas que le Seigneur souhaite tout changer. Il n’est pas un révolutionnaire ou un illuminé. En fait, par exemple, pour parler de l’indissolubilité du mariage, il prend comme point de départ ce que Dieu a fait à l’origine, lorsqu’il créa l’homme et la femme [2]. C’est pourquoi il a déclaré : N’allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir [3] ; et, à plusieurs reprises, il ordonna aux disciples d’accomplir fidèlement les commandements que Moïse avait communiqués au peuple de la part de Dieu.
Cependant, dans la prédication du Seigneur il y a, sans aucun doute, un air nouveau, libérateur. D’un côté, la doctrine de Jésus développe des éléments déjà présents dans l’Ancien Testament, tels que la droiture d’intention, le pardon ou la nécessité d’aimer tous les hommes sans restriction, en particulier les pauvres et les pécheurs. En lui se réalise l’accomplissement des anciennes promesses que Dieu a faites aux prophètes. D’un autre côté, l’appel du Seigneur s’adresse de façon radicale et péremptoire non seulement à un peuple, mais à tous les hommes, qu’il appelle un par un.
La nouveauté de la présence et de l’action de Jésus-Christ se perçoit aussi d’une autre façon, déconcertante à première vue : beaucoup d’hommes l’ont rejeté. Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas accueilli [4], dit saint Jean. Ce rejet de la part des hommes met encore davantage en relief, si c’est possible, le caractère inconditionnel du don du Seigneur et de sa charité envers l’humanité. En plus, ce rejet l’a conduit tout droit à la mort sur la Croix, librement acceptée, sacrifice unique et définitif, source salvifique pour tous les hommes.
Or, Dieu a été fidèle à sa promesse et la puissance du mal n’a pas pu éteindre la générosité divine de Jésus, comme la Résurrection l’a manifesté. La force salvifique que Dieu a introduite dans le monde par l’Incarnation de son Fils et surtout par sa Résurrection, est la nouveauté absolue, universelle et permanente. Cela se voit dès le début de la prédication apostolique : avec une joie débordante, les apôtres proclament dans toute la Judée, dans l’Empire romain et dans le monde entier que Jésus est ressuscité ; que le monde pouvait changer, que chaque femme, chaque homme pouvait changer ; que nous n’étions plus soumis à la loi du péché et de la mort éternelle. Le Christ, assis à la droite du Père, dit : Voici, je fais l’univers nouveau [5]. Dans le Christ, Dieu a pris d’une façon nouvelle les brides du monde et de l’histoire humaine, plongés dans le péché, pour les conduire à leur réalisation plénière. Malgré toutes les difficultés que les chrétiens de la première heure ont rencontrées, ils regardaient vers l’avenir avec espérance et optimisme. Et ils transmettaient sans cesse leur foi à toutes les personnes qui se trouvaient auprès d’eux.
La nouveauté de la vie éternelle après la mort
Dans le monde païen il était fréquent de considérer l’avenir comme une simple réplique du passé. Le cosmos existait depuis toujours et, à l’intérieur des grandes mutations cycliques, il demeurerait pour toujours. Selon le mythe de l’éternel retour, tout ce qui s’est produit dans le passé se reproduira dans le futur. Dans ce contexte anthropologico-religieux, l’homme ne pouvait se sauver qu’en sortant de la matière, dans une sorte d’extase spirituelle, séparé de la chair ; ou en vivant dans ce monde, comme saint Paul le disait, sans peur ni espérance [6]. Dans les premiers siècles du christianisme, les païens s’en tiennent à une éthique plus ou moins droite ; ils croient en Dieu ou dans les dieux et ils leur adressent un culte assidu, en quête de protection et de réconfort ; mais ils n’ont pas l’espérance certaine d’un avenir heureux. La mort n’était qu’une rupture brutale, un non-sens.
D’un autre côté, la volonté de vivre pour toujours est profonde chez l’homme, comme le montrent les philosophes, les littérateurs, les artistes, les poètes et, de façon éminente, ceux qui s’aiment. L’homme aspire à perdurer. Ce désir se manifeste de multiples manières : dans les projets humains, dans la volonté d’avoir des enfants, dans le désir d’influer sur la vie d’autres personnes, d’être reconnu et de rester dans la mémoire des gens ; dans tout cela, on peut deviner la tension humaine vers l’éternité. Il en est qui pensent à l’immortalité de l’âme ; il en est qui comprennent l’immortalité comme une réincarnation ; il en est enfin qui, devant le fait certain de la mort, décident de mettre en œuvre tous les moyens pour obtenir le bien-être matériel ou la reconnaissance sociale : des biens qui ne seront jamais suffisants, parce qu’ils ne rassasient pas, parce qu’ils ne dépendent pas que de notre propre volonté. En cela le christianisme est réaliste, car il sait que la mort est le terme de tous les rêves vains de l’homme.
Au milieu du dilemme de la mort et de l’immortalité, le pouvoir recréateur de Dieu se rend présent dans la vie, la passion et la résurrection de Jésus-Christ. Le fidèle chrétien, uni à lui par le baptême et les autres sacrements, reproduit les jalons principaux du passage du Seigneur sur cette terre. Comme saint Paul l’a écrit aux Romains, nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle. Car si c’est un même être avec le Christ que nous sommes devenus par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable [7].
En effet, le chrétien a la certitude que Dieu lui a donné la vie en le créant à son image et selon sa ressemblance [8]. Il sait que lorsqu’il éprouve l’angoisse de la mort qui approche, le Christ agit en lui, transformant ses peines et sa mort en une force corédemptrice. Et il est sûr que Jésus lui-même, qu’il a servi, imité et aimé, l’accueillera au Ciel, le comblant de gloire après sa mort. La grande et joyeuse vérité de la foi chrétienne est que, par la foi dans le Christ, l’homme peut surclasser largement le dernier ennemi [9], la mort, et s’ouvrir à la vision perpétuelle de Dieu et à la résurrection de son corps à la fin des temps, lorsque toutes les choses se seront accomplies dans le Christ.
La vie ne finit pas ici bas ; nous sommes sûrs que le sacrifice caché et le don de soi généreux ont un sens et une récompense qui, par la miséricorde magnanime de Dieu, vont bien au-delà de ce que l’homme pourrait attendre avec ses seules forces. Si parfois la pensée de notre sœur la mort t’inquiète, parce que tu te sens si peu de chose, prends courage et pense en toi-même : que sera ce Ciel qui nous attend, lorsque toute la beauté et la grandeur, toute la félicité et l’Amour infinis de Dieu se déverseront dans ce pauvre vase d’argile qu’est la créature humaine, et l’assouviront éternellement, avec la constante nouveauté d’un nouveau bonheur ? [10]
Les fins dernières commencent d’une certaine façon sur la terre
S’il est certain que la nouveauté chrétienne concerne principalement l’autre vie, l’au-delà, l’Église enseigne aussi que la nouveauté de la Résurrection du Christ est déjà présente, d’une certaine façon, sur la terre. Quelle que soit la durée de l’univers tel que nous le connaissons, nous sommes déjà « dans les derniers temps », sûrs que le monde a été racheté, puisque le Christ a vaincu le péché, la mort, le démon.
Le Royaume de Dieu est au milieu de vous [11] ; au milieu, non seulement comme une présence extérieure, mais aussi au-dedans du croyant, dans l’âme en état de grâce, d’une présence réelle, actuelle, efficace, bien que pas encore tout à fait visible et complète. « Nous voilà donc déjà parvenus à la fin des temps (cf. 1 Co 10, 11) ; le renouvellement de l’univers est irrévocablement établi et, en un certain sens, il a vraiment commencé dès ici-bas. Dès ici-bas l’Église est, en effet, auréolée d’une sainteté véritable, si imparfaite qu’elle soit. […] Nous sommes appelés fils de Dieu et en vérité nous le sommes (cf. 1 Jn 3, 1) ; mais nous n’avons pas encore paru avec le Christ, dans la gloire (cf. Col 3, 4). C’est là que nous serons semblables à Dieu, car nous le verrons tel qu’il est (cf. 1 Jn 3, 2) » [12].
L’Église est dépositaire sur la terre de cette présence anticipée du Royaume de Dieu ; elle avance dans son pèlerinage terrestre. Cependant, tout le pouvoir salvifique de Dieu agit déjà d’une certaine manière dans le siècle présent, grâce à la Parole révélée et aux sacrements, spécialement celui de l’Eucharistie. Un pouvoir salvifique qui se manifeste aussi dans la vie sainte des chrétiens qui vivent dans le monde, sans être mondains [13]. Le chrétien est, face au monde et dans le monde, alter Christus, ipse Christus, un autre Christ, le Christ lui-même : ainsi s’établit une certaine polarité dans la vie de l’Église et de chaque croyant entre le déjà et le pas encore, entre le moment présent — occasion d’accueillir la grâce — et la plénitude finale ; tension qui a beaucoup de conséquences pour la vie du chrétien et pour la compréhension du monde.
Cette réalité confirme la distinction qui existe entre l’ordre naturel et l’ordre surnaturel. La vie surnaturelle, basée sur la foi et sur la grâce de Dieu, s’insère dans l’âme du chrétien, même si elle n’informe pas encore pleinement tous les aspects de son existence. Le chrétien vit abîmé en Dieu et pour Dieu et s’efforce de communiquer les biens divins aux autres hommes. Dans la vie future, la grâce, ou la vie surnaturelle, se transformera en gloire, et l’homme atteindra une immortalité complète lors de la résurrections des morts. En revanche, dans la vie présente, l’existence humaine, même si elle est déjà perfectionnée par la grâce, garde ses lois propres, qui doivent s’appliquer dans les différents domaines : personnel, familial, social et politique. La vie surnaturelle accueille, perfectionne et conduit à sa plénitude la nature, sans l’annuler ni s’y substituer.
Une autre conséquence de la tension entre le déjà et le pas encore s’exprime dans la notion chrétienne du temps et de l’histoire. Pour la pensée païenne, presque toujours fataliste, les événements de l’histoire étaient prévus et déterminés d’avance par le fatum, le destin. Le temps passait, intouchable et imperturbable, en spectateur muet et passif, encadré dans le flux de l’histoire. Mais le temps chrétien n’est pas seulement le temps qui passe ; c’est l’espace créé par Dieu pour la croissance et le progrès, pour l’histoire et la rédemption. Dieu agit par sa Providence dans le temps, pour conduire le monde et l’histoire vers leur plénitude.
Le Seigneur a voulu compter sur la réponse intelligente et libre des hommes, sur les prières des saints et les bonnes actions de beaucoup, pour influer sur le cours des événements. Étant son image, les hommes peuvent changer l’histoire : dans certains cas pour le pire, comme dans le cas du péché d’Adam et d’Ève ; mais, surtout, d’une manière positive, en participant activement à la réalisation du dessein divin, précisément parce que l’événement le plus important et efficace, celui qui a fait prendre au monde le tournant le plus radical, a été l’Incarnation du Fils de Dieu. C’est pourquoi la collaboration humaine la plus profonde et durable aux plans divins pour changer le cours de l’histoire a été celle de la Sainte Vierge, lorsqu’elle accueillit le Fils de Dieu dans son sein, par un fiat ! résolu.
Les chrétiens vivent dans le monde conscients de leurs péchés et de ceux d’autrui, mais convaincus que la meilleure façon de profiter du temps est de servir Dieu, pour améliorer le monde qu’il nous a confié. D’une certaine manière, le monde est façonné par l’homme, il est humanisé. La tension eschatologique devient patente dans la Providence divine, toujours présente dans la vie de l’Église et de chaque chrétien. « La création a sa bonté et sa perfection propres, mais elle n’est pas sortie tout achevée des mains du Créateur. Elle est créée « en état de voie » (in statu viæ) vers une perfection ultime encore à atteindre, à laquelle Dieu l’a destinée. Nous appelons divine providence les dispositions par lesquelles Dieu conduit sa création vers cette perfection. » [14] Le Seigneur n’a pas tout fait, jusqu’au dernier détail, dès le début. Petit à petit, en comptant sur la collaboration intelligente et persévérante des créatures, il les fait avancer, toutes et chacune, vers leur but. Comme nous l’avons vu, le pouvoir salvifique de Dieu se rend normalement présent dans la vie de l’homme de façon cachée et intérieure ; de façon analogue, la Providence divine agit doucement et simplement, non seulement dans les grands événements, mais aussi en ceux qui, en apparence, sont plus petits. C’est pourquoi le Seigneur invite à une confiance pleine : Ne vous inquiétez donc pas en disant : Qu’allons-nous manger ? Qu’allons-nous boire ? De quoi allons-nous nous vêtir ? Ce sont là toutes choses dont les païens sont en quête. Or votre Père céleste sait que vous avez besoin de tout cela. Cherchez d’abord son Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît [15].
Dieu — expliquait saint Josémaria —, qui est la beauté, la grandeur, la sagesse, nous annonce que nous sommes siens, que nous avons été choisis comme terme de son amour infini. Quelle vie de foi il faut avoir pour ne pas dénaturer cette merveille que la Providence divine met entre nos mains ! Une foi comme celle des Rois Mages : la conviction que ni le désert, ni les tempêtes, ni la tranquillité des oasis ne nous empêcheront de parvenir à ce Bethléem éternel qu’est la vie définitive avec Dieu [16].
Depuis le début de son existence terrestre, le Seigneur a comblé celle qui serait la Mère de son Fils d’une abondance extraordinaire de dons, humains et surnaturels. Conçue sans le péché originel, elle est comblée de grâce [17]. Tout au long de sa vie, au milieu d’un nombre sans fin d’épreuves et d’obscurités, elle a vécu héroïquement sa foi, en fortifiant par son exemple les premiers disciples. À la fin de sa vie, exempte de tout péché, elle fut élevée au ciel corps et âme, pour participer à jamais, comme Reine des anges et de toute la création, à la gloire du Seigneur. En elle, la promesse divine de conduire les hommes à la gloire s’est pleinement accomplie. C’est pourquoi la Sainte Vierge est pour chaque homme spes nostra, phare qui nous éclaire et cause de notre espérance.
P. O'Callaghan
[1]. Mc 1, 15.
[2]. Cf. Mt 19, 3-9 ; Gn 2, 24.
[3]. Mt 5, 17.
[4]. Jn 1, 11.
[5]. Ap 21, 5.
[6]. Cf. 1 Th 4, 13 ; Ep 2, 12.
[7]. Rm 6, 4-5.
[8]. Cf. Gn 1, 27.
[9]. 1 Co 15, 26.
[10]. Sillon, n° 891.
[11]. Lc 17, 21.
[12]. Concile Vatican II, Const. dogm. Lumen gentium, n° 48.
[13]. Cf. Jn 17, 14.
[14]. Catéchisme de l’Église Catholique n° 302.
[15]. Mt 6, 31-33.
[16]. Quand le Christ passe, n° 32.
[17]. Lc 1, 28.
http://www.opusdei.fr/art.php?p=33514
10:57 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans SAINT JOSÉMARIA. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, catholique, spiritualite, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
21/04/2009
Nous ne sommes pas dans un désert éthique.
Ce ne sont pas les sciences en tant que telles qui posent des dilemmes éthiques, mais les pratiques, les conduites, les usages qu'elles rendent possibles. La question se complique très vite par le fait que désormais les sciences impliquent elles-mêmes, pour leur propre développement, des pratiques, des techniques, des manipulations. Lorsque celles-ci ont lieu sur le vivant, et singulièrement sur le vivant humain, l'éthique est plus spécialement convoquée.
Par « éthique » j'entends l'attention aux biens humains fondamentaux impliqués par les conduites. C'est lorsque la vie est concernée dans ses situations de plus grande fragilité que les enjeux éthiques sont les plus vifs : en son commencement, en sa fin, face à la maladie, au handicap, à la dépendance sous ses différentes formes. Là est le domaine privilégié de ce que l'on nomme, de manière quelque peu inappropriée, la « bioéthique ». Mais il faut aussitôt souligner que les questions soulevées ne proviennent pas seulement des avancées de la connaissance. Il s'en faut de beaucoup. Des pratiques comme l'insémination artificielle, comme la gestation pour autrui, l'euthanasie ou l'homoparentalité ne proviennent pas exactement de progrès scientifiques. Elles proviennent d'évolutions culturelles, idéologiques, de faits de mentalités.
Il m'est demandé de dire de quelle manière je conçois mon intervention comme chrétien, comme membre de l'Église catholique, comme philosophe et théologien, dans ce débat, tout spécialement au sein du Comité Consultatif National d'Ethique. À vrai dire, si l'inspiration du croyant en sa source est religieuse, si cette inspiration est attendue – j'en ai reçu des témoignages – j'ai très vite expérimenté que c'est surtout le philosophe qui est entendu. C'est seulement l'argumentation philosophique qui a une pertinence. Je pense souvent à la formule d'Emmanuel Levinas selon laquelle « parler philosophiquement, c'est parler en s'adressant à tous ». Ce sont des biens humains fondamentaux qui sont en jeu, non des biens confessionnels.
Nous ne sommes pas dans un désert éthique
Avant d'évoquer les points de divergence, je veux d'abord souligner – ce sera ma première partie– que nous ne sommes pas dans un désert éthique. Il serait erroné de penser ou de parler comme si nous étions une citadelle assiégée, entourés d'interlocuteurs fascinés par la toute puissance, sans repères moraux, comme si la foi ou la révélation nous donnaient des lumières exclusives dans un monde livré à l'obscurité.
En réalité, sur de nombreux sujets, il existe en France un large champ de consensus éthique, dont nous ne sommes pas toujours conscients. Les points sur lesquels la parole chrétienne – plus spécialement catholique – est amenée à faire entendre un désaccord sont en nombre limité. Ils concernent moins ce que l'on nomme les « valeurs » (terme vague) que les enjeux anthropologiques, c'est-à-dire la conception fondamentale de l'humain. Le droit français n'hésite pas à se référer à des principes.
Quatre principes font actuellement l'accord des esprits, même si, dans telle ou telle circonstance, leur application peut poser des questions :
1. l'indisponibilité du corps humain,
2. la non-commercialisation du vivant,
3. la dignité de la personne,
4. l'autonomie du sujet et son libre consentement.
On pourrait montrer que les deux premiers principes présupposent toute une philosophie du corps, à laquelle l'Église ne peut que souscrire : celui-ci n'est pas une chose, pas une marchandise ; il participe à la dignité de la personne. Les principaux points de divergence concernent les deux derniers principes énoncés – non dans leur contenu, mais dans leur domaine d'application. Tout le monde reçoit l'impératif kantien : « Agis toujours de telle sorte que tu traites l'humanité, dans ta personne et dans celle d'autrui, toujours en même temps comme une fin, jamais seulement comme un moyen (1) ». La question est alors : à partir de quel seuil reconnaître l'humanité, la personne elle-même ? L'humanité du corps qui n'a pas encore de visage, ou un visage totalement défiguré ?
On peut être tenté de douter que le respect de la personne fasse norme lorsqu'une vie commence à peine, au stade de 8 ou 64 cellules, avant l'implantation dans un utérus, ou lorsque les conditions empiriques d'expression et de bien être semblent faire défaut. Le mot « dignité » lui-même peut prêter à des usages très divers. La dignité est-elle une propriété intrinsèque de la personne, liée à sa reconnaissance comme telle, ou un ensemble de capacités, de performances, de qualité de vie ?
L'Église n'est pas la seule à appeler à un respect de la vie en son commencement ou dans sa fin. La très subtile loi «Léonetti », qui a été votée à l'unanimité, pose que « le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie (2) ». « La dignité ne décline pas avec nos forces, la maladie n'altère pas notre humanité, pas davantage que l'approche de la mort », affirmait récemment la ministre de la santé (3). Pour l'embryon lui-même, je ne rencontre que des interlocuteurs qui reconnaissent et affirment qu'il doit être respecté. Tous ont en tête l'article 16 du Code civil selon lequel « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie ». À plusieurs reprises, le Comité consultatif national d'éthique a explicité ce principe. Ainsi, en son avis n° 8 : « L'embryon humain, dès la fécondation appartient à l'ordre de l'être et non de l'avoir, de la personne et non de la chose ou de l'animal. Il devrait éthiquement être considéré comme un sujet en puissance, comme une altérité dont on ne saurait disposer sans limite et dont la dignité assigne des bornes au pouvoir ou à la maîtrise d'autrui (4) ». Plus récemment, en 2001, dans un avis concernant l'avant-projet de révision des lois de bioéthique, il affirmait : « La position de fond défendue par le Comité consiste à reconnaître l'embryon ou le fœtus comme une personne humaine potentielle, dont le respect s'impose à tous. (5)»
C'est à partir du terme « potentiel » que vont se manifester les divergences. L'Église fait partie de ceux qui affirment que l'embryon n'est pas seulement une personne potentielle, mais une personne commencée, initiée. La non évidence de cela donne place à des divergences d'appréciation sur les transgressions possible du principe : en cas de détresse, en cas de malformation ou pour la recherche. Mais, là encore, nous ne sommes pas dans le « n'importe quoi » : les lois de 1994 et 2004 interdisent expressément la production d'embryons en vue de la recherche, de même que le clonage dit thérapeutique – a fortiori bien sûr le clonage reproductif.
Le débat, en France porte sur un enjeu bien cadré. La loi de 2004 a posé une dérogation au principe que je viens de rappeler : pendant une période de cinq ans, « les recherches peuvent être autorisées sur l'embryon et les cellules embryonnaires lorsqu'elle sont susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs et à la condition de ne pouvoir être poursuivies par une méthode alternative d'efficacité comparable, en l'état des connaissances scientifiques ». Il est précisé que cette recherche « ne peut être conduite que sur les embryons conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation, qui ne font plus l'objet d'un projet parental. »
Les termes du débat se précisent ici : faut-il maintenir ou abroger cette dérogation ? Ou encore faut-il la rendre pérenne en supprimant l'interdit lui-même ? C'est un des points qui vont être débattus dans le cadre de la prochaine révision de la loi de 2004. La demande des chercheurs porte sur des embryons conçus in vitro et qui ne font plus l'objet d'un projet parental. C'est dire qu'ils n'ont aucune chance d'être implantés et qu'ils sont voués à être détruits. C'est accorder aux notions d'implantation, de projet parental et de vie à venir un rôle décisif, les érigeant en critères d'humanité. À moins que la visée de progrès thérapeutiques ne soit considérée – je l'ai entendu – comme une manière de reconnaître l'humanité de l'embryon.
Le rôle de l’Église : poser des questions
C'est ici que le rôle de l'Église – et ce sera ma deuxième partie – est d'abord de poser des questions. D'interroger. De faire ressortir la part d'inconnu, de non savoir dans ce qui se donne dans une apparente évidence. Comme la philosophie, mais pour d'autres raisons : je pense que la foi pousse plus radicalement l'interrogation que le doute philosophique. Il y a toujours un moment où la rationalité est tentée de boucler sur elle-même, alors que la foi est radicalement, intrinsèquement, ouverture à l'inconnu.
Ici, la part d'inconnu n'est pas mince ! Qui pourrait vraiment affirmer qu'il détient la définition d'un seuil du commencement de la personne, de l'humanité, une fois que la vie a commencé ? Il n'y a pas de définition convaincante. Ni la nidation, ni le projet parental ne sont des critères suffisants. Chacun le pressent bien. Et cela pour une raison bien simple, à savoir que les notions ne sont pas du même ordre. Ni la personne ni l'humanité ne se perçoivent sous un microscope. Ce ne sont pas des notions scientifiques. Elles ne sont reconnues que dans un acte de foi, fût-ce une foi totalement séculière. Les croyants sont gardiens du non savoir : l'origine nous échappe, elle est radicalement inobjectivable. Elle ne coïncide avec aucun commencement. La différence entre « commencement » et « origine » est bien connue des philosophes. Il n'y a pas de seuil parce que la croissance de la vie, du corps, est un processus continu. « Le développement d'un individu à partir d'une seule cellule est une des manifestations les plus fascinantes et les plus mystérieuses des potentialités du vivant (6) », écrit le biologiste Jean-Claude Ameisen – qui, à ma connaissance, ne se présente pas comme catholique. Quant au critère du projet parental, souvent avancé, il ne peut pas longtemps être considéré comme un critère suffisant d'appartenance à l'humanité. Qui pourrait accepter que la volonté d'une ou deux personnes décide de l'appartenance ou non d'un être à l'espèce humaine ? Cela s'est hélas vu aux temps de l'esclavage. Qui pourrait l'accepter ? En vérité, ainsi que le déclarait Jean-Paul II, « il ne revient pas à l'homme de déterminer le seuil d'une humanité ».
Il faut donc dépasser le schéma selon lequel les chercheurs chercheraient, les scientifiques s'interrogeraient, alors que les croyants seraient bardés de certitudes, de dogmes. Et si le schéma était inversé ? N'est-ce pas parfois le monde sinon scientifique, du moins technique, qui obéit à des évidences – telle par exemple, celle qui est contenue dans la notion d'utilité thérapeutique – et le croyant qui interroge ces évidences ?
On pourrait trouver d'autres exemples. Les débats autour de la gestation pour autrui posent la question : qu'est-ce qu'une grossesse ? Que se passe-t-il pendant la gestation ? Peut-on considérer ce temps comme une parenthèse, au terme de laquelle l'enfant pourrait être rendu à ses parents d'origine ? Une naissance peut-elle faire l'objet d'un contrat ? A-t-elle un prix ? Pourquoi valoriser, dans ce cas, la filiation génétique alors que dans d'autres situations, tel le don de gamètes, elle semble passer au second plan ? À propos du don de gamètes, précisément, certaines questions sont instructives par le fait même qu'elles sont insolubles : faut-il maintenir ou non l'anonymat du donneur ? Le gamète n'est-il qu'un simple matériau, un instrument permettant une naissance, ou est-il inscrit dans une histoire, en provenance d'une personne, porteur de ses caractéristiques héréditaires, prenant place dans une généalogie ? Il est des cas où une attention sans limites à la souffrance conduit à oublier ce qui est en jeu. Dans son livre-témoignage où il pose très bien ces questions, Arthur Kermalvezen écrit : « Tout est fait pour déresponsabiliser au maximum les couples qui, à cause de leur souffrance, sont reconnaissants aux blouses blanches au point d'en oublier de penser (7) ».
Globalement, la grande question, la question de fond est : que veut dire "être humain", appartenir à l'humanité ? Cela ne signifie pas seulement appartenir à l'espèce humaine, comme à une espèce animale. Cela signifie être intégré à une histoire, reconnu, nommé. Mais nul ne pourrait prétendre que ce versant relationnel, volontaire soit suffisant. Être humain, ce n'est pas seulement être déclaré tel par d'autres êtres humains. C'est aussi, c'est d'abord avoir reçu un corps, un corps singulier. Comment tenir ensemble ces deux ordres, celui du corps, celui de la parole, sans absolutiser aucun des deux ? Comment articuler avec justesse corps et parole, en évitant de sacraliser soit l'une soit l'autre ? Comment reconnaître, en deçà de cet embranchement, la dimension donnée de la vie ? Que signifie "la vie est don"? Y a-t-il un acte ou seulement des processus derrière ce don ? Nous sommes là confrontés au non savoir. À un non savoir radical, qui est celui de l'origine. L'origine – du latin orior, se lever – échappe radicalement à tout savoir. Ce non savoir est un appel au respect. Appel au respect de ce qui est à tout le moins une vie humaine commencée, un corps humain en développement, un être humain initié.
Deux points de questionnement
Ces interrogations ne concernent pas seulement le commencement ou la fin de la vie. Pour élargir la perspective, j'évoquerai, dans une troisième partie, deux autres points de questionnement.
Les limites du principe d'autonomie.
L'autonomie du sujet, le respect de son consentement éclairé est au cœur des dispositions juridiques et du discours consensuel aujourd'hui. Que ce principe soit central, en lien avec celui de dignité, est indéniable. Mais qu'il soit suffisant, qu'il puisse être érigé en norme absolue est une autre affaire. Il doit être clarifié et complété. L'autonomie morale, telle que la définit Kant, n'est pas l'autonomie empirique ou psychologique. Elle est ouverture à l'universel et donc à des biens humains fondamentaux qui débordent la seule situation particulière. Ce principe doit donc être complété par d'autres principes, à commencer par ceux de solidarité et de bien commun. Par ailleurs, la notion de « consentement libre et éclairé » pose de nombreuses questions. Dans des situations comme le diagnostic prénatal, les personnes sont souvent dans une grande vulnérabilité. Quelle autonomie peuvent-elles exercer ? Les livrer à leur seule décision, n'est-ce pas faire peser sur leurs épaules une lourde charge ? Plus même, n'y a-t-il pas des situations où, comme le préconisait récemment la Commission nationale consultative des droits de l'homme, « la personne doit être protégée contre elle-même (8) » ? Fondamentalement, et nous touchons là plus spécifiquement aux intuitions des religieux – pas seulement chrétiens – l'autonomie de la personne est centrale mais elle n'est pas absolue. Elle renvoie à une obéissance, une réception, un don. Selon les termes de Levinas, la liberté en son fond est « une autonomie reposant sur une suprême hétéronomie (9) ».
Pouvons-nous être cartésiens jusqu'au bout ?
Chacun se rappelle le propos du Discours de la méthode selon lequel les sciences pourraient nous rendre « maîtres et possesseurs de la nature (10) ». Globalement et fondamentalement, tous les esprits éclairés perçoivent aujourd'hui le caractère irréalisable – heureusement irréalisable – de cette utopie. Mais, dans le détail, face aux questions particulières, face aux souffrances surtout, face aux nouvelles possibilités pratiques, il est difficile de poser une limite à la logique de la maîtrise. Un exemple qui est plus qu'un exemple : l'interruption médicale de grossesse. Initialement, dans les lois de 1975 et 1994, celle-ci était envisagée seulement pour « les affections d'une particulière gravité, reconnues comme incurables au moment du diagnostic ». Mais le nombre des affections pouvant être identifiées n'a cessé de croître. Parallèlement, l'intolérance à certaines déficiences ou malformations n'a cessé elle aussi de grandir. Ce qui fait que des voix s'élèvent désormais contre un risque de dérive eugénique. Même si le terme reste connoté péjorativement, la pratique risque de se mettre en place. Dès lors qu'il y a un diagnostic de trisomie 21, dans 96 % des cas, en France, est prise la décision d'interrompre la grossesse. La trisomie est pourtant loin d'être la plus grave des affections. Et il y aurait matière à réflexion sur le rejet qu'elle suscite. Plus même, des statistiques indiquent que 8% environ des interruptions médicales de grossesses ont lieu suite à un diagnostic de fente labiale ou palatine. Oui, l'intolérance à la malformation grandit. Des expressions redoutables voient le jour, comme « qualité des gamètes », « qualité de vie », « enfant de qualité ». Il y a un moment où l'accueil de la vie dans ses imperfections fait partie de la vérité de la vie. Nul ne peut se mettre à la place des personnes concernées, mais il y a une dimension collective, sociale, culturelle de la question.
Un des écueils actuels, qui se profile pour d'autres enjeux, comme la procréation à tout prix, est de vouloir tout résoudre par la médecine. C'est d'un médecin que je tiens cette idée. Non, la médecine ne peut répondre à tout, soulager toutes les souffrances. C'est moins la volonté de puissance que la compassion excessive qui est ici en jeu. Stéphane Zweig parlait de la « pitié dangereuse ». Il y a un moment où cette pitié fait oublier d'autres biens humains fondamentaux. Dans son avis 72, le CCNE affirmait : « la vraie maîtrise consiste à savoir où s'arrêter ». Selon les termes d'une jeune philosophe, « être avec n'est pas nécessairement agir (11)».
Pour finir, je réunirai trois principes fondamentaux auxquels la foi chrétienne peut nous rendre particulièrement sensibles, ou encore attentifs, ou encore vigilants. La vigilance non comme supériorité ou monopole, mais comme responsabilité. Selon les termes de Kierkegaard, « le croyant est un veilleur ».
Le premier principe sera celui de vulnérabilité. La vulnérabilité est l'envers de l'autonomie. Elle appartient intrinsèquement à la condition humaine. Il est des situations où elle se manifeste tout particulièrement. La tentation serait de vouloir la nier. Certains détournements de sens du mot « dignité » expriment cette négation. C'est au contraire à partir des situations de plus grande vulnérabilité que l'inspiration chrétienne interprète l'existence : l'enfant, le malade, le vieillard, la personne handicapée ou dépendante, l'enfant à naître. Le sort fait aux situations de plus grande fragilité sera le critère de jugement éthique prioritaire.
Le deuxième principe sera celui de l'incarnation. L'unité de la personne, ce qui veut dire du sujet et de son corps, est centrale en christianisme. Cela correspond à une intuition existentielle. L'être humain est un. C'est au cœur de la chair que souffle l'esprit. Cela est particulièrement sensible devant le visage, devant le corps d'un enfant qui vient de naître. Il n'a pas encore nos capacités, nos compétences, nos performances et pourtant nous reconnaissons en lui un être déjà spirituel (12). Comment cela ne serait-il pas déjà vrai, déjà à l’œuvre dans l'invisible du corps maternel ?
L'éthique chrétienne, catholique surtout, a du goût pour le réalisme de la vie donnée par le corps, dans le corps. La vie spirituelle, autrement dit la personne, n'est pas seulement mentale, culturelle. Le réel humain ne se réduit pas au biologique, mais il passe par lui. Il se donne à travers lui, il l'intègre. L'attention au corps oblige au dépassement du subjectif, ou à toute forme d'idéalisme. Le corps est signifiant. Le donné biologique lui-même est signifiant. L'émerveillement devant la croissance de l'embryon, puis du fœtus est la face affective de cette conscience. Comme le disait un théologien orthodoxe, « la nature est le langage le plus immédiat du créateur ». Affirmer cela ne revient nullement à sacraliser la vie. Il y a longtemps que la pensée judéo-chrétienne a appris à désacraliser la vie. On peut s'émerveiller devant la vie sans la sacraliser, c'est-à-dire sans en faire un absolu, en reconnaissant que l'essentiel est spirituel. Mais, comme le disait Péguy, « le surnaturel est lui-même charnel ».
Le troisième principe sera de dépasser le point de vue individuel. Ce qui est en jeu dans ces questions ne relève pas seulement du désir, des droits, voire des souffrances individuels. C'est le sens du lien qui est engagé, des liens interpersonnels mais aussi du lien social. Celui-ci passe par des valeurs communes, des interdits communs, des options communes. Le député Jean Léonetti souligne dans un entretien que le rapport à la personne en fin de la vie implique le sens « de la solidarité et du lien (13) ». L'enfant à naître est appelé à entrer dans un ensemble de liens : liens de parenté, d'affiliation, impliquant une structure familiale. Quelle chance aura-t-il d'avoir un père et une mère ? Une généalogie cohérente et lisible ? L'éthique implique des options non seulement sociales, mais anthropologiques.
Vulnérabilité, incarnation, sens des liens, voici trois principes dont les chrétiens n'ont pas le monopole mais auxquels leur héritage, l'inspiration reçue de leur foi les rendent particulièrement attentifs et qu'ils peuvent partager avec d'autres croyants, comme avec des non croyants.
1. Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, deuxième section.
2. Loi du 22 avril 2005, relative « aux droits des malades et à la fin de la vie ».
3. Roselyne Bachelot, audition par la Mission d'évaluation de la loi sur la fin de vie, 14
octobre 2008. La Croix du 16.10.08.
4. Annexe à l'avis n 8, 1986.
5. Avis n° 67, 2001.
6. Jean-Claude Ameisen, La sculpture du vivant, Paris, Seuil, 1999, p. 22.
7. Arthur Kermalvezen, Né de spermatozoïde inconnu, Presses de la Renaissance, 2008, p. 5.
8. Commission nationale consultative des droits de l'homme, Contribution au débat « Droit de l'homme, bioéthique et rapport au corps », Paris, 2008.
9.« L'autonomie humaine est une autonomie reposant sur une suprême hétéronomie. » E. Levinas, Difficile liberté, Paris, Albin Michel, 1972, p. 25.
10. « Nous les pourrions employer de même façon à tous les usages auxquels ils sont
propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature » Le discours de
la méthode, VIe partie.
11. Agatha Zielinski, « Avec l'autre, la vulnérabilité en partage », Etudes, juin 2007.
12. « Personne ne peut dire à quelle profondeur un cœur d'enfant peut percevoir la
réalité des choses et de l'être ». Gustave Siewert, Aux sources de l'amour. Métaphysique de l'enfance (trad. fr.), Paris, Parole et Silence, 2001, p. 135.
13. Entretien, La Croix, octobre 2008.
19:33 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans THÉOLOGIE. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite, spiritualite de la liberation, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
12/04/2009
QUAND LA SOLIDARITÉ DEVIENT UN DÉLIT.
QUAND LA SOLIDARITE DEVIENT UN DELIT.pdf
A lire pour militer avec nous afin que la dignité humaine soit respectée.
Vos manifestations et vos signatures nous aiderons grandement dans notre combat quotidien.
Merci.
Bruno LEROY.
http://www.delinquants-solidaires.org/
20:53 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans MILITANTISME. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite, spiritualite de la liberation, catholique, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
10/04/2009
JAZZER LA VIE.
Stiguibat-Un Quartet Atypique, un jazz Eclectique.mp3
19:45 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, catholique, spiritualite, action sociale chretienne, spiritualite de la liberation | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
VIVRE L'INSTANT PRÉSENT.
Vous êtes dans votre cuisine et préparez le repas du soir. Mais votre esprit est envahi par mille réflexions qui vous ont agacé au travail dans l’après-midi, alors que vous étiez en réunion.
Stop ! Respirez. Revenez à ce que vous faites. Sentez le parfum des légumes que vous êtes en train d’éplucher, regardez les couleurs dans la cocotte, écoutez la musique qui s’échappe de votre salon et réjouissez-vous : vous êtes sur le point de dîner avec ceux que vous aimez. Rien d’autre à vivre en ce moment, alors profitez-en. Revenir à vos sensations corporelles vous y aidera.
Pourquoi vous inquiéter de ce qui a été, ailleurs, et sur lequel vous n’avez plus aucune prise ? Hier est passé, demain est un autre jour. Vous verrez bien alors de quelle énergie vous disposez pour améliorer vos relations, ou finaliser votre travail.
Entre-temps, vous serez différent, les autres aussi, et la réalité à affronter sera forcément nouvelle. D’apparence facile, ce petit exercice repose en réalité sur le socle fondamental des sagesses les plus anciennes, de la philosophie grecque au bouddhisme, et sur les dernières découvertes en psychologie positive, des thérapies cognitives à la méthode Vittoz : « vivre l’instant » y apparaît comme la solution à la plupart de nos problèmes, et l’un des moteurs les plus puissants pour accomplir ce que nous voulons. Encore faut-il savoir ce que l’expression recouvre. Car au fil des décennies de notre « hypermodernité », le terme a pris différentes significations.
Lutter contre le stress et l’anxiété, rien à voir avec le carpe diem joyeux, créatif et… gaspilleur des années 1970. « À l’époque, c’était cool de vivre au jour le jour », comme le rappelle avec ironie la publicité pour un groupe d’assurances. En photo sous ce slogan, une jeune hippie visiblement frappée d’inertie et d’insouciance. Triomphait alors « la culture du « tout, tout de suite », sacralisant les jouissances sans interdits, sans préoccupations des lendemains », comme le rappelle le philosophe Gilles Lipovetsky. Ces temps heureux de la croissance économique, du consumérisme tous azimuts nous laissaient croire que « le présent avait réussi à canaliser toutes les passions et les rêves ». Le vivre pleinement revenait donc à le dépenser, à se dépenser, à dépenser tout, puisque nos ressources semblaient illimitées. Très vite, les temps ont changé. « À partir des années 1980 et surtout 1990, un « présentisme » de seconde génération arrive, poursuit Gilles Lipovetsky.
Une certaine insouciance des jours a vécu : c’est dans l’insécurité que se vit, de manière croissante, le présent. » Celui-ci devient alors un formidable outil anti-angoisse. Le monde étant plus menaçant (récession économique, montée du terrorisme, grandes épidémies…) et la vie de chacun un espace plus menacé, l’ici et maintenant, sésame venu d’Asie, permet aux Occidentaux désorientés de traverser les zones d’incertitude et les épreuves.
Construire l’avenir et exister Aujourd’hui, dans nos années 2000, notre capacité à vivre le présent semble prendre encore une nouvelle couleur. « La priorité de l’après sur le tout de suite domine », analyse Gilles Lipovetsky. Nous avons pris conscience que les ressources de la planète n’étaient pas infinies, que notre santé reposait sur une prévention à long terme, que l’avenir des générations futures naissait ici et maintenant. Nous faisons des choix conscients dans le présent (circuler à vélo, manger bio, éviter de prendre l’avion…) pour mieux préparer l’avenir. Et puis « nous vivons une contraction du temps jamais expérimentée jusque-là, explique le prospectiviste Thierry Gaudin, en étant passés à la nanoseconde.
Certaines machines vont aujourd’hui plus vite que nos neurones. Ajoutez à cela les nouveaux moyens de communication – téléphone, ordinateur portable –, où l’on peut être à la fois présent et absent à ce que l’on vit… Nos personnalités sont éclatées. Il y a urgence pour nous à travailler à être présents ». Être présents à soi et au réel pour ne pas être emportés dans une vie dépourvue de sens, tel est l’enjeu. Il peut paraître simple, mais il s’atteint à travers une certaine forme d’ascèse. Nos esprits étant sans cesse « en promenade », balancés entre nos impressions du passé et nos rêves d’un avenir meilleur (le syndrome « passe ton bac d’abord » ou « quand je serai grand » dans lequel nous avons été programmés), nos préjugés et nos croyances, nous courons sans cesse le risque de laisser échapper le réel, et donc la vie. Il nous faut une profonde intériorité pour vivre l’instant présent. Il nous faut la Force incommensurable de la prière pour entrer dans un cœur à cœur avec Dieu et ne point vivre à la surface de nous-même.
Cela représente le combat spirituel de ce siècle. Il est indispensable pour nous forger un esprit ancré dans l’existence. Pour prendre possession de notre temps et l’habiter. Pour ne plus vivre à côté des autres, de nous et de Dieu.
Donner un Sens au temps qui passe, c’est le respirer à plein poumons, même si celui-ci n’est pas toujours radieux. Il nous fait accueillir les imprévus de Dieu Amour et de la Vie dans sa quintessence.
Bruno LEROY.
19:13 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans CHRONIQUE DE BRUNO LEROY. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, catholique, spiritualite, action sociale chretienne, spiritualite de la liberation | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
09/04/2009
GUY GILBERT PRÊTRE ÉDUCATEUR.
Avec la bergerie de Faucon, dans les Hautes-Alpes, le père Guy Gilbert propose une alternative de prise en charge de mineurs multirécidivistes. Accompagnés d’éducateurs, six d’entre eux passent deux ans à s’occuper d’animaux… --- Dans le cadre de la réforme de la justice des mineurs, l'Unicef-France donne la parole à des personnalités et experts de renom sur cette question fondamentale de société. Retrouvez chaque semaine deux nouvelles interviews sur http://www.unicef.fr
20:46 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans TÉMOINS DE CE TEMPS. | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : christianisme, catholique, foi, spiritualite, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |
CETTE CULTURE DE VICTIMISATION.
La culture de victimisation dans laquelle nous vivons, nous fait craindre aveuglément les jeunes devenus violents. Des conférences, des réunions, des ministres déconnectés essaient de comprendre ce problème de violence. Sans toutefois, trouver des solutions effectives.
Ces violences semblent récentes et pourtant, elles datent de plusieurs années déjà sans qu’on s’en préoccupa. Nos jeunes en ont marre de vivre dans cette société aseptisée. La drogue est malheureusement une réponse à l’existence de cons des adultes amorphes. Ils nous crient du fond de leur être, qu’ils sont l’avenir de nos sociétés. Ils attendent des réponses d’adultes vrais et authentiques. Ils n’ont que le langage de bois en retour.
Les jeunes sont de plus en plus violents et nous sommes entièrement responsables. Ils répondent par la violence parfois abominablement destructrice face à une société qui les violente constamment...Nos sociétés libérales où les gagnants prennent le pas sur les perdants, fragilisent le psychisme de nos ados. Il ne faut pas s’étonner que la cause de mortalité prioritaire soit, le suicide. Que pensons-nous faire pour endiguer ce malaise social ? Avant de les juger, cherchons la part de cristal qui les habite, pour mettre à profit leurs potentialités.
Voyons ensemble le monde possible à construire avec des adultes ayant une cohérence de vie qui leur donnera une colonne vertébrale solide. Sachons également leur dire " NON ", ce principe essentiel éducatif qui permet les repères. Soyons des hommes et des femmes debout qui ne craignent plus leurs Jeunes mais, les aime inconditionnellement en leur originalité. Ces quelques bases changeraient le visage de nos sociétés. Puissions-nous engager maintenant des actes qui seront porteurs, pour eux !
Mais de grâce, cessons de jouer aux victimes. Cette pensée négative et ce comportement victimaire que nous arborons depuis des années n’aide personne et surtout pas les Jeunes qui attendent autre chose que des pleurnichards adultes qui, ne pensent qu’à leur petite vie mesquine. Cessons d’avoir peur de tout et de rien. Le Monde ne se construit pas avec des trouillards mais des hommes ayant une confiance sans mesure en l’Avenir, notamment des Jeunes.
Bruno LEROY.
20:20 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans CHRONIQUE DE BRUNO LEROY. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite, spiritualite de la liberation, action sociale chretienne | Imprimer | | del.icio.us | | Digg | | Facebook | |