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01/09/2006

LE TEMPS DE L'ABSENCE.

Un homme est sur le départ, il s’apprête à un grand voyage. Il convoque ses serviteurs et leur confie ses biens. Nous ne savons pas exactement s’il répartit l’ensemble de ses biens entre ses serviteurs, mais il est clair qu’il leur donne à chacun une vraie fortune ! Même celui qui n’a qu’un seul talent n’est pas lésé.

Sans doute est-ce là une équivoque à dissiper sans tarder : ne mésinterprétons pas le sens du mot talent. Dans la parabole, le maître du domaine donne de l’argent à ses serviteurs ; il ne leur donne pas des capacités ni des aptitudes particulières, ce que nous appelons des talents. Au contraire, Jésus nous dit que ces hommes reçoivent « chacun selon ses capacités ». Le maître les reconnaissait capables de gérer cet argent car il ne leur donne aucune consigne et part sans laisser la moindre recommandation. D’ailleurs, les serviteurs prouvent que leur maître ne s’est pas trompé puisque « aussitôt » ils se mettent à l’ouvrage.

Vient alors le temps de l’absence du maître, celui où les serviteurs sont livrés à eux-mêmes. On les voit s’activer, particulièrement le troisième. Il creuse et il enfouit le trésor, dans le but de le restituer plus tard. Nous comprenons alors qu’un problème apparaît. Le maître comptait sur une compétence de ses serviteurs immédiatement exploitable pour faire fructifier son bien. Voici que l’un d’entre eux n’agit pas selon sa capacité… Que se passe-t-il ?

Le maître revient finalement de son long voyage. Il prend enfin la parole, pour le troisième mouvement de l’histoire, celui de la rétribution. Le dernier serviteur n’est pas félicité. Remarque que, lorsqu’il prend la parole, il n’évoque pas de relation entre son maître et lui : il se contente d’un portrait sévère. Il décrit son maître comme un « homme dur », qui moissonne là où il n’a pas semé et ramasse là où il n’a pas répandu le grain. Puis, clé de l’histoire, il avoue : « j’ai eu peur ».

Le maître prend à son tour la parole et confirme les observations du serviteur : « tu savais ». « Tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je n’ai pas répandu ». Mais le cœur de la comparaison n’est pas repris par le maître. Il ne se reconnaît donc pas dans l’ « homme dur ».

Ces deux éléments sont à mettre en lien. La peur a déformé le visage du maître aux yeux de son serviteur. Il a vu en lui un « homme dur », alors qu’il ne l’est pas ! Le troisième serviteur représente ainsi l’homme blessé par le péché, c'est-à-dire chacun de nous, dont la perception de Dieu est déformée. Les conséquences du péché empêchent de voir la tendresse de Dieu. Le serviteur se voit comme un esclave aliéné par un tyran. En rendant le talent qu’il a reçu, le pauvre homme cherche à se libérer de la dette de l’existence, pour être quitte avec son maître. Un peu comme un pécheur désirerait rendre sa vie et les richesses qu’il a reçues et fuir de devant la face du Seigneur. Ainsi le serviteur cherche à quitter son statut et se présente comme un simple mercenaire, un homme embauché pour une tâche mais qui bientôt partira.

Là est sans doute le drame le plus intense du péché. Le plus terrible en effet n’est pas dans l’éloignement de Dieu mais dans l’incapacité à voir qu’un retour est possible, un vrai retour, dans la plénitude l’amitié du Seigneur ! Seigneur ouvre nos yeux aux merveilles de ton amour, montre-nous ta douceur et nous cesserons d’errer dans nos solitudes. Ouvre-nous les portes de ta maison, que nous redécouvrions la joie d’être des fils.


Frère Dominique

20:55 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

Pourquoi le religion catholique nous culpabilise t-elle avec le péché ?


Dans une approche psychologique, on peut faire l’hypothèse que la morale, édictée par la société, par la civilisation, a comme fonction d’agir sur le mécanisme inconscient de la culpabilité pour contrôler les pulsions des individus qui peuvent être dangereuses pour la collectivité.

Or, la religion en tant qu’institution, dans la mesure où elle s’inscrit dans la société, ne peut pas ne pas se laisser imprégner par elle. Force est même de constater que souvent elle a tendance dans son discours à l’amplifier.
Elle donne alors l’impression de se réduire à une leçon de morale. Et surtout, de juger, de condamner l’individu. Son rôle semble être de culpabiliser l’individu. C’est terrible ! Quel contre témoignage !

Il faut dénoncer tout ce qui empêche l’homme de construire son avenir et d’en prendre la liberté. L’important c’est demain. Dans la Bible, Dieu oublie le passé pour donner aujourd’hui une chance à l’homme. L’homme attend des paroles de foi : qui d’autre que Dieu peut avoir confiance en l’homme ?
Jésus est cette personne qui dans sa parole s’adresse à moi pour me redonner ma chance. En cela, je découvre son amour. Sa parole me libère. Elle ne se réduit pas à un catalogue de maximes moralisatrices. Au contraire. Elle interroge, remet en cause tout discours, y compris « la morale », à partir du moment où il enferme l’homme dans son passé et l’empêche de se réaliser dans sa liberté de « devenir homme ».
L’Église doit être très vigilante dans sa communication pour ne pas être maladroite, surtout dans cette société dite de communication. Tout va très vite. Elle me donne parfois l’impression de ne pas prendre compte des changements et de continuer à parler au monde comme si nous étions encore hier.
A-t-elle vraiment compris que l’homme a changé, qu’il ne pense pas de la même manière, qu’il ne veut pas en particulier qu’on pense à sa place ? D’où un formidable décalage et un terrible « malentendu » à propos de cette parole d’amour qu’elle porte en elle et dont elle a mission d’adresser à tout homme dans le monde. Elle n’est pas « contre » mais « avec » l’homme pour construire avec lui son avenir qui reste à découvrir. Quelle aventure !

10:34 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

30/08/2006

LA PÂQUE ET LA...PAROUSIE.

Jésus prépare ses disciples à son départ ; plus précisément il leur enseigne, à travers trois paraboles, l’attitude qu’ils auront à adopter au cours de la période intermédiaire entre sa Pâque et la Parousie. C’est dire si ces enseignements nous concernent, puisqu’ils définissent le comportement du croyant tout au long du temps de l’Eglise. Tout se résume en fait en un seul mot qui ouvre l’exhortation de Notre-Seigneur et martèle tout son développement : « Veillez ». La raison de cet appel impératif à la vigilance est simple : nous n’avons aucun moyen de prévoir le jour et l’heure du retour du Fils de l’homme. Nous savons seulement avec certitude qu’il viendra à l’improviste, au moment où nous ne nous y attendons pas. Il nous surprendra même comme un voleur surgissant dans la nuit alors que tout le monde est profondément endormi.
Les trois paraboles que nous propose Jésus vont préciser de manière imagée tout aussi bien la nature de ce « sommeil » que l’« habitus » à mettre en place pour ne pas y succomber et « veiller ». La première mise en scène nous parle d’un maître de maison qui part en voyage après avoir confié la charge de son personnel à un serviteur choisi en raison de sa fidélité. Deux chemins s’ouvrent devant celui-ci : ou bien il honore la confiance de son maître en obéissant à ses ordres quelle que soit la durée de son absence ; ou bien il se laisse tenter par la séduction de l’autonomie, et ne tenant plus compte de la mission que le maître lui a confiée, il se disperse dans des activités peu louables. Sans doute ne bascule-t-il pas d’un seul coup dans l’infidélité : il commence par frapper un de ses compagnons après un repas trop bien arrosé. Puis, comme son acte ne suscite aucune sanction ni réprobation, il multiplie insensiblement ses écarts, jusqu’à s’enliser dans une vie de désordre dont il ne parvient plus à s’extirper. Il compte sur le retard de son maître pour remettre à demain la conversion salutaire, sans vouloir s’avouer qu’il est déjà aliéné par ses mauvaises habitudes sur lesquelles il n’a plus autorité. Aussi lorsque son maître surgit à l’improviste - « le jour où il ne l’attend pas et à l’heure qu’il n’a pas prévue » - ne lui reste-t-il plus que la honte du désaveu et le remords de son mauvais choix.
Il serait précieux de pressentir ce qui déterminera l’orientation du serviteur. Certes ses fragilités personnelles entreront en jeu ; mais fondamentalement, c’est sa relation au maître qui décidera du chemin sur lequel il s’engagera. Si cette relation est droite, fondée sur le respect de la parole donnée ; s’il s’agit d’une relation d’amitié qui l’unit à son maître, il ne pourra opter que pour la première solution puisque l’éloignement géographique ne rompra pas leur relation.
Par contre si la relation entre le serviteur et le maître est ambigüe, si elle est entachée de rivalité, empoisonnée de ressentiments, le risque est grand que le serviteur cherche à prendre sa revanche par rapport à son maître et à régler ses comptes avec lui en s’affranchissant de ses engagements. C’est pourquoi il sera mis « parmi les hypocrites », puisqu’il n’exerce pas la charge d’intendant alors qu’il en revendique le titre et les pouvoirs.
La leçon est claire : seuls ceux qui se sont engagés avec le Seigneur Jésus dans une relation d’amour droite et sincère, pourront persévérer dans la fidélité jusqu’à son retour. « C’est lui en effet qui nous fera tenir solidement jusqu’au bout » de manière à ce que « nous soyons sans reproche au jour de son avènement » (cf. 1ère lect.). « Car Dieu est fidèle, lui qui nous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus-Christ notre Seigneur » (Ibid.) : à ceux qui accueillent son Alliance, il donne l’Esprit qui nous garde unis à Jésus « tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).

« Seigneur tu connais notre faiblesse : l’inertie de la chair et les soucis de la vie nous entraînent malgré nous à oublier le but de notre vie. Laissant notre vigilance s’émousser, nous nous endormons spirituellement, et perdons de vue la mission que tu nous as confiée le jour de notre baptême. Peu à peu, nous nous laissons "récupérer" par l’esprit du monde et cédons à la convoitise de l’avoir, du pouvoir, de la gloire, qui nous aveugle au point de bafouer les droits de nos frères. Que ta Parole nous réveille, que ton Esprit Saint nous donne la force de nous arracher à nos complicités avec “le père du mensonge” (Jn 8, 44), et que ta grâce nous apprenne à "te bénir chaque jour et à louer ton nom toujours et à jamais" (Ps 144). Nous serons alors dignes de faire partie du "peuple saint, qui en tout lieu invoque le nom de notre Seigneur Jésus-Christ" (1ère lect.), dans l’attente du Jour où se révélera pleinement sa gloire. »


Père Joseph-Marie

21:19 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

Si Dieu est bon, pourquoi permet-il le mal?


Pourquoi permettons-nous le mal?

Je n’aime pas trop cette manière de poser la question! Car Dieu se révèle au contraire à l’homme comme celui qui interdit le mal: pensons aux premiers chapitres de la Genèse, à l’accent des prophètes d’Israël, au Décalogue… Et si Dieu interdit le mal, c’est justement que le mal fait du mal à l’homme, ce que Dieu, qui est bon, ne veut à aucun prix. Dieu n’a pas de complicité avec la mort. Il me semble donc que c’est plutôt à nous que la question doit d’abord être posée: pourquoi permettons-nous le mal? pourquoi nous le permettons-nous?
Et nous voici renvoyés à notre propre liberté personnelle et à ces grandes infrastructures collectives – économiques, financières, politiques – qui entretiennent dans le monde, avec notre complicité active ou passive, l’injustice, le malheur, la mort. Pourquoi écoutons-nous si peu, si mal, la voix qui nous dit, au plus intime de notre conscience et dans les textes saints des traditions religieuses : «Choisis la vie, et tu vivras».

Quand on a affirmé cela, on peut alors faire rebondir la question, mais en d’autres termes : n’allons-nous pas être tentés de désespérer, en constatant notre impuissance à transformer ces structures de malheur, hors de nous, et cette volonté fragile et rebelle, en nous? Et puis il n’y a pas que le mal commis par les hommes. Il y a le mal subi, ces malheurs cosmiques, tsunamis ou typhons, qui brusquement nous rappellent que nous ne sommes pas maîtres de la nature. C’est alors qu’apparaît à mes yeux la profondeur de la foi chrétienne. Elle ne nous donne pas de réponse à la question douloureuse : pourquoi le mal dans le monde? Que pèserait une explication devant la mort d’un enfant? Mais ma foi me dit trois choses.

Se libérer de la tentation

La première, c’est que même si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur, lui qui connaît tout. La manière dont l’Evangile nous parle des forces du mal nous fait pressentir un «mystère d’iniquité» qui nous déborde. L’appeler «péché originel», le mettre au compte de celui que l’Evangile appelle «homicide et menteur dès l’origine», ce n’est pas résoudre la question, ni même l’expliquer. Mais c’est nous libérer de la tentation et de la prétention de ramener le mal à notre mesure, de vouloir le surmonter par nos seules forces, de nous ériger en juges suprêmes de la conduite de nos frères, ou de la nôtre propre.

Un oui d'amour et de liberté

La seconde, c’est qu’il est arrivé quelque chose au mal depuis que Jésus l’a affronté sur la croix. Il est descendu dans les profondeurs de la violence subie, de l’accusation injuste, de la lâcheté complice – pensons à son procès - . Il est descendu dans la profondeur de la souffrance et de la mort. Pas pour faire une victime de plus, mais pour déposer, en ce fond sans fond, un oui d’amour et de liberté. Pour transfigurer le lieu du mal radical en un lieu où le pardon et l’amour demeurent possibles. Pour que resurgissent, de ces profondeurs, la Vie qu’elles avaient trahie, détruite, niée. Armés de cette certitude, nous pouvons engager le combat, personnel et collectif, contre les forces du mal. L’amour aura le dernier mot.

Jésus nous montre un chemin

La troisième en effet, c’est que Jésus nous montre un chemin. Le mal est pour chacun d’entre nous, comme il l’a été pour lui-même, un appel à nous engager pour soulager la souffrance de ces prochains dont nous décidons de nous faire proches. La question devient alors : «auprès de qui vais-je décider, avec la force de l’Esprit et à la manière du Christ, de lutter contre le mal?»

Marguerite Léna

10:45 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

Pourquoi les chrétiens se méfient-ils du plaisir ?


Dans la Bible, le plaisir et le désir ont leur place. Le sexe aussi ! Relisons le Cantique des Cantiques.
Le Dieu de la Bible est celui qui reconnaît le plaisir en l’homme et qui l’invite à de se délivrer de ce qui l’empêche d’être homme, complètement homme.

« Invente l’amour » dit Dieu à l’homme. Dieu se laisse connaître, or connaître, c’est inventer. C’est un Dieu libérateur, qui oublie le passé, et pardonne, car, pour lui, l’important c’est demain. La Bible est l’ouverture à demain. Pour un monde où il puisse être heureux, complètement heureux dans sa vie et dans son corps.
Or la donne a changé radicalement avec les dernières évolutions dans les domaines comme la biologie et la médecine. Ne faut-il pas penser autrement ?
Les « solutions » d’hier ne sont plus « opérationnelles ». La modernité oblige l’homme à ré-inventer le mot « amour ». N’est-ce pas aussi une question de foi ? Encore faut-il accepter l’inattendu de l’homme, ne pas savoir où on va, prendre le risque de se tromper, et, comme dans le plaisir, si j’ose dire, « perdre pied » ! Ce qui fait évidemment peur. Ce que toute institution supporte difficilement. Mais c’est la vie ! Mais l’Église est devenue perméable, au début du Moyen Age, à une philosophie qui condamnait le plaisir.
C’est très dur aujourd’hui de s’en dégager. Pour retrouver une liberté de parole qui parle au cœur de l’homme d’aujourd’hui, elle doit retrouver l’homme dans ce plaisir de vivre et d’inventer un autre « sujet » d’amour dans un monde

10:12 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

L'HYPOCRISIE DES PHARISIENS.

Avec l’évangile, nous terminons notre progression à travers les invectives de Jésus aux pharisiens.
Jésus continue à dénoncer leur hypocrisie : « Vous ressemblez à des sépulcres blanchis à la chaux : à l’extérieur, ils ont une belle apparence, mais l’intérieur est rempli d’ossements ». Autrement dit : « Vous êtes sans le savoir porteur de la mort et cela est visible à la façade que vous vous donnez. Loin de tromper les apparences, votre blancheur extérieure, faisant penser aux sépulcres blanchis, met au contraire en évidence votre intérieur mortifère ».
C’est bien l’inflexion des pharisiens vers la mort et non pas vers le Royaume que Jésus dénonce ici. Voilà comment ils se sont fermés les portes du Royaume des cieux.

Et le comble est que par cette apparence blanchie, privée des couleurs de la vie, ils répandent autour d’eux la mort qu’ils portent en eux-mêmes. Voilà l’essence de la seconde apostrophe que Jésus leur adresse. Avec elle, les invectives du Maître atteignent un sommet : « Vous témoignez ainsi contre vous-mêmes que vous êtes les fils de ceux qui ont assassiné les prophètes ».

Cette accusation d’homicide repose, d’une part, sur une action et, d’autre part, sur des paroles. D’un côté, les pharisiens bâtissent « les sépulcres des prophètes » et décorent « les tombeaux des justes » ; d’un autre, ils disent : « Si nous avions vécu aux jours de nos pères, nous ne nous serions pas joints à eux pour verser le sang des prophètes ».
En fait, ce n’est pas en tant que fils de leurs aïeux que les pharisiens se retrouvent homicides, mais c’est parce qu’ils sont homicides que l’on peut reconnaître en eux les descendants de leurs pères.

L’hypocrisie résulte ici dans l’hommage apparent rendu aux prophètes assassinés par les pères. En effet, pourquoi construire ou décorer les tombeaux des prophètes ? Pour honorer les prophètes ou pour se disculper d’être comme ses pères ? En réalité, Jésus accuse les pharisiens de détourner l’honneur rendu aux prophètes au profit de leur déclaration d’innocence, laquelle va de pair avec la condamnation de leurs pères. Autrement dit, chez les pharisiens, la disculpation appelle l’inculpation.
Celui qui ne reconnaît pas son péché se retrouve dans l’obligation de l’attribuer à un autre. L’accusation ici se double d’un mensonge et tout mensonge dissimule une volonté de meurtre. Voilà l’homicide !

A l’inverse d’une telle attitude, faisons notre cette supplication de saint Augustin que nous fêtons aujourd’hui et qu’il adresse au Seigneur dans un passage de ses Confessions : ‘‘ La maison de mon âme est étroite pour vous recevoir, élargissez-la. Elle tombe en ruines, réparez-la. Çà et là elle blesse vos yeux, je l’avoue et le sais; mais qui la balayera ? A quel autre que vous crierai-je : « Purifiez-moi de mes secrètes souillures, Seigneur, et n’imputez pas celles d’autrui à votre serviteur (Ps XVIII, 13-14)?» « Je crois, c’est pourquoi je parle; Seigneur, vous le savez (Ps CXV, 10). » « Ne vous ai-je pas, contre moi-même, accusé mes crimes, ô mon Dieu, et ne m’avez-vous pas remis la malice de mon cœur Ps XXXI, 5)? » « Je n’entre point en jugement (364) avec vous qui êtes la vérité (Job IX 2,3).» « Et je ne veux pas me tromper moi-même, de peur que mon iniquité ne mente à elle-même (Ps XXVI, 12).»

Frère Elie

10:08 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

28/08/2006

JEAN-BAPTISTE LE TÉMOIN.

Nous le savons bien, l’esprit du monde n’est pas celui de l’évangile ; la vie dans l’Esprit ne souffre aucune compromission avec les affaires du monde. Aussi la vie de saint Jean-Baptiste nous trouble-t-elle quelque peu. Il est unique (sanctifié dès le sein de sa mère) et exemplaire (la liturgie nous donne souvent de le fréquenter et elle célèbre même sa nativité), mais il est gênant. Il est tellement soumis à l’Esprit Saint, qu’il se retire du monde et vit au désert, qu’il se vêt de peaux de bête et se nourrit de sauterelles. Est-ce vraiment là l’idéal du chrétien ?

Et, au jour où nous faisons mémoire de son martyre, la question se fait plus pressante. Avons-nous à suivre de si près le saint pour lequel Jésus manifeste une telle admiration ? Autrement dit, pour être vraiment chrétienne, notre vie doit-elle se résumer à une longue ascèse couronnée par une mort violente ?

Bien entendu, nous sommes tous uniques et sujets d’une alliance particulière. Mais la question ne peut être gommée par un simple « chacun sa voie », car les saints sont tous un reflet du visage du Christ dans lequel nous avons à lire la grandeur du mystère de la rédemption. Chacun d’eux nous parle personnellement de ce que nous devons aspirer à vivre, quel que soit notre état de vie ou notre sensibilité.

Mais, avant d’abandonner nos maisons pour courir au désert, commençons par nous rappeler que la vie de Jean-Baptiste ne se résume pas à une série héroïque de sacrifices préparant et annonçant le sacrifice ultime de sa vie. Jean-Baptiste est avant tout celui qui a su discerner la présence du Christ au cœur du monde. Au jour du baptême du Seigneur, parmi une foule nombreuse, Jean-Baptiste est le seul qui a reconnu le Messie ! Et il l’a annoncé : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Le point culminant de sa vie est là, l’exemple qu’il nous donne est celui-là. Tout le reste, même sa mort, accrédite le caractère prophétique de cette parole. C’est ainsi que nous avons à reconnaître le chrétien : sa proximité continuelle avec le Christ, la familiarité avec Jésus qu’il entretient précautionneusement chaque jour, lui permet de discerner la présence du Seigneur dans le monde et d’en témoigner.

Cette proximité est le fruit d’une ascèse certaine, d’efforts et de renoncements. Mais ils ne sont pas vécus comme tels. Personne n’a de résistance à quitter un bien pour un meilleur. Il est naturel aux baptisés d’orienter leur vie en fonction de sa source et de son terme. Or cette capacité, personne ne se la donne. Elle est offerte à ceux qui ont fait un choix pour le Christ, dont ils sont prêts à répondre à chaque instant de leur vie. Un choix inconditionnel, comme celui que fit Jean-Baptiste dès le sein de sa mère.

Malheureusement, nous avons tous fait l’expérience des limites de notre choix. Nous suivons le Seigneur jusqu’à ce qu’un événement nous révèle les conditions, inconscientes souvent, que nous avions posées. Préserver sa vie peut en être une. Ainsi méditer sur le sort de Jean-Baptiste peut nous révéler jusqu’où nous acceptons que notre vie soit mise en danger par notre appartenance au Christ. Plus probablement, cette méditation peut révéler que les conditions que nous posons sont bien en deçà d’un tel héroïsme : suivre le Christ, oui mais à condition que cela ne nuise pas à ma famille, à condition que cela ne me sépare pas de mes amis, à condition que je continue à faire ce que je veux, etc.

Plus généralement, on parlera de chrétiens « libéraux », ou « modérés », quelque fois on invoquera « la sagesse ». Comme si l’amour se négociait. Comme si les témoins comme Jean étaient une élite jouissant de grâces particulières pour une mission extraordinaire et inégalable. Oui, ils ont une place unique. Mais ne négligeons pas, par exemple, que nous ne savons rien de ce que Jean-Baptiste a pensé pendant ces événements dramatiques. Comment les a-t-il vécus ? Nous ne sommes pas assurés qu’il jouissait de la calme assurance du devoir accompli. Jésus a connu l’angoisse à Gethsémani, pourquoi Jean-Baptiste ne l’aurait-il pas connue dans sa prison ?

Ce n’est donc certainement pas un surhomme, désincarné et invulnérable, que nous vénérons aujourd’hui. Nous faisons mémoire de Jean, le Baptiste, témoin de Jésus-Christ, serviteur de l’Agneau par sa vie et par sa mort, un homme qui a montré jusqu’à l’oubli de soi que sa seule volonté était de servir le Seigneur, un homme qui a entendu la voix de l’Époux et qui en a fait un écho dans chaque instant de sa vie. En somme, un chrétien.

Saint Jean-Baptiste, vois notre faiblesse et intercède pour nous, afin que nous sachions retrouver la radicalité de la vie évangélique ; afin que nous redécouvrions la vraie sagesse, qui est de toujours vivre en fidélité avec l’évangile ; prie pour nous, afin que nous portions, là où le Seigneur nous a plantés, les fruits de sainteté agréables à Dieu notre Père.


Frère Dominique

22:02 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

27/08/2006

CONSENTIR A LA LOGIQUE DE L'AMOUR.

Les invectives de Jésus contre les scribes et pharisiens ne sont pas des malédictions, mais constituent une longue lamentation de Notre-Seigneur sur leur religiosité à ce point formelle qu’elle en est devenue une caricature de la foi. Celle-ci en effet ouvre les portes du Royaume des cieux, alors que leur doctrine compliquée les « ferme à clef devant les hommes ». Or la seule attitude qui peut empêcher d’accéder au salut, est le refus de le recevoir, et de le recevoir tel qu’il se donne, c'est-à-dire gratuitement. Ce que Jésus reproche donc implicitement aux chefs religieux de son époque, c’est de vouloir mériter le salut. Hélas une telle attitude, qui prétend « libérer » l’homme de la dépendance servile d’un Dieu dont il serait éternellement redevable, l’enferme tout au contraire dans la prison de la solitude ; elle le « voue à la géhenne », ou en d’autres termes : elle le condamne à l’absurdité d’une vie insensée. Car Dieu nous a créés « vers lui » (S. Augustin), de manière à ce que nous puissions nous jeter dans les bras qu’il nous tend, dans un élan filial de reconnaissance ; et trouver en lui, dans l’étreinte d’amour à laquelle il nous invite, notre accomplissement et notre béatitude éternelle : « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi » (S. Augustin, Confessions, I, 1).
Le bonheur pour l’homme créé à l’image de Dieu, est de consentir à la logique de l’amour ; logique du don réciproque et de la dépendance mutuelle délibérément choisie. Le malheur - tous nos malheurs - procède du refus de cette finalité surnaturelle de notre existence, et de l’enfermement dans l’immanence de notre vie naturelle. De plus, la négation de la transcendance du Dieu de la Révélation conduit tôt ou tard à l’idolâtrie de la création et aboutit à la théurgie (auto-divinisation de l’homme). L’actualité de ce constat n’est hélas plus à souligner : l’athéisme du début du XXe s. n’a pas tardé à se transformer en anthropothéisme triomphant. Mais ce processus n’aurait pas pu s’enclencher, si la foi au Dieu de la Révélation biblique ne s’était pas réduite à un simple déisme ; si le christianisme d’un grand nombre ne s’était pas dégradé en une religiosité formelle ayant perdu son âme, ne vivant plus de la relation d’amour avec le Christ Jésus, reconnu comme Seigneur et Sauveur.
C’est ce genre de dérive que dénonce Notre-Seigneur dans ses invectives adressées aux scribes et pharisiens : leur intérêt est passé subtilement de « Celui qui siège dans le Temple sur le trône divin » - allusion à la vision du Dieu trois fois saint, c’est-à-dire absolument transcendant d’Isaïe (Is 6, 1-4) - à ce qui est posé en offrande sur son autel. Sans doute Jésus fustige-t-il la convoitise de ses interlocuteurs que l’appât du gain rend « insensés et aveugles » ; mais l’allusion à la sacralité des offrandes semble inclure une dénonciation de l’idolâtrie des créatures. Celles-ci n’ont en elles-mêmes aucun caractère « sacré » et ne méritent aucunement qu’on s’y attache. Ce n’est que lorsqu’elles sont perçues comme des dons de Dieu pour lesquels nous lui rendons grâce sur l’autel de notre cœur, dans le temple de notre intériorité, que ces mêmes créatures prennent une valeur « religieuse » - au sens où elles nous relient à Dieu, source de tout bien.
Dieu seul est saint ; lui seul est digne de notre louange, de notre adoration ; à lui revient tout honneur et toute gloire. C’est par lui que subsistent toutes choses, qui reçoivent à chaque instant de lui « la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17, 28). Tout l’univers proclame « sa puissance éternelle et sa divinité. Ils n’ont donc pas d’excuse ceux qui ont connu Dieu sans lui rendre la gloire et l’action de grâce que l’on doit à Dieu. Ils se sont laissés aller à des raisonnements qui ne mènent à rien, et les ténèbres ont rempli leurs cœurs sans intelligence. Ces soi-disant sages sont devenus fous ; ils ont changé la gloire du Dieu immortel contre des idoles représentant l’homme mortel, ou des oiseaux, des bestiaux et des serpents » (Rm 1, 20-23). Tel n’est pas le dessein de Dieu notre Père, ni son appel sur nous ; lui qui veut que « Notre-Seigneur Jésus ait sa gloire en nous, et nous en lui ; voilà ce que nous réserve la grâce de notre Dieu et du Seigneur Jésus-Christ » (1ère lect.).

« Seigneur notre Dieu, nous le croyons : "nous sommes créés pour te louer, te respecter et te servir, et par là sauver notre âme. Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour nous, pour nous aider à poursuivre la fin pour laquelle tu nous as créés" (Saint Ignace de Loyola, Principe et fondement des Exercices spirituels). Donne-nous de ne pas les idolâtrer, mais d’ "en user dans la mesure où elles sont une aide pour notre fin, et de nous en dégager dans la mesure où elles lui sont un obstacle" (Ibid.). Garde-nous de toute hypocrisie, de toute religiosité mensongère par laquelle nous prétendrions nous justifier devant toi par nos œuvres, dans le seul but d’échapper à la bienheureuse dépendance de ton amour miséricordieux, que tu nous as révélé en Jésus-Christ, notre Seigneur et Sauveur bien-aimé ».


Père Joseph-Marie

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25/08/2006

CRITIQUE DU LÉGALISME.

Jésus explicite devant la foule la critique du légalisme, qu’il vient de formuler implicitement en ramenant ses contradicteurs au cœur de la Loi, c'est-à-dire au précepte de la charité. Les scribes et les pharisiens ont reçu mission d’enseigner et d’interpréter la Thora ; aussi le peuple est-il invité à les écouter et à mettre en pratique « ce qu’ils peuvent dire ». Mais là s’arrête leur ministère, qui se trouve hélas tronqué d’une dimension essentielle, à savoir le témoignage de vie, car « ils disent et ne font pas ».
Puisqu’ils « disent » ce qu’il convient de faire, il est inutile que Notre-Seigneur répète leurs enseignements. Il va plutôt souligner « ce qu’ils ne font pas », ou plutôt ce qui dans leur agir, est en contradiction avec ce qu’ils disent. Cette pédagogie n’a pas pour but de déconsidérer les scribes et les pharisiens aux yeux du peuple, mais Jésus entend dénoncer l’hypocrisie qui menace tout croyant, quelle que soit sa place dans la hiérarchie religieuse : tous nous sommes plus ou moins compromis dans des attitudes de duplicité qui sont autant de trahisons de l’Alliance. De plus, l’exhortation de Jésus a le mérite d’arracher un certain nombre de masques hideux dont nous avons recouvert le visage du Seigneur.
Nous apprenons ainsi que Dieu ne « charge pas de pesants fardeaux sur nos épaules » ; c’est plutôt lui qui vient porter avec nous le joug du péché et son cortège de conséquences, afin que nous ne fléchissions pas sous son poids et ne sombrions pas dans le désespoir. C’est cette attitude de compassion active à l’égard de nos frères éprouvés que Notre-Seigneur attend de chacun d’entre nous, à commencer par les responsables de la communauté qui devraient donne l’exemple. Or « ils ne veulent pas remuer du doigt les fardeaux dont ils chargent les gens ». Ils sont donc coupables d’une double faute : ils présentent les préceptes comme un fardeau, alors qu’ils sont en réalité un don précieux de Dieu, nous permettant de demeurer dans son amitié et de jouir de son aide ; et par l’indifférence qu’ils manifestent à l’égard de leur prochain, ils n’encouragent pas le peuple à interpréter la Loi en termes d’une initiative compatissante de Dieu.
Nous apprenons également que Dieu ne se donne pas en spectacle ; c’est l’amour qu’il désire, et non les honneurs mondains. La véritable gloire, celle qui vient de Dieu et qui lui revient, resplendira bientôt sur le visage de Jésus crucifié. Au sommet de son immolation, l’Agneau immolé nous révèle la sagesse de Dieu, qui tranche radicalement sur la vaine gloire de ce monde. Dieu n’est pas en quête d’établir ou de sauvegarder sa réputation ; il ne brigue pas les titres ronflants dont les pharisiens et les scribes se montrent si avides. Ce qu’il désire, c’est que ses enfants le reconnaissent pour ce qu’il veut être pour eux : un Père, leur unique Père, celui « dont découle toute paternité, au ciel et sur la terre » (Ep 3, 15). Nul ne peut cependant accueillir ce mystère, sans avoir ouvert son cœur à celui qui est venu nous révéler le Nom et le visage de Dieu : son Fils unique, Jésus le Messie, qui est désormais l’unique Maître, le seul Rabbi.
Nous apprenons enfin que Dieu ne commande pas comme un Souverain hautain, mais qu’il ne craint pas de s’abaisser pour servir ceux qu’il aime comme ses enfants. Là encore les scribes et les pharisiens nous servent de contre-exemples, eux dont l’attitude de suffisance contraste de manière saisissante avec les « mœurs de Dieu » que nous révèle Jésus : « Lui qui était dans la condition divine, n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu ; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix » (Ph 2, 6-8).
Telle est l’attitude que Notre-Seigneur attend de ses disciples, et tout particulièrement de ceux qu’il a établi pasteurs de son peuple : ils auront à cœur de témoigner, non seulement par leurs paroles mais par toute leur vie, du Dieu de tendresse et de compassion, qui révèle son visage de miséricorde à travers l’abaissement de son Fils, livré pour notre salut, ressuscité pour que nous puissions partager sa gloire.

« Seigneur qu’il est difficile de traverser ce monde sans succomber à ses séductions et sans tomber dans l’avidité de l’avoir, du pouvoir et de la gloire. Nos cœurs sont à ce point pervertis que - comme les scribes et les pharisiens - nous parvenons même à tirer de la vaine gloire du peu que nous faisons pour nos frères ou pour l’Eglise. Ouvre nos yeux Seigneur sur nos duplicités, nos hypocrisies, nos contre-témoignages ; unifie notre cœur et nos vies en toi afin que nous puissions marcher sur les chemins de l’Evangile dans la vie nouvelle de l’Esprit ».



Père Joseph-Marie

19:17 Écrit par BRUNO LEROY ÉDUCATEUR-ÉCRIVAIN dans BRIBES THÉOLOGIQUES. | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : christianisme, foi, spiritualite-de-la-liberation |  Imprimer | |  del.icio.us | | Digg! Digg | |  Facebook | | | Pin it! |

23/08/2006

OSER S'ENGAGER.

Josué réunit toutes les tribus d'Israël à Sichem ; puis il appela les anciens d'Israël, avec les chefs, les juges et les commissaires ; ensemble ils se présentèrent devant Dieu.
Josué dit alors à tout le peuple : « Ainsi parle le Seigneur, le Dieu d'Israël : Vos ancêtres habitaient au-delà de l'Euphrate depuis toujours, jusqu'à Térah, père d'Abraham et de Nahor, et ils servaient d'autres dieux. S'il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd'hui qui vous voulez servir : les dieux que vos pères servaient au-delà de l'Euphrate, ou les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. Moi et les miens, nous voulons servir le Seigneur. »
Le peuple répondit : « Plutôt mourir que d'abandonner le Seigneur pour servir d'autres dieux ! C'est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d'Égypte, cette maison d'esclavage ; c'est lui qui, sous nos yeux, a opéré tous ces grands prodiges et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c'est lui notre Dieu. »

Ps 33 (34), 2-3, 16-17, 20-21, 22-23
Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m'entendent et soient en fête !

Le Seigneur regarde les justes,
il écoute, attentif à leurs cris.
Le Seigneur affronte les méchants
pour effacer de la terre leur mémoire.

Malheur sur malheur pour le juste,
mais le Seigneur chaque fois le délivre.
Il veille sur chacun de ses os :
pas un ne sera brisé.

Le mal tuera les méchants ;
ils seront châtiés d'avoir haï le juste.
Le Seigneur rachètera ses serviteurs :
pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge.

Ep 5, 21-32
Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l'Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! si l'Église se soumet au Christ, qu'il en soit toujours de même pour les femmes à l'égard de leur mari.
Vous, les hommes, aimez votre femme à l'exemple du Christ : il a aimé l'Église, il s'est livré pour elle ; il voulait la rendre sainte en la purifiant par le bain du baptême et la Parole de vie ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église, resplendissante, sans tache, ni ride, ni aucun défaut ; il la voulait sainte et irréprochable. C'est comme cela que le mari doit aimer sa femme : comme son propre corps. Celui qui aime sa femme s'aime soi-même. Jamais personne n'a méprisé son propre corps : au contraire, on le nourrit, on en prend soin.
C'est ce que fait le Christ pour l'Église, parce que nous sommes les membres de son corps. Comme dit l'Écriture : A cause de cela, l'homme quittera son père et sa mère, il s'attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu'un. Ce mystère est grand : je le dis en pensant au Christ et à l'Église.

Jn 6, 60-69
Jésus avait dit dans la synagogue de Capharnaüm : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle. » Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, s'écrièrent : « Ce qu'il dit là est intolérable, on ne peut pas continuer à l'écouter ! »
Jésus connaissait par lui-même ces récriminations des disciples. Il leur dit : « Cela vous heurte ? Et quand vous verrez le Fils de l'homme monter là où il était auparavant ?... C'est l'esprit qui fait vivre, la chair n'est capable de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas. »
Jésus savait en effet depuis le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient pas, et celui qui le livrerait. Il ajouta : « Voilà pourquoi je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père. »
A partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s'en allèrent et cessèrent de marcher avec lui. Alors Jésus dit aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Simon-Pierre lui répondit : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint, le Saint de Dieu. »

Fiche de préparation

Fil rouge :

Se décider, s’engager… C’est un thème sur lesquels les lectures de ce dimanche pourraient bien attirer notre attention. Les tribus réunies par Josué à Sichem doivent se décider à servir Dieu ou les divinités païennes : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir ; les dieux que vos pères servaient au-delà de l’Euphrate, ou les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. Moi et les miens, nous voulons servir le Seigneur » (Cf. 1ère lecture). Le peuple d’Israël choisit finalement le Seigneur : « Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu ».
Dans l’évangile, les disciples de Jésus se trouvent scandalisés par la tournure que prennent les paroles du maître : « ‘Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle.’ Beaucoup de ses disciples qui avaient entendu s’écrièrent : ‘Ce qu’il dit là est intolérable, on ne peut pas continuer à l’écouter !’ ». Eux aussi sont mis face à un choix radical : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » Pierre, au nom des autres disciples, se décide pour le Christ : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle. » (Cf. Evangile)
Enfin, dans la deuxième lecture, saint Paul nous présente l’engagement irrévocable du Christ pour son Eglise comme un exemple pour les époux dans la décision amoureuse qu’ils se donnent l’un à l’autre : « Pour la femme, le mari est la tête, tout comme pour l’Eglise, le Christ est la tête, lui qui est el Sauveur de son corps… Si l’Eglise se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari. Vous les hommes aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Eglise, il s’est livré pour elle… C’est comme cela que le mari doit aimer sa femme : comme son propre corps. »


Actualisation :

En fin de compte, la question centrale posée par l’évangile ne porte pas tant sur ce que dit Jésus, mais sur ce qu’il est pour nous. Comme les disciples, nous sommes invités à nous positionner : Jésus est-il le Fils de Dieu ou bien un prédicateur comme tant d’autres ? Car ce qui a choqué la plupart des disciples ce n’est pas que Jésus prétende donner sa chair à manger - au sens propre du terme –. On ne peut les soupçonner d’une interprétation littérale aussi grossièrement matérielle. Ce qui les a heurtés c’est qu’il prétende être d’origine divine et se présente comme le don ultime et définitif de Dieu.
Est-ce que je considère Jésus comme le seul capable de répondre à ma soif de bonheur parce que je reconnais en lui la Parole divine de vie éternelle ? Etre chrétien, au fond, n’est-ce pas répondre chaque jour à cette question ? Mais Jésus nous avertit que cela demande de notre part un acte de foi. En effet, suivre Jésus est bien plus que le fruit d’une sympathie humaine : sur le chemin à sa suite, arrive pour tous un moment où l’humain ne suffit plus et où il est nécessaire de choisir de rester fidèle uniquement par foi.
Ainsi lu, le passage de saint Jean peut nous renvoyer à la scène du renouvellement de l’Alliance avec Dieu au terme de l’entrée en terre promise, juste avant que Josué ne meure après avoir accompli sa mission. La première lecture semble nous dire que ce qui compte le plus ce n’est pas d’avoir une terre où habiter mais de décider quel Dieu suivre et servir. Car notre véritable patrie c’est le Seigneur !
Nous pouvons ne pas avoir peur de nous engager à la suite de notre Dieu car, de même qu’il nous aimé le premier, il s’est engagé le premier en notre faveur et que si nous sommes fidèles, lui restera fidèle car il ne peut se renier lui-même. A Sichem, Dieu vient de donner la Terre Promise. Elle est là, devant les yeux du peuple hébreu. Dieu demande de se donner à lui après avoir donné ce qu’il avait promis. Il invite à demeurer fidèle après avoir manifesté combien lui s’est montré fidèle : « C'est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d'Égypte, cette maison d'esclavage ; c'est lui qui, sous nos yeux, a opéré tous ces grands prodiges et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés » (Cf. 1ère lecture).

Frère Elie



 

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